Les autorités ont eu recours à des arrestations arbitraires massives pour réprimer des manifestations et la dissidence ; des journalistes, des défenseurs des droits humains et des manifestants ont été arrêtés. Des restrictions ont été imposées aux activités des organisations de défense des droits humains. Plusieurs centaines de personnes arrêtées par l’Agence de sécurité nationale (ASN) ont été soumises à une disparition forcée. Des personnes détenues par des membres de l’ASN et d’autres branches des forces de sécurité ont été torturées et maltraitées. Les forces de sécurité ont eu recours à une force meurtrière excessive au cours d’opérations de maintien de l’ordre et lors de faits qui s’apparentaient à des exécutions extrajudiciaires. Cette année encore, des procès collectifs iniques se sont déroulés devant des tribunaux civils et militaires. Les autorités ne menaient pas d’enquêtes sérieuses sur les atteintes aux droits humains, et les responsables de tels agissements n’étaient pas traduits en justice. Les femmes étaient toujours en butte à des violences sexuelles et liées au genre. Le gouvernement a continué d’imposer des restrictions aux minorités religieuses, et il a poursuivi des personnes pour diffamation de la religion. Un certain nombre de personnes ont été emprisonnées pour « débauche » en raison de leur orientation sexuelle présumée. Plusieurs centaines de réfugiés, demandeurs d’asile et migrants ont été arrêtés alors qu’ils tentaient de traverser la Méditerranée. Cette année encore, les tribunaux ont prononcé des condamnations à mort ; des exécutions ont eu lieu.
Contexte
Réunie le 10 janvier, la Chambre des représentants nouvellement élue a disposé de 15 jours pour examiner et voter les décrets-lois pris par le président Al Sissi en l’absence de Parlement. Elle a approuvé presque tous ces textes législatifs, y compris la Loi de lutte contre le terrorisme (Loi n° 94 de 2015), qui réduisait les garanties d’équité des procès et inscrivait des pouvoirs d’exception dans le droit interne.
L’Égypte est restée membre de la coalition militaire menée par l’Arabie saoudite et engagée dans le conflit armé au Yémen (voir Yémen). Le président Al Sissi a approuvé, en janvier, une loi autorisant les forces armées à intervenir en dehors du territoire national pendant une année supplémentaire.
Les relations entre l’Égypte et l’Italie se sont dégradées après la mort dans des circonstances non élucidées de Giulio Regeni, un doctorant italien qui effectuait des recherches sur les syndicats égyptiens. Lorsque le corps de cet étudiant a été retrouvé le 3 février, un policier a affirmé aux médias égyptiens qu’il était mort dans un accident de la circulation, mais des autopsies ont conclu qu’il avait été torturé. Le 24 mars, 15 jours après que le Parlement européen eut condamné fermement ce crime, le ministre égyptien de l’Intérieur a annoncé que les forces de sécurité avaient tué des membres d’une bande criminelle responsable de la mort de Giulio Regeni. L’Italie a rappelé son ambassadeur en Égypte le 8 avril. Le procureur général a déclaré, le 9 septembre, que les forces de sécurité avaient brièvement enquêté sur cet étudiant avant sa disparition et son meurtre.
Plusieurs États continuaient de fournir à l’Égypte des armes ainsi que du matériel militaire et de sécurité, notamment des avions de combat et des véhicules blindés.
Selon les chiffres disponibles auprès de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), les autorités ont maintenu fermé le point de passage de Rafah à la frontière avec la bande de Gaza durant presque toute l’année – 24 jours d’ouverture seulement.
Lutte contre le terrorisme et sécurité
Les forces armées ont poursuivi leurs opérations contre des groupes armés actifs dans le nord du Sinaï. Elles ont utilisé des véhicules blindés, des tirs d’artillerie et des frappes aériennes. Le ministre de la Défense a affirmé que plusieurs dizaines de « terroristes » avaient été tués dans chacune de ces opérations. L’état d’urgence restait en vigueur dans la plus grande partie de cette région, qui était de fait interdite aux observateurs indépendants des droits humains et aux journalistes.
Des groupes armés ont régulièrement lancé des attaques meurtrières contre les forces de sécurité, des agents de l’État, des magistrats et d’autres civils. La plupart de ces attaques ont eu lieu dans le nord du Sinaï ; des attentats à l’explosif et des fusillades imputables à des groupes armés ont toutefois été signalés dans d’autres régions du pays. Bon nombre de ces attaques ont été revendiquées par le groupe armé se faisant appeler Province du Sinaï, qui a fait allégeance au groupe armé État islamique (EI). Province du Sinaï a annoncé au cours de l’année avoir exécuté plusieurs hommes qu’il accusait d’espionnage pour le compte des forces de sécurité.
