Laos

RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE POPULAIRE LAOTIENNE
CAPITALE : Vientiane
SUPERFICIE : 236 800 km_
POPULATION : 5,7 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Khamtay Siphandone
CHEF DU GOUVERNEMENT : Bounyang Vorachit
PEINE DE MORT : maintenue
CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : non signé

Le long conflit armé entre le gouvernement et les rebelles hmong, qui échappait au regard de la communauté internationale - essentiellement en raison de restrictions d’accès imposées aux observateurs -, a connu une certaine publicité à la suite de la visite de deux journalistes étrangers à un groupe de combattants cachés dans la jungle. Le retentissement au niveau international et l’embarras consécutif des autorités laotiennes ont été, semble-t-il, à l’origine d’une opération de répression militaire qui aurait fait un grand nombre de victimes parmi la population civile. Dans le même temps, les forces armées d’opposition ont multiplié les attentats à la bombe délibérés ou aveugles contre des bus ou des zones peuplées de civils. Il était difficile d’identifier les responsables de ces attaques car différents groupes armés d’opposition semblaient en activité, notamment les insurgés hmong. En août, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a effectué une analyse critique de la situation en matière de respect des droits civils et politiques dans le pays. Les atteintes à la liberté d’expression, les dysfonctionnements de la justice et la corruption régnant au sein du secteur judiciaire restaient des sujets de préoccupation.

Contexte
Cette année encore, le Laos a différé la ratification du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qu’il a signés au mois de décembre 2000. Par ailleurs, le pays, classé parmi les plus pauvres de la planète, occupait selon certaines informations le troisième rang mondial pour la production d’opium. Le tourisme revêtait une importance fondamentale pour l’économie. Parmi les grands projets d’infrastructure bénéficiant d’une aide de la communauté internationale figuraient la construction d’un grand barrage hydroélectrique destiné à alimenter la Thaïlande limitrophe et celle d’une route reliant la Chine à la Thaïlande.
Le Laos a poursuivi avec le Viêt-Nam les rencontres et les projets de coopération bilatéraux, notamment en matière de défense et de sécurité, et a renforcé ce type de liens avec la Chine. Le puissant lobby hmong aux États-Unis a exprimé ses préoccupations quant aux droits humains et religieux au moment où le gouvernement américain, qui renforçait sa politique de dialogue avec le Laos, s’acheminait vers la normalisation de ses relations commerciales avec ce pays.
De nouveaux gouverneurs de province ont été nommés à la suite d’un remaniement ministériel intervenu en janvier. En octobre, Bouasone Bouphavanh est devenu vice-Premier ministre chargé des Affaires intérieures. Selon les informations recueillies, il était également responsable de la sécurité, dans une période de tension grandissante liée aux insurrections. Les membres d’Églises chrétiennes non autorisées auraient, cette année encore, été en butte à des arrestations et des actes de harcèlement. En raison des restrictions imposées par les autorités à la liberté d’expression, et de l’impossibilité pour les organismes indépendants de surveillance des droits humains de se rendre sur place, il s’est révélé extrêmement difficile d’obtenir des informations vérifiables sur les persécutions religieuses et les autres atteintes aux droits de la personne.
Les autorités laotiennes cherchaient toujours à obtenir l’extradition de Thaïlande de 16 de leurs ressortissants accusés d’appartenir à un groupe d’opposition qui avait été impliqué dans une attaque armée lancée en 2000 dans la province de Champassak. Dans une décision inattendue rendue au mois de juin et dont on ignorait la motivation, la justice thaïlandaise a toutefois rejeté la demande.

Conflit hmong

En janvier, deux journalistes australiens se sont rendus auprès d’un groupe rebelle hmong en lutte contre les autorités laotiennes depuis la chute du précédent régime, en 1975. Leur reportage a révélé à l’opinion internationale le conflit insurrectionnel qui oppose de longue date diverses minorités, dont les Hmong, aux autorités. Ces dernières semblent avoir réagi en intensifiant les actions militaires contre les communautés rebelles isolées, qui comptaient un grand nombre d’enfants, de femmes et de personnes handicapées ou malades. Ces groupes subsistent en recherchant leur nourriture dans la jungle ; l’étau militaire qui s’est resserré sur eux, provoquant famine et maladies, aurait causé un grand nombre de victimes civiles, dont 200 femmes et enfants.
En août, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné la situation du Laos. Il a appelé le secrétaire général des Nations unies à prendre des mesures supplémentaires, notamment l’envoi sur place d’une mission « en vue d’assister [le Laos] dans l’exécution de son obligation de respecter les droits de l’homme et d’éliminer toutes les formes de discrimination raciale ». En réponse à ces recommandations et aux rapports mentionnant un nombre croissant de victimes civiles, les agences des Nations unies au Laos ont cherché à entrer en contact avec les groupes rebelles afin de leur fournir l’assistance humanitaire dont ils avaient désespérément besoin, particulièrement en matière de nourriture et de médicaments.

