RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE DÉMOCRATIQUE D’ÉTHIOPIE
CHEF DE L’ÉTAT : Girma Wolde-Giorgis
CHEF DU GOUVERNEMENT : Meles Zenawi
PEINE DE MORT : maintenue
POPULATION : 82,8 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 54,7 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 138 / 124 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 35,9 %
Contexte
De nouvelles lois ont restreint l’action des groupes de la société civile et étendu la portée des opérations de lutte contre le terrorisme. Dans un climat marqué par une crainte accrue des mesures de répression, des défenseurs des droits humains ont choisi de limiter leurs activités et des journalistes se sont autocensurés.
La quasi-totalité des soldats éthiopiens encore présents en Somalie s’étaient retirés fin janvier. Certaines informations ont toutefois fait état d’incursions transfrontalières ponctuelles durant une grande partie de l’année, en particulier dans le secteur de Beletweyne. Selon certaines sources, de hauts fonctionnaires éthiopiens ont joué, en septembre, un rôle de médiation à Hargeisa, au Somaliland, dans les négociations entre le président du Somaliland et des responsables de partis d’opposition. Ce pays, qui s’est autoproclamé indépendant, a frôlé de nouvelles explosions de violence en raison de la crise provoquée par les ajournements répétés des élections nationales (voir Somalie).
Le gouvernement éthiopien a accueilli sur son territoire plusieurs milliers de réfugiés érythréens, somaliens ou originaires d’autres pays de la Corne de l’Afrique, tandis qu’un nombre croissant de personnalités de l’opposition fuyaient l’Éthiopie. Parmi celles-ci figuraient des défenseurs des droits humains et des journalistes qui avaient subi des manœuvres de harcèlement ou d’intimidation de la part des autorités et qui craignaient de ce fait d’être arrêtés et placés en détention de façon imminente.
En septembre, plus de 9 500 prisonniers ont été remis en liberté par le gouvernement central et par les autorités des régions d’Amhara et d’Oromia, à la suite d’une mesure de grâce collective accordée à l’occasion de la nouvelle année éthiopienne.
Prisonniers d’opinion et autres prisonniers politiques
Plusieurs prisonniers d’opinion et un grand nombre de prisonniers politiques ont passé une nouvelle année en détention.
?Birtukan Mideksa, ancienne magistrate et dirigeante du parti Unité pour la démocratie et la justice (UDJ), se trouvait toujours en détention. Elle avait été de nouveau arrêtée en décembre 2008 et purgeait une peine de réclusion à perpétuité. À la suite des appels lancés par la communauté internationale en faveur d’une amélioration de ses conditions de vie, les autorités ont mis fin à son isolement cellulaire et, plus tard, elle a été placée avec d’autres détenues. Birtukan Mideksa recevait régulièrement des visites de sa famille mais son avocat n’a, semble-t-il, pu la rencontrer que de façon épisodique.
?Vingt-six anciens militaires et membres du parti politique Ginbot 7, dirigé par Berhanu Negga, ont été déclarés coupables de plusieurs chefs liés à la préparation d’une attaque contre le gouvernement au début de l’année. Parmi les personnes détenues depuis de nombreux mois dans le cadre de c aise santé. Selon certaines sources, 18 des accusés ont été torturés ou autrement maltraités lors leur arrestation par les forces de sécurité éthiopiennes, en mai.
?Le prisonnier d’opinion Fowsi Mohamed Ali, médiateur indépendant, se trouvait toujours en prison. Il avait été arrêté en septembre 2007 à Jijiga, semble-t-il pour qu’il ne puisse pas témoigner devant la mission d’enquête menée par les Nations unies en territoire somali.
?Bashir Makhtal, un ressortissant canadien, a été condamné le 3 août à la réclusion à perpétuité. Le 27 juillet, il avait été déclaré coupable de quatre infractions liées au terrorisme, notamment d’appartenance au Front de libération nationale de l’Ogaden (FLNO). Le gouvernement affirmait que son procès n’avait pas été inéquitable. Bashir Makhtal a toujours nié toutes les accusations portées contre lui. Le 4 décembre, la Cour suprême a examiné l’appel qu’il avait interjeté, mais a confirmé sa culpabilité et la peine prononcée en première instance. Son frère, Hassan Makhtal, qui a recouvré la liberté en octobre, est mort en novembre, semble-t-il de complications dues aux mauvais traitements subis en détention.
Liberté d’expression
Les autorités ont adopté différentes lois qui ont porté atteinte à la liberté d’expression. Les professionnels des médias ont été harcelés par les pouvoirs publics.