Liberté d’expression, d’association et de réunion
Les autorités imposaient, dans la législation et dans la pratique, des restrictions sévères à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique.
Des journalistes et des militants, entre autres, ont été arrêtés, inculpés et incarcérés pour incitation à manifester ou participation à des mouvements de protestation, diffusion de « fausses rumeurs », diffamation d’agents de l’État et atteinte à la moralité.
Ouvert en décembre 2015, le procès collectif du photographe de presse Mahmoud Abou Zeid, connu sous le nom de Shawkan, et de plus de 730 autres personnes, s’est poursuivi. Il se déroulait de manière inéquitable. Les chefs d’accusation retenus contre Shawkan, arrêté pour avoir couvert un sit-in dans la capitale, Le Caire, le 14 août 2013, étaient fabriqués de toutes pièces. Il était notamment poursuivi pour « appartenance à une bande criminelle » et meurtre. De nombreux accusés étaient jugés par contumace.
Le 1er mai, les forces de sécurité ont fait irruption dans les locaux du Syndicat de la presse au Caire et arrêté Amro Badr et Mahmoud al Saqqa, des journalistes accusés notamment d’incitation à manifester et de diffusion de « fausses rumeurs ». Le Syndicat de la presse a condamné la descente de police et les arrestations. Amro Badr et Mahmoud al Saqqa ont été remis en liberté sous caution respectivement le 28 août et le 1er octobre. Le 19 novembre, Yahia Galash, président du Syndicat de la presse, ainsi que Khaled Elbashy et Gamal Abd el Reheem, membres du conseil d’administration, ont été condamnés à deux ans d’emprisonnement pour « avoir abrité des suspects », entre autres chefs. Le tribunal avait fixé un montant de 10 000 livres égyptiennes (630 dollars des États-Unis) pour assortir ces peines du sursis.
Des juges d’instruction ont donné une nouvelle dimension à une information judiciaire sur les activités d’ONG et leur financement. Ils ont interrogé des membres du personnel de ces ONG, interdit à 12 défenseurs des droits humains de quitter le pays et gelé les avoirs de sept militants et six organisations. Les autorités ont ordonné la fermeture d’une organisation de défense des droits humains. Le Parlement a approuvé un texte visant à remplacer la Loi n° 84 de 2002, qui restreindrait sérieusement les activités des ONG, leur droit d’être enregistrées officiellement et leur accès à des financements étrangers. La proposition de loi n’avait pas été définitivement adoptée à la fin de l’année.
Le 17 février, des agents du ministère de la Santé ont notifié au Centre Nadeem de réadaptation des victimes de violence un ordre mettant fin à ses activités. L’organisation a continué de fonctionner et a formé un recours en justice contre la décision des autorités, mais ses avoirs ont été brièvement gelés en novembre.
Le 17 septembre, un tribunal du Caire a confirmé le gel des avoirs de cinq défenseurs des droits humains et de trois organisations (l’Institut du Caire pour l’étude des droits humains, le Centre Hisham Moubarak pour le droit et le Centre égyptien pour le droit à l’éducation), qui avait été ordonné par des juges enquêtant sur leurs activités et leurs sources de financement.
Les 15 et 25 avril, au Caire, les forces de sécurité ont utilisé du gaz lacrymogène pour disperser des manifestants pacifiques et arrêté environ 1 300 personnes pour infraction à la Loi relative aux manifestations (Loi n° 107 de 2013) et à la Loi sur les rassemblements (Loi n° 10 de 1914). Le gouvernement a annoncé le 8 juin qu’il avait l’intention de modifier la Loi relative aux manifestations ; aucun projet n’avait été soumis au Parlement à la fin de l’année.
La Cour suprême constitutionnelle a conclu le 3 décembre à l’inconstitutionnalité d’un article de la Loi relative aux manifestations qui conférait au ministre de l’Intérieur le pouvoir d’interdire de manière arbitraire les protestations.
