Rapport annuel 2018

Moldavie

République de Moldova
Chef de l’État : Igor Dodon
Chef du gouvernement : Pavel Filip

Le gouvernement a retiré un projet de loi sur les ONG qui prévoyait des restrictions abusives pour les organisations recevant des fonds étrangers. Au terme d’un procès inéquitable, neuf militants ont été condamnés à des peines d’emprisonnement avec sursis pour tentative d’organisation de troubles massifs en 2015. En mai, la marche des fiertés LGBTI qui se déroulait dans la capitale, Chișinău, a été interrompue par la police. Cette dernière a invoqué des craintes pour la sécurité, tandis que le président, Igor Dodon, a tenu des propos homophobes. Les dépenses publiques consacrées à la santé, à l’éducation et à la protection sociale ont encore diminué ; la discrimination à l’égard des Roms a persisté.

CONTEXTE

En juillet, le Parlement a adopté des modifications controversées du Code électoral, malgré des manifestations publiques et une condamnation internationale. Ces changements ont globalement été perçus comme favorables aux deux principaux partis représentés au Parlement, le Parti démocrate de Moldavie, au pouvoir, et le Parti socialiste de Moldavie, dans l’opposition. Le 19 juin, la Commission de Venise du Conseil de l’Europe a rendu un avis très critique sur ces modifications. La plupart des grands médias restaient dans les faits contrôlés par le Parti démocrate de Moldavie, auquel ils étaient tout acquis.

LIBERTÉ D’ASSOCIATION

Un projet de loi sur les ONG a été approuvé par un groupe de travail comprenant des représentants du ministère de la Justice, du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme et de plusieurs ONG. Le texte a été largement salué par la société civile. En juillet cependant, le ministère de la Justice a introduit inopinément trois autres articles sans avoir consulté le groupe de travail. En vertu de ces articles, les ONG participant à des « activités politiques », dont la définition est très vague, auraient pour obligations, entre autres, de publier des rapports financiers et de divulguer l’origine et l’utilisation de leurs fonds. Le non-respect de ces dispositions les exposerait à de lourdes sanctions, notamment de fortes amendes, une exclusion du dispositif financier géré par l’État qui facilite et encourage les dons des contribuables aux ONG, et un risque de fermeture. Les amendements se sont heurtés à une forte opposition de la société civile et des organisations internationales, qui les considéraient comme des restrictions abusives visant les ONG recevant des fonds étrangers. Les détracteurs craignaient qu’ils n’aient pour effet de stigmatiser les défenseurs des droits humains et la société civile, en particulier ceux et celles qui critiquent les autorités. En septembre, le gouvernement a retiré le projet de loi.

PROCÈS INÉQUITABLES

En juin, Grigore Petrenco, ancien dirigeant du parti politique « Notre patrie, la Moldavie », et huit autres militants politiques ont été condamnés pour tentative d’organisation de troubles massifs le 6 septembre 2015. Le tribunal a prononcé des peines d’emprisonnement avec sursis, assorties d’une interdiction d’assister à des événements publics. Les peines allaient de trois ans à quatre ans et demi. Le jour de l’infraction présumée, les neuf hommes avaient essayé de s’introduire de force dans un bâtiment officiel pendant un rassemblement pacifique. Leur procès a connu de multiples retards et a été entaché de violations de la procédure.
Les avocats de Grigore Petrenco, Ana Ursachi et Eduard Rudenco, qui défendent également d’autres clients importants dans des dossiers politiques sensibles, ont continué de faire l’objet de campagnes de diffamation dans les médias progouvernementaux et ont dit être harcelés par les autorités en raison de leurs activités professionnelles.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

De nouvelles informations ont fait état de torture et d’autres mauvais traitements dans les lieux de détention et dans le système pénal.
La nuit du 26 août, Andrei Braguta, un automobiliste arrêté pour excès de vitesse, est mort en garde à vue. Les autorités ont déclaré qu’il était décédé d’une pneumonie, mais ont admis ultérieurement qu’il avait été roué de coups par deux codétenus. Trois policiers qui étaient de garde cette nuit-là et les deux codétenus ont été arrêtés comme suspects dans cette affaire. L’un des codétenus a affirmé qu’Andrei Braguta avait déjà été violemment battu lors de son placement dans la cellule ; il a clamé son innocence et celle du second codétenu. L’enquête judiciaire se poursuivait à la fin de l’année.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

La police a interrompu la marche des fiertés le 21 mai après que les manifestants eurent parcouru quelques centaines de mètres seulement. Elle a déclaré qu’elle ne serait pas en capacité de garantir leur sécurité en cas d’agression violente de la part de contremanifestants.
Le président a critiqué publiquement la communauté LGBTI, décrivant la marche des fiertés comme contraire aux « valeurs traditionnelles » du pays. Il a participé à une manifestation parallèle intitulée « Festival de la famille traditionnelle ».

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Le troisième rapport périodique de la Moldavie sur la mise en oeuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a été examiné par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU en septembre. Le Comité s’est particulièrement inquiété, entre autres, de la baisse continue du taux de dépenses publiques consacrées à la santé, à l’éducation et à la protection sociale, ainsi que de la discrimination et de la marginalisation persistantes des Roms. Il a qualifié la situation des Roms de « problème criant » et a estimé que « l’échec à de nombreux égards » du Plan d’action national 2011-2015 en faveur des Roms constituait « un grave motif de préoccupation ».

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