Rapport annuel : un tournant dans l’histoire du droit international

Femme tenant une bougie

• De puissants gouvernements projettent l’humanité dans un monde dénué de véritable état de droit international, et ce sont les civil·e·s touchés par les conflits qui en paient le prix fort.

• Rien n’est fait pour empêcher l’intelligence artificielle, qui se développe à vitesse grand V, de créer un terrain fertile pour le racisme, la discrimination et la division, en cette année électorale majeure.

• Face à ces atteintes aux droits humains, des gens du monde entier se sont mobilisés, plus nombreux que jamais, pour exiger la protection des droits humains et le respect de notre humanité commune.

Le monde récolte les terribles conséquences de l’escalade des conflits et du quasi-effondrement du droit international, a déclaré Amnesty International lors du lancement, mercredi 24 avril 2024, de son rapport annuel sur La situation des droits humains dans le monde, qui évalue l’état des droits fondamentaux dans 155 pays.

L’organisation a aussi prévenu que l’effondrement de l’état de droit risquait de s’accélérer avec le développement rapide de l’intelligence artificielle (IA) qui, couplé à la domination des géants de la haute technologie, pourrait entraîner une multiplication des violations des droits humains si la réglementation restait à la traîne.

« Le mépris flagrant d’Israël pour le droit international est exacerbé par l’incapacité de ses alliés à mettre un terme au bain de sang indescriptible infligé à la population civile de Gaza. »

« Le rapport d’Amnesty International dresse un tableau affligeant caractérisé par une répression alarmante des droits humains et de multiples violations des règles internationales, sur fond d’accroissement des inégalités mondiales, de rivalités entre superpuissances pour la suprématie et d’aggravation de la crise climatique », a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

« Le mépris flagrant d’Israël pour le droit international est exacerbé par l’incapacité de ses alliés à mettre un terme au bain de sang indescriptible infligé à la population civile de Gaza. Or, beaucoup de ces alliés ont été les architectes même de ce système juridique mis en place après la Seconde Guerre mondiale. Face à la poursuite de l’agression russe contre l’Ukraine, à la multiplication des conflits armés et aux violations massives des droits humains constatées, par exemple, au Soudan, en Éthiopie et au Myanmar, l’ordre mondial fondé sur le droit est menacé d’extinction. »

Le mépris de la loi, la discrimination et l’impunité dans les conflits et ailleurs ont été favorisés par l’utilisation incontrôlée de technologies nouvelles ou familières, qui sont aujourd’hui couramment utilisées comme armes par des acteurs militaires, politiques et du monde de l’entreprise. Les plateformes des géants technologiques alimentent les conflits. Des logiciels espions et des outils de surveillance de masse sont utilisés pour attenter aux libertés et aux droits fondamentaux, tandis que les gouvernements déploient des outils automatisés visant les groupes les plus marginalisés de la société.

« Dans un monde de plus en plus précaire, la prolifération et le déploiement non réglementés de technologies telles que l’IA générative, la reconnaissance faciale et les logiciels espions sont en passe de devenir un ennemi pernicieux, entraînant une multiplication sans précédent des violations des droits humains et du droit international », a déclaré Agnès Callamard.

« En cette année électorale majeure, et face au pouvoir croissant des lobbies antiréglementation menés et financés par les géants de la haute technologie, ces avancées technologiques débridées et non réglementées constituent une énorme menace pour nous tou·tes. Elles peuvent être utilisées comme armes au service de la discrimination, de la désinformation et de la division. »

Les civils pris dans les conflits paient le prix fort, sur fond de violations du droit international par les États

Le rapport d’Amnesty International fait le constat sévère de la trahison des principes relatifs aux droits humains par les dirigeant·es et les institutions d’aujourd’hui. Face à la multiplication des conflits, les actions de nombreuses grandes puissances ont encore porté atteinte à la crédibilité du multilatéralisme et affaibli l’ordre mondial fondé sur des règles qui avait été établi à partir de 1945.

Dans un conflit emblématique de 2023 et qui ne montre aucun signe d’apaisement, les preuves de crimes de guerre continuent de se multiplier à Gaza tandis que le gouvernement israélien vide de son sens le droit international. Après les terribles attaques menées par le Hamas et d’autres groupes armés le 7 octobre, les autorités israéliennes ont répondu par des frappes aériennes incessantes contre des zones civiles habitées, anéantissant souvent des familles entières, déplaçant de force près de 1,9 million de Palestiniennes et Palestiniens et limitant l’accès à l’aide humanitaire dont la population a désespérément besoin face à la famine croissante à Gaza.

