Japon - Rapport annuel 2023

Le gouvernement ne s’est pas engagé à mettre fin à l’utilisation du charbon pour la production d’électricité. Des progrès limités ont été réalisés en faveur d’une meilleure reconnaissance des droits des personnes LGBTI sur le plan juridique, mais la discrimination à leur encontre, ainsi que celle visant les femmes et les personnes d’origine coréenne, restait très ancrée. Une nouvelle loi relative à l’immigration bafouait les droits des personnes réfugiées et demandeuses d’asile. Le nouveau procès du plus ancien condamné à mort du Japon s’est ouvert.

Droit à un environnement sain

En dépit des températures estivales record et des décès entrainés par cette canicule, le Japon est resté le seul pays riche industrialisé à ne pas s’être engagé à mettre progressivement fin à l’utilisation du charbon pour la production d’électricité. Des spécialistes de l’environnement se sont de nouveau montrés critiques concernant le plan annoncé en 2022 par le gouvernement japonais, qui entendait mélanger de l’ammoniac au charbon afin de réduire les émissions de carbone du secteur de l’énergie ; les spécialistes estimaient en effet que ce projet serait globalement inefficace et, qui plus est, dangereux à la fois pour les humains et pour la faune et la flore. Ils ont appelé le pays à plutôt investir dans les énergies renouvelables.

Discrimination

Personnes LGBTI

En juin, le corps législatif a adopté une loi sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre qui imposait au gouvernement d’établir un plan visant à promouvoir les droits des personnes LGBTI et à les protéger de toute discrimination « injustifiée ». La loi ne précisait pas ce qu’était une discrimination « injustifiée », et ne garantissait pas aux personnes LGBTI les mêmes droits qu’au reste de la population.
Dans une décision historique rendue en octobre, la Cour suprême a jugé anticonstitutionnelles les dispositions de la Loi spéciale sur les troubles de l’identité de genre exigeant qu’une personne transgenre subisse une stérilisation chirurgicale pour changer de genre dans le livret de famille[1].
L’interdiction du mariage entre personnes de même sexe et d’autres formes de discrimination liée au genre ont cette année encore donné lieu à des actions en justice. En juin, le tribunal de district de Fukuoka a estimé que l’interdiction du mariage homosexuel n’était pas contraire à la Constitution, mais a recommandé des changements législatifs visant à garantir une meilleure protection aux couples de même sexe[2]. En septembre, le tribunal de district de Sapporo a jugé que, dans le cadre d’une relation entre personnes de même sexe, les partenaires n’avaient pas droit aux avantages sociaux dont bénéficiaient les couples mariés.

Femmes

Le Japon est passé de la 116e à la 125e place, sur 146, au classement annuel du Rapport sur les inégalités femmes-hommes dans le monde du Forum économique mondial. Selon ce Rapport, malgré une parité presque complète en ce qui concerne le niveau d’étude et la santé, la représentation des femmes en politique a décliné au cours des années précédentes : elles n’occupaient plus que 10 % des sièges au Parlement et moins de 10 % des postes ministériels.

Personnes d’origine coréenne

La discrimination envers les personnes d’origine coréenne perdurait. Le mois de septembre a marqué le centième anniversaire d’un massacre de personnes d’origine coréenne au Japon ; le gouvernement japonais a refusé de reconnaître officiellement les faits et de présenter des excuses.

Violences fondées sur le genre

En juin, le Parlement a adopté des modifications du Code pénal qualifiant pour la première fois de viols certaines formes de rapports sexuels non consentis, et relevant l’âge du consentement sexuel de 13 à 16 ans. Le délai de prescription pour signaler un viol a été allongé, passant de 10 à 15 ans.
En juin, une ancienne membre des Forces d’autodéfense japonaises, Rina Gonoi, a intenté une action devant la justice civile contre cinq anciens soldats pour détresse psychologique causée par des violences sexuelles subies alors qu’elle était engagée dans l’armée, et contre le gouvernement pour ne pas avoir empêché ces agressions ni mené d’enquête en bonne et due forme sur les faits. En décembre, le tribunal de district de Fukushima a déclaré trois des cinq soldats coupables d’« attentat à la pudeur » et les a condamnés à une peine de deux ans de prison avec sursis. Selon un rapport publié en août à l’issue d’une enquête diligentée par le ministère de la Défense, il existait au sein de l’armée une culture solidement enracinée de harcèlement, y compris de harcèlement sexuel.

Responsabilité des entreprises

Des centaines de personnes ont réclamé des réparations pour les agressions et l’exploitation sexuelles qu’elles auraient subies en lien avec le fondateur (aujourd’hui décédé) de l’agence de talents Johnny and Associates Entertainment, à l’origine du succès de nombreux boy bands japonais. La société a présenté des excuses publiques mais, après s’être rendu au Japon en juillet et août, le Groupe de travail des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme a critiqué la réponse insuffisante du gouvernement et de la société.

Droits des personnes réfugiées ou migrantes

En juin, le Parlement a adopté un projet de loi très controversé en matière de contrôle de l’immigration et de reconnaissance du statut de réfugié, autorisant l’expulsion des personnes ayant demandé la reconnaissance de leur statut de réfugié·e trois fois ou plus. Par ailleurs, ce texte maintenait le principe de la détention des demandeurs et demandeuses d’asile, exception faite des cas dans lesquels des mesures de surveillance non privatives de liberté étaient appliquées, et il n’interdisait pas le placement en détention pour les mineur·e·s. La durée maximale de la détention n’était pas précisée et, en l’absence de disposition permettant un contrôle judiciaire des ordres de détention, les personnes concernées étaient toujours privées d’une procédure régulière[3].
Dans une lettre ouverte publiée en avril, des expert·e·s de l’ONU s’étaient dits préoccupés par ce projet de modification de la législation, notant que les pratiques du Japon en matière de détention de personnes migrantes s’apparentaient à de la détention arbitraire.
En avril et en juillet, deux demandeurs d’asile venus de Turquie et d’Iran se sont vu accorder des dommages et intérêts à hauteur de 220 000 yens (environ 1 500 dollars des États-Unis) et 5,5 millions de yens (environ 37 000 dollars), respectivement. Ils avaient engagé des poursuites contre le gouvernement en 2022, à la suite de leur détention arbitraire par les services de l’immigration.

Peine de mort

Le nouveau procès d’Iwao Hakamada, le plus ancien condamné à mort du Japon, s’est ouvert en octobre, à la suite d’une décision de la haute cour de Tokyo ; celle-ci avait jugé que sa condamnation originelle, prononcée en 1968, était fondée sur des aveux obtenus sous la contrainte et sur des éléments de preuve sujets à caution. Iwao Hakadama avait été remis en liberté provisoire en 2014[4].

[1]« Japon. Les droits des personnes transgenres progressent avec une décision de justice statuant que la chirurgie n’est pas requise pour changer de genre à l’état civil », 25 octobre
[2]« Japon. La décision de Fukuoka au sujet des couples de même sexe illustre les progrès réalisés en matière de droits des LGBTI », le 8 juin
[3]« Japon. Des migrant·e·s s’expriment à l’heure où le gouvernement propose un projet de loi draconien sur l’immigration », 14 mars
[4]« Japon. La décision d’un nouveau procès est un pas en avant vers la justice pour “le plus ancien condamné à mort au monde” », 13 mars

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