Cameroun

République du Cameroun
CAPITALE : Yaoundé
SUPERFICIE : 475 442 km²
POPULATION : 16,3 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Paul Biya
CHEF DU GOUVERNEMENT : Peter Mafany Musonge, remplacé par Ephraïm Inoni le 8 décembre
PEINE DE MORT : maintenue
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome signé
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : non signé

Le gouvernement s’est maintenu au pouvoir à l’issue de l’élection présidentielle, après avoir eu recours à la violence pour troubler des réunions pourtant pacifiques organisées par l’opposition. Les forces de l’ordre ont arrêté des dirigeants politiques afin d’empêcher le déroulement de rassemblements publics et de manifestations. Un prisonnier politique est mort en détention, manifestement par manque de soins médicaux. L’État n’a pas ouvert d’enquête indépendante ni publique sur les informations faisant état d’actes de torture, de « disparitions »ou de morts en garde à vue.

Contexte
Paul Biya, à la tête du pays depuis 1982, a été réélu à l’issue du scrutin présidentiel qui a eu lieu, en octobre, sur fond d’accusations de trucages et d’irrégularités formulées par les partis d’opposition et la Conférence épiscopale nationale du Cameroun. D’après les conclusions d’une délégation d’observateurs du Commonwealth, le processus électoral ne présentait pas la crédibilité nécessaire dans plusieurs domaines essentiels, notamment parce que certaines personnes avaient été privées du droit de vote. Les observateurs estimaient néanmoins que le résultat de l’élection reflétait l’intention de ceux qui avaient pu prendre part au scrutin.
La presqu’île pétrolifère de Bakassi demeurait sous le contrôle des forces nigérianes, malgré un arrêt rendu en 2002 par la Cour internationale de justice à la Haye en faveur de sa restitution au Cameroun. Le Nigéria n’avait pas retiré ses forces de sécurité de la région aux dates butoirs fixées aux mois de mai et de septembre.

Restriction de la liberté d’expression des opposants
Cette année encore, les partis de l’opposition ont exercé leurs activités dans un contexte caractérisé par de sévères restrictions. Les forces de sécurité ont arrêté leurs sympathisants de façon arbitraire et empêché la tenue de rassemblements publics.
Jean-Jacques Ekindi et d’autres chefs de file du Front des forces alternatives (FFA), un parti d’opposition, ont été arrêtés le 12 janvier à Douala par la police mobile paramilitaire et placés en détention durant de courtes périodes. Ils ont été empêchés de lancer une pétition publique en faveur d’un scrutin présidentiel libre et équitable.
La force a été employée afin de perturber le déroulement de marches de protestation organisées par une coalition de partis d’opposition. La Coalition nationale pour la réconciliation et la reconstruction (CNRR) demandait ainsi l’informatisation du registre électoral afin d’éviter le trucage des élections au profit du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
Le 6 juillet, plusieurs centaines de gendarmes antiémeutes ont interrompu une marche pacifique à Yaoundé, la capitale. Au nombre des manifestants qui auraient été agressés figuraient John Fru Ndi, le dirigeant du Social Democratic Front (SDF, Front social démocratique), ainsi que des députés de ce parti. Le 3 août, des policiers et des gendarmes ont encerclé et agressé une cinquantaine de manifestants à proximité du marché central de Yaoundé. Le 10 août, la police et la gendarmerie ont cerné un groupe de sympathisants de la CNRR durant plusieurs heures dans le but de les empêcher de participer à une marche. Un manifestant qui était passé au travers du cordon de sécurité aurait été frappé à coups de poing et fouetté.
Une marche prévue à Douala le 17 août a été arrêtée par les policiers et les gendarmes dès son lieu de rassemblement. Jean-Jacques Ekindi et d’autres dirigeants de l’opposition ont été interpellés.
Le 20 août, près de Bamenda, la capitale de la province du Nord-Ouest, John Kohtem, un dirigeant du SDF, a été battu à mort, apparemment par des partisans d’un député, dirigeant local du RDPC. À la suite des protestations massives formulées par des militants du SDF, 11 personnes ont été arrêtées en septembre dans le cadre de l’enquête sur cet homicide. Fin 2003, aucune inculpation n’avait été prononcée contre le député ni les 11 autres personnes.
Des défenseurs des droits humains ont subi des actes de harcèlement de la part des autorités.
Des représentants de l’appareil judiciaire de Maroua, la capitale de la province de l’Extrême- Nord, ont saisi des biens appartenant au Mouvement pour la défense des droits de l’homme et des libertés (MDDHL). Ils ne les ont restitués qu’après versement d’argent.
Le déni constant de la liberté de la presse a illustré la peur qu’inspirent depuis longtemps aux autorités les informations non censurées. L’interdiction imposée en 2003 à un certain nombre de stations de radio et de chaînes de télévision, accusées d’émettre ou de diffuser sans autorisation, demeurait en vigueur. Le gouvernement a refusé de leur accorder une autorisation de diffusion.
Le 11 juillet, deux correspondants locaux de la BBC ont été arrêtés par des soldats sur la presqu’île de Bakassi. Alors qu’ils étaient officiellement autorisés à s’y rendre, ils ont été accusés d’espionnage, ont vu leur matériel et leurs documents confisqués durant une courte période et ont été placés en résidence surveillée dans la ville de Limbe jusqu’au 16 juillet.