« Ce que nous avons vu en 2023 confirme que de nombreuses grandes puissances abandonnent les valeurs fondatrices de l’humanité et de l’universalité inscrites dans la Déclaration universelle des droits de l’homme »

Le rapport d’Amnesty International montre comment les États-Unis ont utilisé de façon éhontée leur droit de veto pour paralyser pendant des mois le Conseil de sécurité des Nations unies alors qu’une résolution en faveur d’un cessez-le-feu était indispensable, tout en continuant d’armer Israël avec des munitions qui ont été utilisées pour commettre de probables crimes de guerre. Il dénonce également le deux poids deux mesures grotesque des pays européens comme le Royaume-Uni et l’Allemagne, qui ont protesté à juste titre contre les crimes de guerre commis par la Russie et le Hamas, tout en soutenant les actions des autorités israéliennes et américaines dans ce conflit.

« L’incapacité déconcertante de la communauté internationale à protéger de la mort des milliers de civils, dont une forte proportion d’enfants, dans la bande de Gaza occupée montre clairement que les institutions créées justement pour protéger les populations civiles et défendre les droits humains sont désormais incapables de remplir leur office. Ce que nous avons vu en 2023 confirme que de nombreuses grandes puissances abandonnent les valeurs fondatrices de l’humanité et de l’universalité inscrites dans la Déclaration universelle des droits de l’homme », a déclaré Agnès Callamard.

Le rapport d’Amnesty International fait aussi état de violations flagrantes des règles par les forces russes dans le cadre de la poursuite de leur invasion à grande échelle de l’Ukraine. Il dénonce les attaques aveugles contre des zones civiles densément peuplées et des infrastructures dédiées à la production d’énergie ou à l’exportation de céréales, ainsi que le recours à la torture et à d’autres mauvais traitements contre des prisonniers de guerre. À cela vient s’ajouter la contamination massive de l’environnement par des actes tels que la destruction semble-t-il délibérée du barrage de Kakhovka, largement attribuée aux forces russes.

L’armée du Myanmar et les milices qui lui sont alliées ont aussi mené des attaques contre des civils, qui ont fait plus d’un millier de morts parmi la population rien qu’en 2023. Ni l’armée du Myanmar, ni les autorités russes se sont engagées à enquêter sur les violations flagrantes qui ont été signalées. Elles ont l’une et l’autre reçu une aide financière et militaire de la part de la Chine.

Au Soudan, les deux parties au conflit, à savoir les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, se sont montrées peu préoccupées par le droit international humanitaire. Elles ont mené des attaques ciblées ou aveugles qui ont tué et blessé des civil·e·s, et ont tiré des munitions explosives depuis des quartiers densément peuplés, faisant au total 12 000 morts en 2023. Plus de huit millions de personnes ont été contraintes de prendre la fuite, ce qui constitue la plus grande crise de la planète en matière de déplacement de population. Alors qu’aucune fin du conflit n’est en vue, la crise alimentaire qui frappe le Soudan depuis des mois est aujourd’hui dangereusement proche de tourner à la famine.

Utilisées pour alimenter la haine, la division et la discrimination, les technologies constituent une menace en cette année électorale majeure

Amnesty International a constaté que les acteurs politiques dans de nombreuses parties du monde intensifiaient leurs attaques contre les femmes, les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI) et les populations marginalisées, historiquement utilisées comme boucs émissaires à des fins politiques ou électorales. Les technologies, nouvelles ou plus anciennes, ont de plus en plus été utilisées comme armes au service de ces forces politiques répressives dans le but de diffuser de la désinformation, de dresser les communautés les unes contre les autres et d’attaquer les minorités.

Le rapport d’Amnesty International souligne aussi l’utilisation massive des technologies existantes pour conforter des politiques discriminatoires. Des États comme l’Argentine, le Brésil, l’Inde et le Royaume-Uni se sont de plus en plus tournés vers les technologies de reconnaissance faciale pour assurer le maintien de l’ordre pendant des manifestations et des événements sportifs et pour traiter de façon discriminatoire des populations marginalisées, en particulier les personnes migrantes et réfugiées. Par exemple, en réponse à une action en justice menée par Amnesty International, la police de New York a révélé en 2023 comment elle avait utilisé ces technologies pour surveiller les manifestations du mouvement Black Lives Matter dans la ville.

