Les massacres à Goma et à Gaza on s’en fout ?

Une question provocative. Une question qui a toute son importance en 2024, la politique internationale n’a jamais été aussi présente dans la campagne électorale. Elle révèle l’importance des conflits qui ont lieu dans le monde et des violations massives des droits humains que ces conflits génèrent.

Des populations civiles prises à partie dans les conflits

Depuis maintenant plus de six mois - depuis l’attaque du 7 octobre, et les crimes de guerre commis par le Hamas ainsi que la prise d’otage de personnes civiles qui se trouvent pour certaines encore dans la bande de Gaza - nous assistons à une riposte militaire d’Israël. A quelques milliers de kilomètres d’ici, nous assistons dans la bande de Gaza à un risque réel de génocide. Parler de génocide dans la bande de Gaza n’est plus une opinion, c’est maintenant un arrêt de justice rendu par la Cour internationale de justice. Plus de 1 % de la population gazaouie a perdu la vie, en majorité des enfants et des femmes. En raison du manque d’accès à l’aide humanitaire, une famine y sévit. La communauté appelle maintenant au cessez le feu mais continue dans de nombreux pays à exporter ou laisser transiter des armes vers Israël.
Et le risque d’escalade régionale n’est pas loin.

On doit évoquer ce qui se passe à l’Est de la République Démocratique du Congo. Depuis plus de 30 ans, - depuis le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 - cette zone du monde subit des violences meurtrières et des violations de droits humains. Ayant repris les armes en 2021, le groupe armé du M23 a repris ses attaques dans l’Est du Congo. Depuis le mois d’octobre, ce sont un demi-million de personnes obligées de fuir leurs villages, des déplacés qui se retrouvent dans une situation où ces derniers sont démunis et ont peu accès à l’aide humanitaire. Un M23 qui s’est déjà rendu coupable de crimes de guerre, des viols collectifs de femmes, des exécutions sommaires d’hommes, tous des civils et l’enrôlement d’enfants soldats. Une zone du monde où pendant ces 30 ans de guerre, les mines n’ont jamais cessé de fonctionner pour alimenter nos besoins en matériaux critiques.

Depuis deux ans, l’Ukraine se défend contre le crime d’agression commis par la Russie, avec des violations importantes des droits humains. Crimes de tortures, exécutions extrajudiciaires. Un jour, la justice devra traduire les responsables. Par ailleurs, les réfugié·es ukrainien·nes - les 70.000 qui ont bénéficié à juste titre d’un accueil digne en Europe- devraient être un modèle pour d’autres ressortissants de pays en guerre.

On doit également parler de ces conflits qui reçoivent moins d’attention médiatique, qui suscitent moins de mobilisation de l’opinion publique mais qui, pour autant, font des dégâts sans nom auprès des populations civiles.

Comme certain.es d’entre vous le savent, le 15 avril marquait le premier anniversaire de l’éclatement du conflit au Soudan. La réponse régionale et internationale reste terriblement inadéquate. La population soudanaise continue non seulement de subir le poids des violents affrontements entre les forces armées soudanaises (SAF) et les forces de soutien rapide (RSF), mais elle se sent également oubliée.

Le conflit, qui a débuté dans la capitale Khartoum en avril 2023, s’est progressivement étendu à d’autres régions du pays. Plus de 14 600 personnes ont été tuées dans l’ensemble du pays, notamment lors d’attaques délibérées et aveugles menées par les parties belligérantes et les milices alliées. Les femmes et les jeunes filles ont été victimes de violences sexuelles liées au conflit, notamment de viols. On estime qu’environ 10,7 millions de personnes ont été déplacées par le conflit. Parmi elles, 9 millions se trouvent à l’intérieur du pays, ce qui fait du Soudan la plus grande crise de déplacement interne au monde. Le Programme alimentaire mondial prévient que si les combats ne cessent pas, le Soudan risque également de devenir la plus grande crise de la faim au monde,

Une année d’élections cruciale pour les droits humains

Il n’y a pas que les conflits, il y a la défense essentielle des droits humains dans le monde. Ainsi, la moitié de l’humanité va voter en 2024. Une année d’élections dont on sait que pour de nombreuses et nombreux défenseur.es des droits humains, des militant.es de l’environnement, des droits des femmes, cela signifie un accroissement de la répression, menant à des menaces, des emprisonnements injustifiés, des jugements arbitraires. Des défenseur.es qui auront besoin de visas humanitaires pour préserver leur intégrité physique et parfois sauver leur vie.

Car on le voit, la peine de mort est de nouveau d’actualité, elle a été rétablie en République Démocratique du Congo, le régime iranien torture et assassine sa jeunesse, .. Plus proche de la Belgique, l’Etat de droit est bafoué en Hongrie qui a refusé de ratifier un traité protégeant les femmes contre la violence, adopté des lois homophobes et transphobes, réprimé les personnes réfugiées et demandeuses d’asile et étouffé la liberté d’expression et d’association.

Alors que peut faire la Belgique ? Nous sommes un petit pays. Oui bien sûr. Un petit pays qui peut faire un choix délibéré et clair, le choix du droit international comme boussole pour dessiner et orienter toute sa politique étrangère. Cela signifie de ne pas faire primer la question du commerce ou la question des intérêts géostratégiques, ou des emplois belges dans le commerce des armes.

Les partis politiques en campagne et le prochain gouvernement doivent s’engager à faire des droits humains et du droit international un socle irréfutable, en refusant le deux poids, deux mesures et en luttant contre l’impunité qui nourrit les futures violations.

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