Singapour. L’exécution imminente d’un ressortissant malaisien doit être annulée

Les autorités singapouriennes doivent immédiatement annuler l’exécution imminente de Kho Jabing, ressortissant malaisien de 31 ans, notamment parce que cette peine de mort a été prononcée à nouveau lors de la dernière étape de cette affaire, sur la base d’une reconstitution contestée des circonstances du crime, a déclaré Amnesty International le 29 octobre.

« Nous exhortons le président de Singapour à annuler immédiatement l’exécution de Kho Jabing et à reconsidérer la décision de rejet du recours en grâce qu’il a déposé. La décision qui a été prise de lui ôter la vie est basée sur des faits contestés, et la Cour suprême elle-même était divisée quant à la sentence de vie ou de mort à rendre dans cette affaire. Comme il ne reste plus de moyen de recours, seule la grâce peut permettre de sauver la vie de Kho Jabing », a déclaré Josef Benedict, directeur Campagnes pour l’Asie du Sud-Est et le Pacifique à Amnesty International.

En 2010, Kho Jabing et un coaccusé ont été inculpés de meurtre, crime pour lequel la peine de mort était à l’époque obligatoirement prononcée. Singapour ayant modifié sa législation imposant obligatoirement la peine de mort dans certains cas en 2012, et permis que la peine soit laissée à la discrétion du juge pour l’homicide involontaire, la Haute cour a prononcé une nouvelle peine et condamné Kho Jabing à l’emprisonnement à perpétuité et à 24 coups de canne, mais le parquet a interjeté appel.

Lors de l’audience visant à revoir la peine à prononcer contre Kho Jabing, les cinq juges ont unanimement décidé que la peine de mort devait être prononcée si les circonstances du meurtre montraient « … de la cruauté ou un mépris flagrant pour la vie humaine ».

Or, si les cinq juges de la Cour suprême ont convenu qu’il n’existait pas suffisamment de preuves dans cette affaire pour permettre une reconstitution précise du meurtre, ils ne se sont pas accordés sur le fait de savoir s’il était possible de prouver au-delà de tout doute raisonnable que le meurtre était particulièrement cruel. Trois juges ont estimé que les actes de Kho Jabing méritaient d’être punis par la peine de mort, tandis que les deux autres ont affirmé que les éléments disponibles ne permettaient pas de prouver qu’il avait frappé la victime plus de deux fois, un critère nécessaire pour établir le « mépris flagrant ». La peine de mort a donc de nouveau été prononcée à seulement trois voix contre deux, sans autre possibilité d’appel.

« Les lacunes en ce qui concerne les preuves disponibles dans l’affaire Kho Jabing, et le désaccord entre les juges soulèvent des questions qui vont bien au-delà de cette affaire. Elles portent sur les conséquences des modifications de la législation de Singapour sur la peine de mort obligatoire, et en particulier sur le recours possible à la grâce. Un homme risque à présent d’être tué à la suite de cette décision tellement contestée portant sur une question de vie ou de mort. Les normes internationales garantissent dans tous les cas le droit pour toute personne condamnée à mort de faire appel de la sentence de mort, mais Kho Jabing ne dispose plus d’aucun recours juridique. Le président de Singapour doit reconsidérer sa décision de rejet de la demande de grâce de Kho Jabing et annuler immédiatement cette exécution », a déclaré Josef Benedict.

En 2011, le coaccusé de Kho Jabing a échappé à la peine capitale après que les faits qui lui étaient reprochés eurent été requalifiés en « vol avec violences ».

« L’absence de consensus quant à la peine à prononcer contre Kho Jabing n’est qu’un argument de plus en faveur de l’abolition de la peine de mort. Nous exhortons les autorités singapouriennes à réinstaurer immédiatement un moratoire officiel sur les exécutions en vue de l’abolition définitive de la peine de mort », a déclaré Josef Benedict.

La dernière exécution à Singapour a eu lieu le 17 avril 2015 dans une affaire d’homicide volontaire, infraction qui reste obligatoirement punie de la peine de mort.

Complément d’information

Jusqu’à présent, 140 pays ont aboli la peine de mort dans leur législation ou dans la pratique ; trois autres pays – Fidji, Madagascar, et le Suriname – ont aboli ce châtiment pour tous les crimes en 2015. Aux États-Unis, un nouvel État, le Nebraska, est devenu abolitionniste, et le gouverneur de la Pennsylvanie a mis en place cette année un moratoire officiel sur les exécutions.

Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution.

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