L’utilisation indigne de la reconnaissance faciale a été particulièrement généralisée en Cisjordanie, dans les territoires palestiniens occupés, où Israël s’en est servi pour renforcer les restrictions du droit de circuler librement et maintenir son système d’apartheid.

En Serbie, à la suite de la mise en place d’un nouveau système de protection sociale partiellement automatisé, des milliers de personnes ont perdu l’accès à l’aide sociale pourtant essentielle. Les Roms et les personnes en situation de handicap ont été particulièrement touchés, ce qui montre bien que l’automatisation non contrôlée peut exacerber les inégalités.

Alors que des millions de personnes fuient des conflits à travers le monde, le rapport d’Amnesty International constate que des technologies abusives ont été utilisées dans le cadre de politiques migratoires et de contrôle des frontières, notamment des alternatives numériques à la détention, des technologies d’externalisation du contrôle des entrées sur le territoire, des logiciels de traitement des données et des systèmes de prise de décisions biométriques et algorithmiques. La prolifération de ces technologies perpétue et renforce la discrimination, le racisme et la surveillance disproportionnée et illégale envers les personnes racisées.

Parallèlement, les logiciels espions échappent toujours largement à la réglementation, bien qu’il ait été prouvé de longue date qu’ils entraînent des violations des droits fondamentaux, visant notamment des militant·e·s en exil, des journalistes et des défenseur·e·s des droits humains. Amnesty International a ainsi révélé en 2023 que le logiciel espion Pegasus avait été utilisé contre des journalistes et des militant·e·s de la société civile dans des pays comme l’Arménie, l’Inde, la République dominicaine et la Serbie. En outre, des logiciels espions provenant de l’Union européenne et soumis à la réglementation européenne ont été vendus librement à des pays du monde entier.

« Notre avenir tel qu’il se présente ne va faire qu’empirer si la prolifération galopante de technologies non réglementées n’est pas freinée »

En 2023, l’évolution rapide de l’IA générative a fait changer d’échelle la menace que constituait l’éventail de technologies déjà existantes – des logiciel espions à l’automatisation des services publics en passant par les algorithmes immaîtrisables des réseaux sociaux.
Face à ces évolutions extrêmement rapides, la réglementation n’a guère progressé. Cependant, l’Union européenne (UE) a adopté en février 2024 le Règlement sur les services numériques, qui marque un tournant à l’échelle de l’UE et est le signe que les législateurs européens commencent à agir. Bien qu’imparfait et incomplet, ce texte a eu le mérite d’ouvrir un débat indispensable sur la réglementation de l’IA.

« Il y a un gouffre entre les risques posés par l’évolution non contrôlée des technologies et le niveau de réglementation et de protection qui serait nécessaire. Notre avenir tel qu’il se présente ne va faire qu’empirer si la prolifération galopante de technologies non réglementées n’est pas freinée », a déclaré Agnès Callamard.

Amnesty International a révélé que les algorithmes de Facebook avaient contribué aux violences ethniques en Éthiopie dans le contexte du conflit armé. C’est un exemple éloquent de la manière dont les technologies sont utilisées comme armes pour dresser des communautés les unes contre les autres, en particulier en période d’instabilité.

L’organisation de défense des droits humains prévoit une aggravation de ces problèmes en cette année électorale majeure, compte tenu du rôle de catalyseur des violations des droits humains joué, dans le contexte des élections, par les grandes plateformes de réseaux sociaux comme Facebook, Instagram, TikTok et YouTube, fondées sur un modèle économique qui repose sur la surveillance.

« Nous avons vu combien la haine, la discrimination et la désinformation étaient amplifiées et diffusées par les algorithmes des réseaux sociaux, qui sont optimisés avant tout pour obtenir un taux d’« engagement » maximal. Ils créent une boucle de commentaires infinie et dangereuse, en particulier dans les périodes particulièrement sensibles sur le plan politique. Les outils actuels peuvent générer des images, des enregistrements audio et des vidéos virtuels en quelques secondes, ainsi que prendre pour cible des publics précis par groupes entiers. Or, la réglementation électorale est en retard face à cette menace. Jusqu’à présent, nous avons vu trop de discours mais pas assez d’actes », a déclaré Agnès Callamard.