Loi sur les sociétés et associations caritatives
En janvier, le Parlement a adopté la Loi sur les sociétés et associations caritatives, qui impose des contrôles et des restrictions sévères aux organisations de la société civile, et notamment à celles œuvrant en faveur des droits humains. Si cette loi entrait en vigueur, les organisations internationales auraient besoin d’une autorisation spéciale pour défendre en Éthiopie certaines questions liées aux droits humains et à la démocratie. De la même manière, les groupes locaux dont plus de 10 % du financement provient de fonds étrangers se verraient interdire d’œuvrer en faveur des droits humains, alors que la plupart de ces organisations sont fortement tributaires de l’aide étrangère. Même des transgressions mineures des dispositions de ce texte pourraient entraîner de lourdes sanctions pénales, notamment des amendes et des peines d’emprisonnement. La loi a créé une Agence des sociétés et associations caritatives dotée de pouvoirs larges et discrétionnaires, dont la surveillance des organisations locales et la possibilité de s’immiscer dans leur gestion et leurs activités. Cette nouvelle législation, qui devait être mise en œuvre au début de janvier 2010, remettait profondément en cause la possibilité pour les organisations locales et internationales de surveiller les violations des droits humains en Éthiopie, de les recenser et de lutter contre elles. Certains groupes de défense des droits humains ont depuis réduit leurs actions. La réinscription des organisations locales auprès des autorités, telle qu’elle est prévue par la nouvelle loi, a débuté en octobre.
Loi relative à la lutte contre le terrorisme
En juillet, le Parlement a adopté la Loi relative à la lutte contre le terrorisme, qui a restreint la liberté d’expression et risque de limiter la liberté d’association, même pacifique, et le droit à un procès équitable – ce qui pourrait avoir de graves conséquences à l’approche des élections législatives de 2010. Aux termes de cette loi, les « actes de terrorisme » incluent notamment la dégradation de biens et la perturbation du service public, infractions passibles de 15 ans d’emprisonnement, voire de la peine capitale. La définition des « actes de terrorisme » est vague et pourrait englober des formes de contestation légitime.
?En novembre et en décembre, Addis Neger, importante maison d’édition, a été menacée de fermeture et plusieurs de ses journalistes menacés d’arrestation, semble-t-il au titre de cette nouvelle loi. Un certain nombre de journalistes de la socété avaient fui le pays à la fin de l’année.
Répression des médias
?Ibrahim Mohamed Ali, directeur de publication du journal Salafiyya, et Asrat Wedajo, ancien directeur de publication du journal disparu Seife Nebelbal, ont tous deux été condamnés à une année d’emprisonnement à la suite de la publication d’articles faisant état de violations des droits humains perpétrées en 2005. Les deux hommes auraient été jugés aux termes d’une loi sur la presse obsolète, remplacée depuis par la nouvelle loi sur les médias adoptée en 2008.
?Les propriétaires de plusieurs des principaux journaux du pays, contraints de cesser de paraître en 2005 lors des mesures de répression contre les médias, se sont vu menacer en novembre d’être convoqués devant la Cour suprême éthiopienne. Il leur était demandé de régler des amendes auxquelles ils avaient été condamnés en 2005, alors que ces sanctions avaient, semble-t-il, été annulées.
Répression de la dissidence
Le gouvernement a continué de réprimer la dissidence dans la région d’Oromia et a arrêté plusieurs centaines de personnes soupçonnées de soutenir le Front de libération oromo (FLO). On croyait savoir que nombre d’entre elles avaient été placées en détention au secret. De nombreuses personnes étaient détenues sans avoir été jugées. Bien souvent, les procédures judiciaires faisaient l’objet de nombreux ajournements. Les conditions de détention étaient généralement déplorables et certains détenus auraient subi des mauvais traitements. Les arrestations et les détentions collectives de dirigeants, militants et hommes d’affaires oromos se sont poursuivies de façon sporadique tout au long de l’année. Il semble qu’un grand nombre de ces arrestations et de ces placements en détention relevaient de mobiles politiques.
?Des partis d’opposition ont accusé le gouvernement d’arrêter leurs membres en perspective des élections de 2010, la majeure partie des détenus répertoriés étant des Oromos.
?Les forces gouvernementales se seraient également rendues coupables de nombreux viols, arrestations, et exécutions extrajudiciaires de sympathisants présumés du FLNO en territoire somali. Bien que les missions internationales d’établissement des faits aient permis d’atténuer, dans une certaine mesure, la crise humanitaire dans la région, les autorités éthiopiennes continuaient à imposer des restrictions à l’aide d’urgence dans certaines zones.
Peine de mort
Des condamnations à mort ont été prononcées mais aucune exécution n’a été signalée.
?Le 2 septembre, la Haute Cour fédérale a condamné six personnes à mort et 97 autres à des peines d’emprisonnement pour génocide, dans le cadre de violences survenues entre les habitants des régions de Benishangul Gumuz et d’Oromia au sujet d’un différend frontalier.
?Le 25 décembre, cinq hommes ont été condamnés à mort, dont quatre par contumace, et 32 hommes et une femme ont été condamnés à la réclusion à perpétuité pour des infractions liées à une tentative de coup d’État en avril et en mai.