Rapport Annuel 2016

Émirats arabes unis

Émirats arabes unis
Chef de l’État : Khalifa ben Zayed al Nahyan
Chef du gouvernement : Mohammed bin Rashed al Maktoum


Les autorités ont restreint de manière arbitraire la liberté d’expression, et arrêté et poursuivi en justice des détracteurs du gouvernement. Une nouvelle loi sur la lutte contre la discrimination et l’incitation à la haine a imposé des restrictions supplémentaires à la liberté d’expression et d’association. Les forces de sécurité ont soumis des dizaines de personnes à la disparition forcée. Les détenus étaient régulièrement torturés et maltraités. Des prisonniers d’opinion ont été maintenus en détention à l’issue de procès inéquitables. Des femmes ont fait l’objet de discriminations dans la législation et dans la pratique. Les travailleurs étrangers n’étaient pas suffisamment protégés par la loi et ils étaient exploités et maltraités. La peine de mort a été maintenue ; une exécution a eu lieu.

CONTEXTE

Les Émirats arabes unis ont rejoint, en mars, la coalition internationale dirigée par l’Arabie saoudite et engagée dans le conflit armé au Yémen (voir Yémen). En mai, les autorités ont refusé de laisser entrer dans le pays un représentant d’Amnesty International qui avait été invité à intervenir lors d’une conférence à Doubaï sur le secteur du bâtiment.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Les autorités ont utilisé des dispositions du Code pénal, de la loi de 2012 sur la cybercriminalité et de la loi antiterroriste de 2014 pour arrêter, poursuivre et emprisonner des personnes critiques à l’égard du gouvernement. En juillet, la promulgation d’une nouvelle loi relative à la lutte contre la discrimination et l’incitation à la haine a imposé des restrictions supplémentaires à la liberté d’expression et d’association. Cette loi définit le discours haineux comme « toute parole ou tout comportement de nature à inciter à la sédition, à des actes préjudiciables ou à la discrimination envers des individus ou des groupes ». Les contrevenants sont passibles d’une peine minimale de cinq ans d’emprisonnement. La loi confère également aux tribunaux le pouvoir d’ordonner la dissolution des associations considérées comme incitant à la haine, et d’emprisonner leurs fondateurs pour une durée minimale de 10 ans.
En février, des membres de la Sûreté de l’État ont arrêté trois sœurs – Alyaziyah, Asma et Mariam Khalifa al Suwaidi – qui avaient publié des déclarations sur Twitter à propos de leur frère, prisonnier d’opinion. Les trois femmes ont été libérées en mai, après avoir été victimes de disparition forcée pendant trois mois. Le tribunal pénal de Doubaï a condamné en mai un Indien à un an d’emprisonnement suivi de son expulsion. Cet homme avait été déclaré coupable de blasphème à la suite d’un commentaire sur Facebook jugé « offensant » pour l’islam et le prophète Mahomet. Toujours en mai, la Chambre de sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale, qui juge les affaires liées à la sécurité nationale, a condamné Ahmed Abdulla al Wadi à 10 ans d’emprisonnement après l’avoir déclaré coupable de « création et gestion d’un compte sur un réseau social insultant envers les dirigeants des Émirats arabes unis et les institutions du pays ». Cette accusation était liée à des commentaires que cet homme avait publiés sur Twitter.
En juin, la même juridiction a condamné Nasser al Junaibi à trois ans de prison pour avoir « insulté la famille royale » et « répandu des rumeurs et des informations [ayant] nui au pays ». Cette accusation était en partie fondée sur des commentaires que cet homme avait publiés sur Twitter et dans lesquels il dénonçait comme une « parodie de justice » le procès collectif de détracteurs du gouvernement et de partisans de la réforme, communément appelé le procès des « 94 Émiriens ». Bon nombre des condamnés ont été maintenus en détention, dont l’avocat défenseur des droits humains Mohammad al Roken. Amnesty International les considérait tous comme des prisonniers d’opinion.