En novembre, l’élection présidentielle américaine va se tenir dans un contexte de hausse de la discrimination, du harcèlement et de la violence sur les réseaux sociaux à l’encontre des groupes marginalisés, notamment des personnes LGBTI. Les contenus menaçants et intimidants hostiles à l’avortement prolifèrent également.

« Les personnalités politiques utilisent depuis longtemps la manipulation en tenant un discours de rejet des “autres” pour gagner des voix et faire oublier les questions légitimes sur les craintes en matière d’économie et de sécurité. »

Plus d’un milliard de personnes votent cette année en Inde dans un contexte marqué par des attaques contre des manifestant·e·s pacifiques et une discrimination systématique envers les minorités religieuses. En 2023, Amnesty International a révélé qu’un logiciel espion intrusif avait été utilisé contre des journalistes indiens de premier plan. Plus généralement, les plateformes technologiques sont devenues des champs de bataille politiques.

« Les personnalités politiques utilisent depuis longtemps la manipulation en tenant un discours de rejet des “autres” pour gagner des voix et faire oublier les questions légitimes sur les craintes en matière d’économie et de sécurité. Nous avons vu comment les technologies non réglementées, comme la reconnaissance faciale, étaient utilisées pour conforter la discrimination. À cela vient s’ajouter le fait que le modèle économique des géants de la haute technologie, fondé sur la surveillance, verse de l’huile sur ce feu de haine, permettant aux personnes malintentionnées de harceler, de déshumaniser et d’amplifier des discours dangereux afin de renforcer leur pouvoir ou de gagner des voix. C’est un tableau effrayant de ce qui nous attend au fur et à mesure que les avancées technologiques prennent le pas avec voracité sur l’obligation de rendre des comptes », a déclaré Agnès Callamard.

En Belgique, des lacunes qui perdurent

La Belgique compte également parmi les pays examinés par Amnesty International dans son rapport annuel sur La situation des droits humains dans le monde. L’organisation pointe particulièrement la crise de l’accueil des personnes demandeuses d’asile et la situation désastreuse des prisons.

« La crise de l’accueil que nos autorités ont elles-mêmes générée dure maintenant depuis deux ans et demi, contraignant des milliers de personnes à survivre dans la rue pendant des mois, ce qui porte gravement atteinte à leur dignité et à leurs droits humains, explique Carine Thibaut, directrice de la section belge francophone d’Amnesty International. Faisant cruellement fi des milliers de condamnations visant la Belgique, notre gouvernement continue de refuser de déployer les solutions qui permettraient de remédier à cette situation dramatique, comme l’activation du plan de répartition pourtant inscrit dans la loi. »

En ce qui concerne les prisons, c’est principalement l’état de surpopulation et de délabrement qui inquiète Amnesty International, en raison des effets désastreux que cette situation occasionne sur les droits humains des détenu·es, notamment l’accès insuffisant aux services de base – aux soins médicaux et aux installations sanitaires, particulièrement.

« Tant la crise de l’accueil que la situation déplorable des prisons sont principalement imputables à nos autorités et le résultat de choix politiques. »

« Cela fait des années qu’Amnesty International, d’autres organisations et des institutions internationales tirent la sonnette d’alarme. Encore en septembre 2023, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a mis en évidence le manque de progrès de notre pays en la matière, faisant par ailleurs écho aux remarques déjà formulées par le Conseil central de Surveillance pénitentiaire, l’Institut Fédéral pour la Protection et la Promotion des Droits Humains et Unia, insiste Carine Thibaut.

« Tant la crise de l’accueil que la situation déplorable des prisons sont principalement imputables à nos autorités et le résultat de choix politiques. C’est d’autant plus révoltant que ces choix sont faits sur le dos de personnes qui ne représentent pas d’intérêt d’un point de vue électoral, mais qui ont exactement les mêmes droits que n’importe quel être humain. »

Autre point d’attention relevé par Amnesty International en ce qui concerne la Belgique : le droit de protester, mis sous pression notamment par des évolutions législatives liberticides.
« Nous avons en effet pu observer des signes inquiétants qui témoignent d’une mise sous pression délétère de notre droit de protester. Pensons par exemple au projet de loi de l’ex-ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, qui visait à introduire une sanction complémentaire d’interdiction judiciaire de manifester pour des faits commis dans des rassemblements revendicatifs. À la suite de la mobilisation d’une large coalition d’organisations de la société civile, ce projet a heureusement été abandonné, indique Carine Thibaut. Afin de sauvegarder ce droit essentiel, nous redoublerons de vigilance et continuerons de sensibiliser le public et les autorités au caractère clé de ce droit qui a permis tant d’avancées. »