Recours excessif à la force
Cette année encore, des policiers ont fait usage d’une force meurtrière excessive à la suite d’altercations verbales. Onze personnes au moins ont été tuées après des tirs, et plus de 40 autres ont été blessées. Deux policiers ont été condamnés à 25 ans d’emprisonnement dans des affaires distinctes de tirs meurtriers, qui avaient entraîné des protestations dans des quartiers.
Le ministère de l’Intérieur a annoncé à plusieurs reprises que les forces de sécurité avaient abattu des suspects au cours de descentes dans des habitations ; parmi les victimes figuraient des membres des Frères musulmans et des membres présumés de groupes armés. Aucun policier n’a fait l’objet d’une enquête officielle, ce qui laissait craindre que les forces de sécurité aient fait un usage excessif de la force ou, dans certains cas, se soient rendues coupables d’exécutions extrajudiciaires.
Arrestations et détentions arbitraires
Cette année encore, des opposants et des détracteurs du gouvernement ont été arrêtés et détenus de manière arbitraire pour incitation à manifester, actes de « terrorisme » et appartenance à des groupes interdits, comme les Frères musulmans ou le Mouvement des jeunes du 6 avril. Plusieurs défenseurs des droits humains ont également été détenus arbitrairement.
Selon les estimations d’une coalition d’avocats égyptiens spécialistes des droits humains, les forces de sécurité ont arrêté quelque 1 300 personnes dans tout le pays entre la mi-avril et le début de mai, lors d’opérations visant à étouffer des mouvements de protestation. Si la plupart de ces personnes ont été relâchées, certaines ont été poursuivies par la suite (voir Procès inéquitables).
Plus de 1 400 personnes ont été maintenues en détention provisoire au-delà de la durée légale de deux ans prévue pour la comparution en procès.
Après avoir passé plus de deux ans en détention sans procès, Mahmoud Mohamed Ahmed Hussein a été libéré sous caution le 25 mars sur ordre d’un tribunal. Il avait été arrêté parce qu’il portait un tee-shirt sur lequel figurait le slogan « Nation sans torture », ainsi qu’une écharpe portant le logo de la « révolution du 25 Janvier ».
Malek Adly, un responsable du Centre égyptien des droits économiques et sociaux, a été arrêté le 5 mai par les forces de sécurité et accusé de diffusion de « fausses rumeurs » et de tentative de renverser le gouvernement. Avec d’autres avocats, il avait intenté une action en justice pour contester la décision du gouvernement de céder les îles de Tiran et de Sanafir à l’Arabie saoudite. Un tribunal a ordonné sa remise en liberté le 28 août.
Ahmed Abdallah, président de la Commission égyptienne des droits et des libertés, et Mina Thabet, directeur de son département des minorités, ont été respectivement arrêtés le 25 avril et le 19 mai. Cette organisation avait recueilli des informations sur des disparitions forcées en Égypte. Les deux hommes ont été placés en détention sans être inculpés ; ils ont été libérés sous caution respectivement le 18 juin et le 10 septembre.
Disparitions forcées
L’ASN a interpellé des centaines de personnes sans mandat judiciaire et les a maintenues au secret pendant de longues périodes, hors du contrôle d’une autorité judiciaire et en les privant de tout contact avec leur famille ou un avocat. Les autorités continuaient à nier l’existence de cette pratique. Les forces de sécurité s’en prenaient aux sympathisants présumés des Frères musulmans et à des militants ayant d’autres affiliations politiques. Certaines disparitions forcées étaient par ailleurs imputables à des agents du Renseignement militaire.
Aser Mohamed, 14 ans, a été arrêté le 12 janvier par des agents de l’ASN, qui l’ont soumis à une disparition forcée pendant 34 jours. Cet adolescent a déclaré qu’on l’avait torturé pour le contraindre à « avouer » des faits liés au « terrorisme » et qu’un procureur l’avait menacé de nouveaux sévices s’il rétractait ses « aveux ». Son procès n’était pas terminé à la fin de l’année.
Torture et autres mauvais traitements
Des personnes ont été battues et maltraitées par des membres des forces de sécurité au moment de leur arrestation. Des agents de l’ASN chargés des interrogatoires ont torturé et maltraité de nombreuses personnes soumises à une disparition forcée, dans le but de leur arracher des « aveux » utilisés contre elles par la suite lors de leur procès. Parmi les méthodes signalées figuraient les passages à tabac, l’administration de décharges électriques et le maintien forcé dans des positions douloureuses. Des groupes égyptiens de défense des droits humains ont recensé des dizaines de cas de mort en détention à la suite d’actes de torture et d’autres mauvais traitements, ainsi qu’en raison du manque d’accès à des soins médicaux.
