Angola

Le gouvernement a réaffirmé sa volonté de fournir des logements sociaux mais les expulsions forcées n’ont pas cessé, 2009 étant notamment marquée par l’une des opérations les plus massives de ces dernières années. Selon les informations reçues, la police se serait rendue coupable d’exécutions extrajudiciaires, de recours excessif à la force, d’arrestations et détentions arbitraires, ainsi que de torture et d’autres formes de mauvais traitements. Les organisations de défense des droits humains ont moins subi de manœuvres d’intimidation, mais les journalistes ont continué d’être harcelés et poursuivis en raison de leur travail.

RÉPUBLIQUE D’ANGOLA
CHEF DE L’ÉTAT : José Eduardo dos Santos
CHEF DU GOUVERNEMENT : António Paulo Kassoma
PEINE DE MORT : abolie
POPULATION : 18,5 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 46,5 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 220 / 189 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 67,4 %

Contexte

En septembre, le président José Eduardo dos Santos a fêté son 30e anniversaire à la tête de l’État. L’élection présidentielle prévue en 2009 a été de nouveau reportée, en attendant l’adoption d’une nouvelle constitution. Trois types de modèles constitutionnels, dont l’un permettrait au président d’être élu directement par le Parlement, ont été présentés. Une première version de ces modèles a été diffusée en vue d’un débat public, mais aucune décision n’avait été prise à la fin de l’année. En décembre, le président dos Santos a annoncé que l’élection allait sans doute encore être reportée de trois ans.
De nombreuses régions du pays ont été touchées au début de l’année par des inondations dues à des pluies diluviennes. En mars, des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur foyer, notamment quelque 25 000 habitants de la province de Cunene, dans le sud du pays.
En septembre, l’Angola a conclu avec le Fonds monétaire international (FMI) un accord portant sur un prêt d’un montant de quelque 890 millions de dollars des États-Unis.

Droit à un logement convenable – expulsions forcées
En juillet, le gouvernement a annoncé que certains matériaux de construction importés seraient exonérés de taxes afin de faciliter l’accès au logement des personnes démunies. Le même mois, on a appris que les États-Unis allaient prêter 400 millions de dollars à l’Angola afin d’aider le pays à construire un million d’habitations pour les pauvres au cours des cinq années à venir.
Malgré ces initiatives, les expulsions forcées se sont poursuivies. En juillet, les autorités ont délogé plus de 3 000 familles – soit environ 15 000 personnes, d’après les estimations – vivant dans les quartiers de Bagdad et d’Iraque, à Luanda. Il s’agissait de l’une des plus vastes opérations de ces dernières années. Les représentants de l’État l’ont justifiée en déclarant que les personnes expulsées avaient construit leurs maisons sur des terrains occupés illégalement et que le gouvernement affectait à des projets de développement. Toutefois, certains habitants ont déclaré posséder des titres de propriété sur ces terrains. Des expulsions forcées ont également eu lieu dans la province de Benguela, et des dizaines de milliers de familles à travers le pays risquaient d’être chassées de chez elles.

Police

Cette année encore, la police a commis des violations des droits humains, notamment en recourant de manière excessive à la force et en procédant à des exécutions extrajudiciaires. Rares sont les policiers qui ont été traduits en justice et peu d’informations étaient disponibles sur les mesures prises contre la police pour les atteintes aux droits humains commises par le passé.
Fin janvier, dans la province de Namibe, un policier a pourchassé et abattu Roberto Yava Chivondu alors qu’il rentrait chez lui à moto. Le policier l’a sommé de s’arrêter, mais Roberto Yava Chivondu n’a pas obtempéré. L’épouse et la nièce de cet homme, qui étaient avec lui sur la moto, ont été blessées en chutant après les coups de feu. Le policier, qui avait semble-t-il déjà tué une autre personne, a été reconnu coupable en juin du meurtre de Roberto Yava Chivondu par le tribunal provincial de Namibe et condamné à 20 ans d’emprisonnement.
Jorge Euclia a été blessé par balle en août à Lobito, une ville de la province de Benguela, lors d’une opération de police visant à arrêter un groupe de jeunes suspects. Un policier a tiré par trois fois en direction de Jorge Euclia alors que celui-ci tentait de l’empêcher de frapper son frère. La victime, qui a eu besoin de soins intensifs, a survécu à ses blessures. Le chef de la police de la province de Benguela a affirmé que les coups de feu avaient été tirés par l’un des suspects et non par un policier. Aucune enquête n’a été menée et personne n’a eu à répondre de ces tirs.
En septembre s’est ouvert devant le tribunal provincial de Luanda le procès de sept policiers accusés d’avoir tué huit jeunes dans le secteur de Largo da Frescura, à Luanda, en juillet 2008. Ce procès était toujours en cours à la fin de l’année.

