Une enquête demandée par le gouvernement sur les mauvais traitements infligés à des personnes demandeuses d’asile par des agent·e·s de sociétés privées de sécurité dans les centres fédéraux d’asile a conclu qu’il y avait eu, dans un certain nombre de cas, un recours excessif à la force. Des recommandations ont été faites pour éviter que de tels faits ne se reproduisent. Le Parlement a resserré les contrôles sur les exportations d’armes à destination de pays en conflit. Des militant·e·s qui avaient eu recours à la désobéissance civile comme moyen de contestation ont été condamnés à des peines d’emprisonnement. À l’issue d’une votation populaire, les couples de même sexe ont obtenu le droit à l’égalité devant le mariage. Deux autres votations ont en revanche confirmé plusieurs lois draconiennes de lutte contre le terrorisme et l’interdiction du voile intégral dans les lieux publics.
Contexte
Après 20 années de mobilisation de la société civile, le Parlement a adopté en septembre le projet du gouvernement portant création d’une institution nationale de protection des droits humains. Le statut exact et les modalités du financement de cette institution, censée démarrer ses activités en 2023, restaient à préciser.
Droits des personnes réfugiées ou migrantes
Les travaux de recherche d’Amnesty International ont mis en lumière les mauvais traitements infligés par des agent·e·s de sociétés de sécurité privées à des personnes hébergées dans des centres fédéraux d’asile. Ils ont également permis d’identifier les problèmes systémiques affectant l’administration de ces centres1. Quatorze demandeurs et demandeuses d’asile, dont deux enfants, se sont plaints de mauvais traitements, tels que des coups et la privation de traitements médicaux. Le gouvernement a demandé l’ouverture de deux enquêtes, une interne et l’autre externe, qui ont conclu à un usage disproportionné de la force dans au moins trois des sept cas examinés. L’enquête externe a conseillé de revoir le recours à des services de sécurité privés, sans toutefois recommander clairement la protection des lanceurs et lanceuses d’alerte ni la création d’un mécanisme indépendant destiné à recueillir les plaintes.
Droits des enfants
Le Comité des droits de l’enfant [ONU] a estimé que la Suisse, en expulsant une mère et son fils vers la Bulgarie, avait violé 10 articles différents de la Convention relative aux droits de l’enfant3.
Transferts d’armes irresponsables
Le Parlement a adopté en septembre une loi réglementant les exportations d’armes. Celle-ci interdisait les transferts vers les États impliqués dans un conflit armé interne ou se livrant à des violations des droits humains graves et systématiques.
Liberté de réunion
Le 1er avril, la police a évacué un camp de manifestant·e·s près d’Éclépens. Sur les 150 militant·e·s écologistes arrêtés, 43 ont fait l’objet de poursuites. La condamnation à des peines d’emprisonnement de certains manifestant·e·s qui s’étaient livrés à des actes de désobéissance civile constituait une restriction abusive des droits de ces personnes à la liberté d’expression, d’opinion et de réunion pacifique4.
Discrimination
Les femmes
Le Parlement a poursuivi ses travaux de révision des dispositions du Code pénal concernant le viol. La procédure de consultation publique a montré qu’il existait une mobilisation sans précédent en faveur d’une nouvelle loi sur le viol fondée sur la notion de consentement.
L’interdiction du voile intégral a été approuvée lors d’une votation populaire en mars, à une courte majorité, en dépit des inquiétudes quant au fait que cette mesure était discriminatoire à l’égard d’une communauté religieuse particulière et bafouait les droits des femmes et la liberté d’’expression et de religion.
Les lesbiennes, les gays et les personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes
Lors d’une votation populaire organisée en septembre, une large majorité de la population a décidé d’accorder aux couples de même sexe le droit au mariage en toute égalité, y compris en permettant aux couples de lesbiennes d’avoir accès au don de sperme5.
Responsabilité des entreprises
Après le rejet par une majorité de cantons, en 2020, de l’Initiative pour des multinationales responsables, le Parlement a adopté un contre-projet beaucoup moins contraignant, qui mettait essentiellement l’accent sur la reddition de comptes autre que financière. Ce texte, critiqué par la société civile, devait entrer en vigueur en janvier 2022. Il était peu probable qu’il permette de garantir le plein respect des droits humains par les entreprises suisses6.
Droit à un procès équitable
En juin, la Suisse a voté en faveur d’une nouvelle loi de lutte contre le terrorisme accordant à la police fédérale de larges pouvoirs, la plupart du temps hors de tout contrôle judiciaire préalable et sans garanties de procédure en bonne et due forme. Les mesures prévues (utilisation d’entraves de chevilles, interdictions de contacts, interdictions géographiques, assignation à domicile à titre préventif, etc.) risquaient de violer le droit à la liberté et à la sécurité des personnes visées et leur droit de bénéficier d’un procès équitable, ainsi que les droits des enfants. Bon nombre de ces mesures pouvaient s’appliquer à des enfants à partir de l’âge de 12 ans7.
Droit au respect de la vie privée
Des motions appelant à l’interdiction des technologies de reconnaissance faciale ont été présentées en novembre devant les conseils communaux de Zurich et de Lausanne, ce qui constituait une bonne nouvelle pour la protection de la vie privée8.
« Droits de l’enfant : la Suisse épinglée par l’ONU pour ses manquements », 21 décembre
« Suisse. Protégeons nos droits fondamentaux – Non à la reconnaissance faciale ! », 18 novembre