Le 20 septembre, neuf policiers ont été condamnés à des peines de trois ans d’emprisonnement pour avoir brutalisé des médecins dans un hôpital du quartier de Matariya, au Caire, en janvier. Le tribunal les a remis en liberté sous caution en attendant qu’il soit statué sur leur appel.
Procès inéquitables
Les tribunaux pénaux continuaient de conduire des procès collectifs inéquitables contre des dizaines, voire des centaines, de personnes accusées d’avoir participé à des manifestations et commis des violences à caractère politique à la suite du renversement du président Mohamed Morsi en juillet 2013.
Dans certains procès où les accusés avaient été soumis à une disparition forcée, les tribunaux ont retenu à titre de preuve à charge des « aveux » obtenus sous la torture.
Aux côtés des juridictions « de circuit » spécialisées dans les affaires de terrorisme, les tribunaux militaires ont jugé des centaines de civils dans le cadre de procès iniques, et notamment de procès collectifs. En août, les autorités ont prolongé de cinq ans l’application d’une loi qui étend la compétence de la justice militaire aux crimes commis contre des « équipements publics ».
Plus de 200 personnes ont été traduites en justice pour avoir participé à des manifestations contre la décision du gouvernement de céder les îles de Tiran et de Sanafir à l’Arabie saoudite ; beaucoup ont été condamnées à des peines comprises entre deux et cinq ans d’emprisonnement assorties d’amendes élevées. La plupart des peines d’emprisonnement ont été annulées par la suite en appel.
Plus de 490 personnes, dont un ressortissant irlandais, Ibrahim Halawa, étaient jugées dans le cadre d’un procès collectif qui a débuté en 2014 pour participation aux violences qui avaient éclaté pendant une manifestation en août 2013. Amnesty International considère que les charges retenues contre Ibrahim Halawa sont forgées de toutes pièces.
Le 18 juin, un tribunal a condamné le président déchu Mohamed Morsi à 25 ans de réclusion pour avoir dirigé un « groupe interdit », et à 15 ans supplémentaires pour vol d’informations classées secrètes. Six autres hommes, dont trois journalistes jugés en leur absence, ont été condamnés à mort dans le cadre de cette affaire.
Impunité
Les autorités n’ont pas mené d’enquête sérieuse sur la plupart des allégations de violations des droits humains, notamment sur les cas de torture et d’autres formes de mauvais traitements, de disparition forcée, de mort en détention ainsi que sur l’utilisation généralisée d’une force excessive par les forces de sécurité depuis 2011 ; les responsables présumés de tels agissements n’ont pas été traduits en justice.
Les magistrats du parquet refusaient régulièrement d’ouvrir des enquêtes sur les plaintes pour torture et mauvais traitements formulées par des détenus, ainsi que sur les éléments montrant que les forces de sécurité avaient falsifié la date d’arrestation, dans les cas de disparition forcée.
Le 15 août, le président Al Sissi a promulgué des modifications de la Loi relative aux pouvoirs de la police qui interdisent aux membres des forces de sécurité de « maltraiter les citoyens », de faire des déclarations aux médias sans autorisation et de se syndiquer.
Droits des femmes
Les femmes n’étaient toujours pas suffisamment protégées contre les violences sexuelles et liées au genre ; dans la loi et dans la pratique, elles faisaient en outre l’objet de discriminations liées au genre, particulièrement aux termes des dispositions du Code de statut personnel relatives au divorce.
Une jeune fille de 17 ans est morte le 29 mai, semble-t-il des suites d’une hémorragie, après avoir subi des mutilations génitales féminines dans un hôpital privé du gouvernorat de Suez. Quatre personnes – la mère de la jeune fille et des membres du personnel médical – ont été déférées en justice pour avoir causé une blessure ayant entraîné la mort et pratiqué des mutilations génitales féminines.
Le 25 septembre, le président Al Sissi a signé une loi qui augmente les peines d’emprisonnement pour quiconque pratique des mutilations génitales féminines. Jusque-là comprises entre trois mois et deux ans, ces peines peuvent désormais aller de cinq à 15 ans de détention. La loi punit également ceux qui forcent les filles à subir des mutilations génitales féminines.
Discrimination – minorités religieuses
Les minorités religieuses, notamment les chrétiens coptes, les musulmans chiites et les baha’is, continuaient de faire l’objet de restrictions discriminatoires dans la législation et dans la pratique, et n’étaient toujours pas suffisamment protégées contre la violence.