Une mobilisation mondiale sans précédent

« Nous avons vu les actions de grandes puissances et d’acteurs non étatiques nous enfoncer encore davantage dans le chaos d’un monde sans véritables règles, où la recherche impitoyable du profit tiré de technologies révolutionnaires sans gouvernance appropriée est devenue la norme. Toutefois, si de nombreux gouvernements ont failli à leur obligation de respecter le droit international, nous avons aussi assisté à la mobilisation de nombreuses autres personnes, qui ont appelé les institutions internationales à appliquer l’état de droit. Face aux dirigeant·e·s du monde entier qui ne défendaient pas les droits humains, des gens se sont levés pour manifester, protester et signer des pétitions en faveur d’un avenir meilleur », a déclaré Agnès Callamard.

Le conflit entre Israël et le Hamas a provoqué des centaines de manifestations à travers le monde, notamment en Belgique. Des gens ont exigé un cessez-le-feu afin de mettre un terme aux souffrances croissantes des Palestinien·ne·s à Gaza et réclamé la libération des otages pris par le Hamas et d’autres groupes armés, bien avant que nombre de gouvernements ne se décident à le faire. Par ailleurs, des manifestant·e·s sont descendus dans la rue aux États-Unis, en Pologne et au Salvador pour revendiquer le droit à l’avortement, face aux réactions de plus en plus virulentes contre la justice de genre. Aux quatre coins de la planète, des milliers de personnes ont rejoint le mouvement de jeunes Fridays for Future afin de réclamer l’abandon équitable et rapide des énergies fossiles.

Le travail de campagne incessant a aussi abouti à plusieurs victoires importantes en matière de droits humains en 2023. Ainsi, à la suite du travail de plaidoyer mené par le mouvement #MeToo et d’autres organisations de la société civile à Taiwan pour mettre fin aux violences sexuelles en ligne, le gouvernement taiwanais a adopté une modification de la Loi relative à la prévention des agressions sexuelles.

Bien qu’étant loin d’avoir pris toutes les mesures nécessaires, la Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP28) s’est prononcée en faveur d’une « transition vers l’abandon » des combustibles fossiles. C’était la première fois que ceux-ci étaient mentionnés dans une décision de COP. En Turquie, après des années de travail de campagne en leur faveur, les quatre défenseur·e·s des droits humains de l’affaire Buyukada – Taner Kılıç, İdil Eser, Özlem Dalkıran et Günal Kurşun, condamnés en juillet 2020 sur la base d’accusations infondées – ont finalement été acquittés.

« Le droit de manifester est essentiel pour attirer l’attention sur les atteintes aux droits humains et sur les responsabilités des dirigeant·e·s. »

Nouvel exemple parmi de nombreux autres : le militant afghan du droit à l’éducation Matiullah Wesa a été libéré en octobre 2023 après des mois de travail de campagne. Il a passé près de sept mois en prison pour avoir défendu le droit à l’éducation des filles et critiqué la politique des talibans interdisant aux filles de poursuivre leur scolarité dans le secondaire.

« Le droit de manifester est essentiel pour attirer l’attention sur les atteintes aux droits humains et sur les responsabilités des dirigeant·e·s. Les gens ont clairement fait comprendre qu’ils voulaient le respect des droits fondamentaux ; les gouvernements doivent à présent montrer qu’ils les ont entendus », a déclaré Agnès Callamard.

« Compte tenu de l’état peu réjouissant de la situation mondiale, il faut agir de toute urgence pour redynamiser et renouveler les institutions internationales censées sauvegarder l’humanité. Des mesures doivent être prises pour réformer le Conseil de sécurité des Nations unies afin que les membres permanents ne puissent plus utiliser leur droit de veto sans aucun contrôle pour empêcher la protection de populations civiles et renforcer leurs alliances géopolitiques. Les gouvernements doivent aussi prendre des mesures législatives et réglementaires fermes pour lutter contre les risques et les préjudices liés aux technologies de l’IA et au règne des géants technologiques. »

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