JAMAIQUE

Les violences sexuelles, notamment les viols, étaient toujours très répandues en 2006, ce qui exposait les femmes et les jeunes filles à de graves risques sanitaires. Le nombre d’homicides volontaires a quant à lui diminué mais il demeurait encore l’un des plus élevés au monde. Déjà nombreux en 2005, les meurtres imputables à des policiers se sont encore multipliés. L’impunité continuait d’être la norme dans ce type d’affaires.




Contexte
En février, Portia Simpson Miller a été élue présidente du parti au pouvoir, le People’s National Party (PNP, Parti national populaire). En mars, elle a été nommée Premier ministre et devenait la première femme occupant de telles fonctions à la Jamaïque. En octobre, le PNP a été accusé de corruption : l’opposition a révélé qu’il avait reçu un don de 31 millions de dollars jamaïcains (environ 350 000 euros) de la part d’une entreprise commercialisant du pétrole brut nigérian sur le marché international pour le compte de la Jamaïque.

Violences contre les femmes
Le nombre d’agressions sexuelles est resté très élevé dans l’ensemble du pays, exposant les femmes et les jeunes filles à de graves risques en matière de santé. Elles étaient nombreuses à être victimes de harcèlement et d’agressions à caractère sexuel de la part d’inconnus, d’amis, de membres de la famille, de connaissances ou de partenaires intimes, mais les autorités s’abstenaient de procéder à des enquêtes en bonne et due forme et de sanctionner comme il se devait les auteurs. Le taux d’infection au VIH a continué d’augmenter chez les femmes et les jeunes filles ; les personnes vivant avec le VIH/sida étaient en butte à des discriminations systématiques.
Les débats sur la réforme de la Loi relative aux crimes et aux délits contre les personnes et de la Loi relative à la répression de l’inceste, entamés respectivement depuis 1995 et 2000, ont repris le 6 décembre devant une commission parlementaire mixte. Les modifications proposées pour ces deux lois assureraient une meilleure protection juridique aux femmes et aux mineurs, notamment en érigeant le viol conjugal en infraction pénale et en alourdissant les peines sanctionnant les auteurs de violences sexuelles. Le Bureau chargé des enquêtes sur les atteintes sexuelles et les sévices à enfants a été renforcé et des pouvoirs supplémentaires lui ont été attribués pour la conduite des investigations sur ces crimes.
Début 2006, trois adolescents ont fait subir à une jeune fille de treize ans de multiples violences sexuelles à l’arrière d’un camion. D’après les informations disponibles, un homme de quarante-six ans, ancien diacre d’une Église locale, supervisait et filmait les scènes. Cet homme et les trois garçons ont été inculpés d’attentat à la pudeur et d’abus sexuel mais, en novembre, le parquet a abandonné les poursuites et a remplacé les chefs d’inculpation par celui de traite d’êtres humains. Les accusés ont été remis en liberté sous caution en attendant leur procès, qui n’avait pas encore débuté à la fin de l’année.
Enid Gordon avait quinze ans lorsqu’elle a été violée par deux hommes. Deux hommes ont été arrêtés, inculpés puis remis en liberté sous caution. En octobre 2005, une semaine avant la date à laquelle elle devait témoigner contre eux au tribunal, Enid Gordon a été retrouvée étranglée sur les lieux où elle avait été violée un an auparavant. Deux suspects ont été arrêtés et des éléments de preuve médicolégaux relevés, mais fin 2006 on attendait toujours les résultats de l’enquête.


Criminalité et insécurité

Même s’il a diminué en 2006, le taux d’homicides commis dans le pays demeurait élevé. D’après les statistiques officielles, 1 355 meurtres ont été commis au cours de l’année, soit une baisse de plus de 20 p. cent par rapport à 2005.
La facilité avec laquelle il était possible de se procurer des armes de petit calibre aggravait encore la violence. En octobre, la Jamaïque a voté en faveur d’une résolution des Nations unies visant à mettre en place un traité sur le commerce des armes.
Les conflits entre bandes rivales étaient courants. Ces gangs commettaient parfois des violences dans des localités dont les habitants les considéraient toutefois dans certains cas comme leurs protecteurs en raison de la grande méfiance qu’inspirait la police. Dans certains cas, des chefs de bandes auraient exigé des familles qu’elles leur livrent leurs filles adolescentes à des fins d’exploitation et d’agression sexuelles.

Homicides illégaux
Amnesty International a continué de recevoir des informations faisant état de violences policières. Au moins 138 personnes auraient été tuées par des policiers en 2006. De manière générale, les violences policières restaient impunies et les agents des forces de sécurité et du système judiciaire n’avaient pas à répondre de leurs actes.
En février, Glenroy McDermoth, agent de la police jamaïcaine, a été condamné à la réclusion à perpétuité pour avoir tué, en 2000, Michael Dorsett en lui tirant dans le dos. Il s’agissait de la première condamnation prononcée depuis octobre 1999 contre un policier pour un meurtre commis dans l’exercice de ses fonctions.

Peine de mort
La Jamaïque n’a procédé à aucune exécution en 2006. La dernière a eu lieu en 1988. La décision rendue en 1993 par le Judicial Committee of the Privy Council (JCPC, Comité judiciaire du Conseil privé), selon laquelle les peines capitales devaient être appliquées dans un délai de cinq ans ou bien commuées, demeurait en vigueur. Certains hauts responsables du gouvernement ont lancé des appels en faveur de la reprise des exécutions par pendaison. Sept prisonniers se trouvaient toujours dans le quartier des condamnés à mort.

Visites d’Amnesty International
Des délégués d’Amnesty International se sont rendus à la Jamaïque au mois de décembre, afin de s’entretenir avec des représentants du gouvernement et d’organisations non gouvernementales au sujet de la violence envers les femmes.

Autres documents d’Amnesty International

 Jamaica : Sexual violence against women and girls in Jamaica - “just a little sex” (AMR 38/002/2006).

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