Les chrétiens coptes ont été victimes d’attaques répétées. Un attentat à l’explosif perpétré le 11 décembre contre une église du Caire a tué 27 personnes. L’EI a revendiqué cette attaque, tandis que le gouvernement l’imputait à une « cellule terroriste » liée aux Frères musulmans.
Signée par le président Al Sissi le 28 septembre, une nouvelle loi réglementant les églises restreignait de manière arbitraire leur construction, leur rénovation et leur expansion.
Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexuées
Cette année encore, des personnes ont été arrêtées, détenues et jugées pour « débauche » aux termes de la Loi n° 10 de 1961, en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre, réelles ou présumées.
Droits des réfugiés et des migrants
Selon les chiffres publiés en septembre par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les forces de sécurité ont arrêté plus de 4 600 réfugiés, demandeurs d’asile et migrants qui tentaient de traverser la Méditerranée pour atteindre l’Europe.
Le 8 novembre, le président Al Sissi a promulgué une loi rendant passible quiconque transporte illégalement des personnes d’un pays à un autre d’une amende de 500 000 livres égyptiennes (32 130 dollars) et d’une peine de 25 ans d’emprisonnement. Ce texte, qui n’établit pas de distinction entre l’immigration clandestine et la traite d’êtres humains, exempte les victimes de la traite et les migrants illégaux de peines d’emprisonnement et d’amendes, mais prévoit que les autorités doivent les renvoyer dans leur pays d’origine, éventuellement contre leur gré. Il ne précise pas comment les autorités doivent accueillir les victimes de la traite ainsi que les réfugiés et les demandeurs d’asile, et n’indique pas s’ils seront protégés contre le renvoi dans un pays où ils sont menacés.
Un bateau qui transportait des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants irréguliers a chaviré le 22 septembre au large des côtes égyptiennes ; plus de 200 personnes ont trouvé la mort. Les forces de sécurité ont arrêté les membres de l’équipage.
Droits des travailleurs
Les autorités ne reconnaissaient pas les syndicats indépendants fonctionnant en dehors de la Fédération syndicale égyptienne contrôlée par l’État. Cette situation transparaissait dans un projet de loi renforçant le contrôle de l’État sur les syndicats.
Vingt-six civils qui travaillaient pour les chantiers navals d’Alexandrie et s’étaient mis en grève ont été traduits devant un tribunal militaire appliquant une procédure inéquitable.
Des organisations égyptiennes de défense des droits humains ont fait observer à plusieurs reprises que le gouvernement ne prenait pas de mesures suffisantes pour faire en sorte que sa politique économique, notamment la réforme des subventions et la dévaluation de la monnaie, ainsi que les modifications envisagées de la Loi sur la fonction publique, n’aient pas de conséquences négatives pour les personnes à faibles revenus et celles vivant dans la pauvreté.
Peine de mort
Cette année encore, les tribunaux ont prononcé des condamnations à mort pour meurtre, viol, trafic de drogue, vol à main armée et « terrorisme ». Des personnes condamnées pour meurtre ou pour d’autres crimes ont été exécutées.
La Cour de cassation a annulé des sentences capitales, notamment une condamnation à mort prononcée contre le président déchu Mohamed Morsi. Elle a ordonné la tenue d’un nouveau procès dans plusieurs affaires, dont au moins un cas de procès collectif inique lié aux troubles de 2013.
Des tribunaux militaires ont condamné à mort des civils à l’issue de procès manifestement inéquitables et entachés d’irrégularités telles que des disparitions forcées, des actes de torture et d’autres mauvais traitements.
Le 29 mai, un tribunal militaire a condamné à mort six hommes et prononcé des peines de 15 à 25 ans d’emprisonnement contre 12 autres, pour appartenance aux Frères musulmans, obtention d’informations classées secrètes et détention d’armes à feu et d’explosifs. Le tribunal n’a pas tenu compte des plaintes pour torture et mauvais traitements formulées par les accusés – tous des civils –, ni des éléments démontrant que les forces de sécurité les avaient soumis à une disparition forcée après leur arrestation, en mai et en juin 2015. Le tribunal a également condamné par contumace huit autres hommes : deux à la peine capitale et six à des peines d’emprisonnement. Les condamnés ont interjeté appel devant une juridiction militaire supérieure.