Conditions de détention
Aucun élément ne laissait espérer une amélioration des conditions de détention déplorables signalées les années précédentes. Selon les informations recueillies, la torture et les mauvais traitements sont restés monnaie courante et, dans un cas, des gardiens de prison auraient brûlé un détenu aux testicules. En général, les prisonniers souffraient du manque de soins médicaux et d’une alimentation insuffisante, notamment ceux qui ne pouvaient pas compter sur le soutien de leur famille. Les détenus atteints de troubles mentaux étaient traités avec une dureté particulière. Il semblerait que les gardiens de prison étaient les instigateurs de la plupart des violences entre détenus. Dans l’un des cas signalés, on aurait falsifié les dates de naissance de deux mineurs hmong afin de pouvoir les incarcérer en tant qu’adultes. De nombreux éléments tendaient à prouver que les Hmong étaient traités encore plus durement que les autres personnes privées de liberté.
_Pa Fue Khang et Thao Moua étaient respectivement le chauffeur et le guide de deux journalistes européens et de leur interprète américain qui, avec un certain nombre de Laotiens, ont été arrêtés début juin après une visite d’un campement abritant des rebelles hmongs et leurs familles, dans la province de Xieng Khouang. Les pressions de la communauté internationale ont permis d’obtenir la libération rapide des trois étrangers après qu’ils eurent été condamnés à quinze années d’emprisonnement lors d’un procès de deux heures contraire aux normes d’équité les plus élémentaires et de toute évidence motivé par des objectifs politiques. Ils ont été déclarés coupables d’entrave à la mission d’un agent de l’État, de complicité de crime, de détention d’armes à feu et d’explosifs, de détention de stupéfiants, de destruction de preuves et de tentative de fuite. Pa Fue Khang et Thao Moua, qui devaient répondre des mêmes chefs d’accusation, mais n’ont pour leur part bénéficié d’aucune représentation juridique, se sont vu infliger respectivement quinze et douze ans d’emprisonnement. Ils étaient toujours incarcérés fin 2003. Après l’arrestation, la police aurait mis des fers aux pieds des Laotiens du groupe, puis les aurait frappés à coups de bâton et de chaîne de bicyclette, au point que l’un d’entre eux aurait perdu connaissance. On ne sait pas exactement ce qu’il est advenu d’au moins un des Hmong arrêtés ce jour-là.

Prisonniers politiques
Le sort des prisonniers politiques a, cette année encore, fait l’objet du plus grand secret de la part des autorités. L’impossibilité d’enquêter sur place et les restrictions pesant sur la liberté d’expression rendaient très aléatoire toute recherche indépendante et impartiale d’informations.
Le prisonnier d’opinion Khamtanh Phousy a été remis en liberté en avril après avoir purgé une peine de sept ans d’emprisonnement qui lui avait été infligée pour s’être converti au christianisme et avoir entretenu des contacts à l’étranger.
Des informations contradictoires ont circulé dans le courant de l’année quant au sort de cinq prisonniers d’opinion détenus depuis 1999. Ces membres du Mouvement des étudiants laotiens pour la démocratie ont été arrêtés après avoir tenté d’organiser une manifestation pacifique à Vientiane en octobre 1999, dans laquelle ils entendaient réclamer le respect des droits humains, la libération des prisonniers politiques, le multipartisme et de nouvelles élections législatives. En réponse aux appels de membres d’Amnesty International, les autorités ont déclaré que trois de ces prisonniers - Seng-Aloun Phengphanh, Thongpaseuth Keuakoun, Khamphouvieng Sisaath et - avaient été déclarés coupables de trahison et condamnés à dix ans d’emprisonnement, et que deux autres, Phavanh Chittiphong et Khamlane Kanhot, avaient été reconnus coupables de « tentative de subversion contre la nation » et condamnés chacun à cinq ans d’emprisonnement. Selon certaines informations non officielles, les cinq hommes se seraient vu infliger des peines de détention à perpétuité ; d’autres sources encore faisaient état de la mort en détention de certains membres du groupe. Les autorités ont contesté l’identité de Bouavanh Chanmanivong et Keochay, deux autres personnes qui auraient été arrêtées avec ce groupe en 1999.
_Les prisonniers d’opinion Feng Sakchittaphong et Latsami Khamphoui, tous deux âgés de soixante-deux ans, étaient toujours incarcérés au camp n° 7, situé dans une région reculée de la province de Houaphan. Ces hommes, anciens hauts fonctionnaires, ont été arrêtés en 1990 pour s’être prononcés en faveur d’un changement non violent du régime politique et du système économique. Ils ont été condamnés au cours de l’année 1992 à quatorze années d’emprisonnement, en vertu de la législation sur la sécurité nationale et à l’issue d’un procès non équitable. Ils étaient toujours détenus dans des conditions extrêmement pénibles et le droit de visite de leurs proches était soumis à des restrictions draconiennes.
_Sing Chanthakoummane et Pangtong Chokbengboun sont restés emprisonnés au camp n° 7. Arrêtés en 1975, ils ont été détenus sans inculpation ni jugement pendant dix-sept années pour « rééducation », puis condamnés à la détention à perpétuité en 1992, à l’issue d’un procès contraire aux normes d’équité.

Peine de mort
Vingt-sept personnes auraient été condamnées à mort au cours de l’année, dont quatre au moins pour des infractions à la législation sur les stupéfiants. Aucune exécution n’a été signalée. Certaines infractions restaient passibles de la sentence capitale, mais à la connaissance d’Amnesty International, aucune exécution n’avait eu lieu depuis plus de dix ans.

Autres documents d’Amnesty International

Laos. Le sort des Laotiens détenus ainsi que les charges pesant contre eux doivent être rendus publics (ASA 26/006/2003).
Laos. Quinze ans de prison : peine prononcée à l’issue d’un procès de deux heures (ASA 26/008/2003).
Laos. Trois étrangers remis en liberté mais des ressortissants laotiens sont torturés et maintenus en détention (ASA 26/010/2003).
Laos. Recours à la famine comme arme de guerre contre des civils (ASA 26/013/2003).

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