Détention à caractère politique
Des personnes demeuraient incarcérées pour des mobiles politiques. Plusieurs d’entre elles se trouvaient dans un état de santé précaire, mais n’ont pas été autorisées à recevoir les soins médicaux nécessaires.
En juillet, Martin Cheonumu est mort alors qu’il se plaignait depuis plusieurs jours de douleurs abdominales. Il est le deuxième détenu à décéder sur un groupe de 18 personnes condamnées en 1999 à l’issue d’un procès inique qui s’était déroulé devant une juridiction contrôlée par le ministère de la Défense. Les accusés n’ont pas été autorisés à consulter un avocat durant leur détention provisoire. Le gouvernement a annoncé en décembre que le droit d’appel leur avait été accordé, mais aucun recours n’avait encore été formé à la fin de l’année. Ces 18 personnes étaient membres du Southern Cameroons National Council (SCNC, Conseil national du Cameroun méridional), un groupe militant en faveur de l’indépendance des provinces anglophones du Cameroun. Elles ont notamment été déclarées coupables d’homicide, de vol qualifié et de détention illégale d’armes à feu dans le cadre d’attaques armées commises, en 1997, dans la province du Nord-Ouest.

Torture en garde à vue
Les personnes placées en garde à vue risquaient toujours d’être torturées. Aucune procédure n’a été mise en place afin que soit ouverte une enquête indépendante ou approfondie sur les morts inexpliquées ou sur les informations faisant état de torture ou de « disparition ».
Les ecchymoses et les plaies que portait le corps de Laurent Kougang, mort en garde à vue le 23 avril, semblaient être la conséquence d’un passage à tabac. Apparemment soupçonné de trafic d’armes, Laurent Kougang avait été arrêté le 15 avril puis détenu successivement dans deux commissariats de police avant d’être transféré au poste central de Brazzaville, un quartier de Douala, où il est décédé. À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’a été menée sur les circonstances de sa mort.
Selon certaines informations, le 12 mai, à Ikiliwindi, des policiers auraient menotté Afuh Benard Weriwo avant de le frapper et de mettre le feu à ses vêtements, sous les yeux de quelques gendarmes. L’homme, âgé de vingt-sept ans, avait été arrêté à la suite d’une accusation de vol de vélo. Il est mort le 10 juillet des suites de ses blessures. Les appels lancés par les témoins et les militants locaux afin qu’une enquête soit ouverte et les coupables présumés traduits en justice sont restés lettre morte.
Aucune enquête n’a, cette année encore, été ouverte sur la « disparition » présumée, en février 2001, de neuf adolescents à Bépanda Omnisports, un quartier de Douala. Soupçonnés d’avoir dérobé une gazinière et une bouteille de gaz, les jeunes garçons avaient été arrêtés et auraient ensuite été torturés au siège du Commandement opérationnel de la gendarmerie, surnommé « Kosovo », avant de « disparaître ».

Peine de mort
Au mois de juillet, un responsable du ministère de la Justice a indiqué que les condamnations à mort n’étaient plus appliquées mais, en règle générale, commuées en peines de réclusion à perpétuité à la suite des recours en grâce déposés devant le président de la République. L’agent de l’État a déclaré que 27 recours étaient à l’étude, mais n’a fourni aucun renseignement sur les personnes encore sous le coup d’une condamnation à la peine capitale. Les dernières exécutions remontaient à 1997.

Visites d’Amnesty International
Des représentants d’Amnesty International ont demandé à se rendre au Cameroun afin d’enquêter sur les informations faisant état d’atteintes aux droits humains commises durant la période préélectorale. Cependant, comme les années précédentes, les autorités camerounaises ont refusé d’accorder cette autorisation.

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