MALAISIE

Au moins 80 hommes accusés d’être liés à des groupes islamistes extrémistes étaient détenus sans inculpation ni procès, en vertu de la Loi relative à la sécurité intérieure. L’exercice du droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion continuait d’être limité par une législation répressive. Certaines personnes soupçonnées d’être des immigrés en situation irrégulière ont subi des actes de harcèlement et ont été placées en détention dans des conditions très pénibles, dans l’attente de leur expulsion. Des centaines d’individus, présentés, pour la plupart, comme des immigrés clandestins, ont été emprisonnés ou soumis à la bastonnade, à l’issue de procès non équitables. Les tribunaux continuaient de prononcer la peine de mort et quatre condamnés ont été exécutés.





Réforme de la police
Un certain nombre d’organisations non gouvernementales ont cette année encore pressé le gouvernement de mettre en place une commission indépendante chargée de traiter les plaintes contre la police. Une Commission royale d’enquête sur la police avait recommandé en 2005 l’adoption d’un important train de réformes, et notamment la création d’un tel organisme, au plus tard en mai 2006. Le projet de loi censé donner naissance à la future commission était toujours sur le bureau du procureur général à la fin de l’année. D’autres recommandations, comme l’abrogation ou la révision des lois qui permettaient la détention sans procès ou qui imposaient qu’une autorisation soit demandée à la police pour tout rassemblement public, n’ont pas non plus été mises en œuvre.

Brutalités policières
Cette année encore, selon certaines informations, la police a eu recours à une force excessive contre des manifestations pacifiques. Ainsi, en mars et en mai, des policiers équipés de boucliers ont violemment dispersé à coups de matraque et de canon à eau plusieurs manifestations organisées à Kuala-Lumpur pour protester contre la hausse du prix des carburants. Plusieurs personnes auraient été blessées et des dizaines de manifestants auraient été interpellés. Tous ont cependant été remis en liberté par la suite.
De sérieux doutes subsistaient quant à l’efficacité du dispositif censé garantir la sécurité et la santé des personnes placées en garde à vue. Au moins cinq personnes, dont une femme, seraient mortes en détention pendant l’année.

Détention sans procès
La Loi relative à la sécurité intérieure, qui autorisait la détention sans jugement pour une période pouvant aller jusqu’à deux ans et renouvelable indéfiniment, était toujours appliquée ou utilisée comme une menace par les autorités. Au moins 80 hommes accusés d’appartenir ou d’être liés à des groupes islamistes extrémistes étaient toujours détenus à la fin de l’année. Au moins 20 mandats de dépôt ont été renouvelés, sans que les motifs de ces décisions soient rendus publics.
Au mois de mai, 11 personnes accusées de faire partie d’un groupe islamiste appelé Darul Islam Sabah ont été arrêtées dans le Sabah au nom de la Loi relative à la sécurité intérieure.
En octobre, au moins 17 membres présumés de la Jemaah Islamiyah (JI, Communauté islamique) ou du Kumpulan Militan Malaysia (KMM, Groupe de militants malaisiens) ont été remis en liberté. Ils restaient toutefois sous le coup d’ordonnances limitant leurs déplacements.
Au moins 700 suspects de droit commun étaient toujours détenus en vertu de l’Ordonnance d’urgence (ordre public et prévention de la délinquance), qui autorisait la détention illimitée sans procès. Pour nombre d’entre eux, cette Ordonnance était invoquée uniquement parce que la police ne disposait pas de preuves suffisantes pour justifier une inculpation. Au mois d’octobre, la Cour fédérale a estimé que la légalité des placements en détention effectués par la police en vertu de l’Ordonnance d’urgence ne pouvait pas être contestée devant les tribunaux, dès lors qu’un mandat d’arrêt avait été émis par le ministre de la Sécurité intérieure.

Travailleurs migrants, réfugiés et demandeurs d’asile
Les travailleurs migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile continuaient d’être souvent arrêtés, détenus dans des conditions déplorables et expulsés au titre de la Loi sur l’immigration. Les travailleurs immigrés se voyaient infliger un traitement indigne par l’administration et les employeurs, physiquement comme moralement. Ils étaient souvent privés des avantages et de la protection sociale attribués aux travailleurs malaisiens (prestations en cas de maternité, durée légale du travail, congés, etc.).
Les multiples opérations et rafles menées contre des personnes soupçonnées d’être des étrangers en situation irrégulière auraient donné lieu à des brutalités et à des mauvais traitements. Ces opérations étaient généralement confiées à une unité de volontaires civils armés, l’Ikatan Relawan Rakyat Malaysia (RELA, Corps des volontaires du peuple). Des centaines de personnes ont été soumises à la flagellation, après avoir été reconnues coupables d’infraction à la législation sur l’immigration.
Les corps de cinq travailleurs étrangers, qui, selon certaines informations, avaient tenté d’échapper à une rafle du RELA, ont été retrouvés en février dans un lac de Selayang, près de Kuala-Lumpur. Selon des témoins, l’un des corps au moins portait des traces de mauvais traitements.

Liberté d’expression et d’association
La Loi relative à la presse et aux publications, qui autorisait les pouvoirs publics à refuser l’octroi de licences aux organes de presse, ou à révoquer ou suspendre ces autorisations, faisait toujours l’objet de critiques.
Deux rédacteurs ont été contraints de démissionner cette année, parce que leurs journaux avaient dénoncé des pratiques abusives de la part de la police. Quatre titres ont également été suspendus pour avoir publié des caricatures du prophète Mahomet, initialement parues en 2005 dans un journal danois et considérées comme offensantes.
Au mois de mai, le Parti Keadilan Rakyat (Parti de la justice du peuple), une formation d’opposition, a protesté contre le refus des pouvoirs publics de délivrer une autorisation de publication à son organe officiel.
Deux autres formations d’opposition, le Parti du Congrès dayak malaisien et le Parti Sosialis Malaysia (Parti socialiste de Malaisie), n’ont pas été autorisées à faire enregistrer officiellement leurs statuts aux termes de la Loi relative aux sociétés.

Peine de mort et châtiments corporels
Le Conseil du barreau malaisien a adopté en mars une résolution demandant l’abolition de la peine de mort et l’adoption d’un moratoire sur toutes les exécutions.
Les tribunaux ont néanmoins continué de prononcer des condamnations à mort en 2006. La peine capitale était notamment obligatoire pour certaines infractions à la législation sur les stupéfiants. Quatre personnes condamnées pour « trahison armée » ont été exécutées. Les autorités refusaient toujours de publier régulièrement des chiffres concernant la peine capitale.
Le Parlement a adopté en mai une Loi sur la privatisation de l’eau, qui prévoyait notamment la peine de mort pour certains cas graves d’empoisonnement de l’eau.
La bastonnade, châtiment cruel, inhumain et dégradant, continuait d’être appliquée.

Visites d’Amnesty International
Des délégués d’Amnesty International ont rencontré en mars des représentants du gouvernement puis, en juin, des militants de la société civile, afin d’examiner avec eux le déroulement de la réforme de la police.

Autres documents d’Amnesty International

 Malaisie. La campagne d’Amnesty International contre la torture et les mauvais traitements dans la « guerre contre le terrorisme » (ASA 28/003/2006).

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