DISPARITIONS FORCÉES

Les forces de la Sûreté de l’État ont arrêté plusieurs dizaines de personnes, dont des étrangers et des personnes qui critiquaient le gouvernement de manière pacifique, et les ont soumises à la disparition forcée. Ces personnes ont été détenues sans contact avec le monde extérieur, parfois pendant plus d’un an, dans des lieux tenus secrets. En août, Nasser bin Ghaith, universitaire, économiste et ancien prisonnier d’opinion, a été victime de disparition forcée aux mains d’agents de la Sûreté de l’État après qu’il eut critiqué des « dictateurs arabes » sur Twitter. On ignorait où il était détenu à la fin de l’année.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Certaines des personnes qui avaient été victimes de disparition forcée ont affirmé que des agents des services de sécurité les avaient torturées et autrement maltraitées pendant leur détention. Les autorités ont nié avoir eu recours à la torture et elles n’ont pas mené d’enquêtes indépendantes, ignorant la recommandation émise en mai par la rapporteuse spéciale des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats, qui avait demandé au gouvernement de désigner une commission d’experts indépendante chargée d’enquêter sur les allégations de torture.

PROCÈS INÉQUITABLES

Pour poursuivre en justice plusieurs dizaines de personnes devant la Chambre de la sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale, les autorités ont utilisé des dispositions du Code pénal, de la loi sur la cybercriminalité et de la loi antiterroriste formulées de manière vague et excessivement générale ; les décisions de cette instance ne sont pas susceptibles d’appel, ce qui est contraire aux normes internationales d’équité. Une accusée condamnée à mort par la Cour a été exécutée deux semaines plus tard (voir plus loin). Un procès collectif de 41 personnes s’est déroulé en août devant la Chambre de la sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale. Les chefs d’accusation incluaient le « complot en vue de renverser le gouvernement pour le remplacer par un "califat" similaire à l’État islamique ». Parmi les accusés figuraient au moins 21 personnes qui avaient été soumises par la Sûreté de l’État à une disparition forcée de 20 mois depuis leur interpellation, en novembre et en décembre 2013.

DROITS DES FEMMES

Les femmes ont continué de subir des discriminations dans la législation et dans la pratique. En juillet, un tribunal a condamné une femme de 18 ans à neuf mois d’emprisonnement pour avoir eu des relations illicites avec des hommes. Âgée de 16 ans au moment de son arrestation, elle avait bénéficié d’une liberté sous caution.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

En février, deux femmes transgenres, toutes deux étrangères, ont été inculpées pour s’être travesties en femmes et avoir pénétré dans un lieu réservé aux femmes. Elles ont été incarcérées jusqu’au versement d’une amende chacune, puis expulsées.

DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS

Cette année encore, les travailleurs étrangers, hommes et femmes, ont été exploités et maltraités, malgré les dispositions protectrices énoncées dans le Code du travail de 1980 et dans des décrets promulgués par la suite. Le système de parrainage (kafala) les exposait au risque d’exploitation de la part de leurs employeurs.
En avril, un rapport d’enquête commandé par un organisme gouvernemental émirien a conclu que des milliers d’ouvriers du bâtiment employés sur le campus de l’université de New York à Abou Dhabi avaient été contraints de payer des frais de recrutement exorbitants et s’étaient vu confisquer leur passeport, malgré l’existence de directives universitaires visant à leur garantir des conditions de vie et de travail convenables. Les employés de maison, en grande majorité des femmes, qui ne bénéficiaient toujours pas des protections accordées à d’autres travailleurs étrangers, sont demeurés exposés aux violences physiques et à l’interdiction de quitter leur lieu de travail, entre autres atteintes à leurs droits. Les travailleurs qui participaient à des grèves ou à d’autres formes d’action collective pouvaient être arrêtés et expulsés.
L’intolérance des autorités envers les critiques formulées contre leur bilan concernant les travailleurs migrants a été mise en lumière en mars, lorsqu’elles ont refusé au professeur Andrew Ross, expert sur les questions liées aux droits des travailleurs à l’université de New York, le droit d’entrer sur le territoire émirien.

PEINE DE MORT

La peine de mort a été maintenue notamment pour meurtre, et les tribunaux ont continué de prononcer des sentences capitales. Le 29 juin, la Chambre de la sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale a condamné à mort Alaa al Hashemi pour des infractions liées au terrorisme. Cette femme, qui n’avait pas été autorisée à interjeter appel, a été exécutée le 13 juillet.

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