Arrestations arbitraires, torture et autres mauvais traitements
Des arrestations et détentions arbitraires opérées par la police ont été signalées. La plupart des interpellations ont été marquées par un recours excessif à la force. Des policiers auraient également torturé et soumis à d’autres mauvais traitements des détenus dans la province de Lunda-Nord.
Le 1er avril, dans la province de Lunda-Nord, quatre membres de la Commission sur le manifeste juridique et sociologique du protectorat des Lundas-Tchokwés ont apporté ce manifeste au poste de police de Cuango. Calixto Kulunga, Modesto Timóteo, Bento Majimo et Zeferino Rui Muatxingo auraient alors été arrêtés et battus par des policiers qui voulaient les noms et adresses des autres membres de ce mouvement. Par la suite, environ 270 personnes désignées par ces hommes ont été interpellées et placées en détention. La plupart ont été relâchées, mais une trentaine d’entre elles ont été maintenues en détention et, semble-t-il, torturées à la prison de Conduege (Lunda-Nord), tout comme les quatre hommes. Tous ces détenus devaient être jugés en novembre pour crimes contre l’État, mais le procès a été reporté.

Défenseurs des droits humains

En mars, la Cour constitutionnelle s’est déclarée non compétente pour examiner la procédure engagée contre l’Association justice, paix et démocratie. Cette procédure visait à obtenir la dissolution de l’association au motif que ses statuts étaient contraires au droit angolais. La Cour constitutionnelle a renvoyé l’affaire devant la Cour suprême.

Liberté d’expression – journalistes

Des journalistes ont cette année encore été harcelés par le biais de poursuites judiciaires et de mesures de restriction. Au moins trois journalistes ont été accusés d’avoir utilisé les médias à mauvais escient, et un autre a été condamné à une peine d’emprisonnement avec sursis pour diffamation. Le directeur du journal Folha 8 s’est vu confisquer son passeport en mai alors qu’il tentait de se rendre en Namibie. On lui a dit que son nom figurait sur une liste de personnes non autorisées à quitter le pays.
En juillet, le directeur du journal A Capital aurait été convoqué par la police judiciaire afin d’être interrogé ; il était soupçonné d’avoir « porté atteinte à l’honneur et à la dignité du chef de l’État », une infraction pénalement réprimée. Cette accusation reposait sur une plainte déposée par le parquet à la suite de la publication dans ce journal d’un article critique à l’égard du président. Aucune décision n’avait été prise dans cette affaire à la fin de l’année.
En juillet également, le tribunal provincial de Luanda a condamné le journaliste Eugénio Mateus à trois mois d’emprisonnement avec sursis pour diffamation des forces armées. Il avait été inculpé à la suite d’une plainte du chef d’état-major de l’armée portant sur un article rédigé en 2007, dans lequel il critiquait l’armée pour sa consommation excessive d’alcool, entre autres choses.

Province de Cabinda

Des affrontements sporadiques ont de nouveau eu lieu dans la province de Cabinda entre les Forces armées angolaises et la branche armée du Front de libération de l’État de Cabinda (FLEC).
En mars s’est ouvert le procès de cinq personnes arrêtées et inculpées de crimes contre l’État dans la province de Cabinda en 2008. En mai, quatre d’entre elles ont été acquittées et la cinquième a été condamnée à 18 mois d’emprisonnement pour détention d’armes à feu. Elles ont toutes été remises en liberté, y compris celle qui avait été condamnée, et ce en raison de la période qu’elle avait déjà passée en détention provisoire.
En août, le prisonnier d’opinion José Fernando Lelo a été relâché après son acquittement en appel par la Cour suprême militaire. La Cour a en effet considéré que les éléments de preuve disponibles n’étaient pas suffisants pour confirmer sa condamnation. Cet homme avait été condamné en septembre 2008 à 12 ans d’emprisonnement par le tribunal militaire de Cabinda pour crimes contre la sûreté de l’État et incitation à la rébellion. En août également, la Cour suprême militaire a alourdi en appel les peines prononcées contre cinq soldats condamnés en même temps que José Fernando Lelo, en septembre 2008. Initialement condamnés à 13 ans d’emprisonnement pour tentative de rébellion armée et d’autres crimes militaires, les cinq soldats étaient désormais sous le coup de sentences allant de 22 à 24 années de détention.

Droits des migrants

Cette année encore, les autorités ont expulsé des migrants sans papiers, essentiellement des ressortissants de la République démocratique du Congo (RDC). Cependant, un grand nombre de personnes expulsées ont affirmé qu’elles étaient en droit de rester en Angola. Vers la fin du mois de septembre, les autorités de la RDC ont commencé à expulser des Angolais à titre de représailles (voir République démocratique du Congo).
Menées dans des conditions déplorables, ces expulsions massives ont été marquées par des violations des droits humains ; des violences physiques et parfois sexuelles ont notamment été commises par les forces armées. Un grand nombre de personnes ont été reconduites aux frontières dans des véhicules où elles avaient été entassées et où, selon les informations reçues, certaines seraient mortes asphyxiées. De plus, de nombreuses personnes, y compris des enfants, ont été séparées du reste de leur famille lors des expulsions, et abandonnées sans nourriture ni abri dans des zones reculées. Ces opérations ont touché des réfugiés des deux pays.
En octobre, l’Angola et la RDC ont accepté de mettre fin aux expulsions. Le gouvernement angolais a coopéré avec une commission interorganisations des Nations unies pour faire face à la situation humanitaire consécutive aux expulsions dans les provinces d’Uíge et de Zaïre. À la connaissance d’Amnesty International, aucune mesure n’a été prise contre les responsables présumés des violations des droits humains commises lors de ces opérations.

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