Écrire Appelez à un moratoire sur les exécutions dans le Nevada

L’État du Nevada s’apprête à procéder à sa première exécution depuis plus de 11 ans. Un prisonnier qui a abandonné ses voies de recours doit être exécuté le 14 novembre à 20 heures. Amnesty International appelle les autorités à un moratoire sur les exécutions, à titre de première étape vers l’abolition de la peine capitale.

La dernière exécution dans le Nevada a eu lieu le 26 avril 2006. La prochaine qui est programmée serait la première réalisée dans sa nouvelle chambre d’exécution, à la prison d’État d’Ely, et la première injection létale aux États-Unis utilisant l’association de trois substances choisie par les autorités du Nevada. Au début de l’année 2017, un projet de loi visant à abolir la peine de mort dans le Nevada n’a pas dépassé le stade de l’examen en commission.

Le Nevada a exécuté 12 personnes depuis que la Cour suprême fédérale a approuvé les nouvelles lois relatives à la peine capitale en 1976 et que cet État a adopté sa législation actuelle dans ce domaine en 1977. Onze de ces exécutions concernaient des prisonniers soi-disant « volontaires », qui avaient abandonné leurs voies de recours. Aujourd’hui, les autorités du Nevada reçoivent une nouvelle fois l’« aide » du condamné. Cet homme est incarcéré dans le couloir de la mort depuis 2007 pour un meurtre commis en 2002. Il a demandé officiellement à abandonner ses voies de recours en 2016, et en juillet 2017, une juge l’a déclaré apte à prendre cette décision.

Le même mois, elle a signé un ordre d’exécution à son encontre. Depuis la dernière exécution réalisée dans le Nevada, les préoccupations relatives aux coûts, aux risques, aux incohérences et aux inégalités concernant l’application de la peine de mort aux États-Unis se sont accentuées. En 2008, le juge qui était alors le doyen de la Cour suprême des États-Unis a déclaré : « Le temps d’une comparaison objective et impartiale entre les énormes coûts que les procédures judiciaires liées à la peine de mort font porter à la société et les bénéfices qu’elles apportent est sûrement venu. » Selon lui, les 30 années qu’il avait passées au sein de cette juridiction l’avaient convaincu qu’« appliquer la peine capitale, c’est supprimer une vie inutilement ».

En 2015, deux autres membres de la Cour suprême ont déclaré qu’il était temps que celle-ci examine la constitutionnalité de la peine de mort au vu des éléments montrant les erreurs et le caractère arbitraire de son application ainsi que le déclin de son utilisation aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Vingt-et-un pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes ou au moins ceux de droit commun depuis la dernière exécution dans le Nevada. À l’heure actuelle, 141 pays sont abolitionnistes en droit ou en pratique. Depuis la dernière exécution du Nevada, six États américains ont aboli la peine de mort (le New Jersey, le Nouveau-Mexique, l’Illinois, le Connecticut, le Maryland et le Delaware).

En outre, les gouverneurs de l’Oregon, de la Pennsylvanie et de l’État de Washington ont imposé un moratoire sur les exécutions. Le Nevada doit instaurer immédiatement un moratoire sur les exécutions, à titre de première étape vers l’adoption d’une législation en faveur de l’abolition. Cette démarche irait dans le sens des principes internationaux relatifs aux droits humains et des résolutions successives adoptées au cours des 10 dernières années par l’Assemblée générale des Nations unies appelant à un moratoire sur les exécutions, dans l’attente de l’abolition de la peine de mort.

Dans un monde de plus en plus abolitionniste, le Nevada et d’autres États américains rencontrent des difficultés pour se procurer les substances servant à leurs protocoles d’exécution par injection létale. En septembre 2016, le Nevada a lancé un « appel d’offres concernant des produits pharmaceutiques utilisés pour les injections létales » dans l’espoir de trouver de l’hydromorphone et du midazolam pour son protocole d’exécution consistant à injecter ces deux substances aux condamnés. Cependant, il n’a reçu aucune offre en réponse. Le 17 août 2017, l’administration pénitentiaire du Nevada a annoncé qu’elle utiliserait une association de diazépam (un sédatif), de fentanyl (un analgésique opioïde) et de cisatracurium (un myorelaxant) pour l’exécution qui est maintenant prévue le 14 novembre.

Aucune de ces trois substances n’a encore été utilisée lors d’une exécution aux États-Unis ; par conséquent, on peut dire que le Nevada se livre à ce que quatre juges de la Cour suprême fédérale ont décrit en 2015 comme une « expérimentation humaine de facto » dans le cadre des tentatives des États appliquant la peine de mort visant à pallier leurs difficultés pour se procurer les produits qui servent lors des exécutions. Cette association de trois substances a été choisie par le directeur de l’administration pénitentiaire, après consultation du médecin-chef de celle-ci. Le 30 octobre 2017, le médecin-chef a démissionné sans préavis après à peine plus d’un an à ce poste.

Vingt-deux personnes ont été condamnées à mort dans le Nevada entre 2002 et 2016. Entre 1986 et 2000, le nombre de condamnations à mort prononcées dans cet État était exactement quatre fois plus élevé – 88. Cette évolution reflète une tendance générale à la diminution du recours à la peine de mort aux États-Unis depuis une dizaine d’années environ, dont toutes les autorités devraient se saisir pour que l’ensemble du pays prenne ses distances avec ce châtiment.

Si elle avait lieu, l’exécution programmée le 14 novembre serait la première réalisée sous le mandat du gouverneur Brian Sandoval. De 2002 à 2005, ce dernier était procureur général du Nevada. En mars 2005, le président George W. Bush l’a nommé juge à la cour fédérale de district du Nevada et le Sénat a validé cette nomination en octobre de la même année. Il a démissionné de ce poste dont il était titulaire à vie en 2009, s’est présenté comme candidat aux fonctions de gouverneur et a été élu 30e gouverneur du Nevada en 2010. Son mandat a été renouvelé lors des élections de 2014.

La peine de mort est le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Il n’a jamais été prouvé qu’elle ait un effet plus dissuasif que les autres peines. Elle tend à être appliquée de manière discriminatoire, en fonction des origines ethniques et sociales. Elle empêche toute possibilité de réinsertion. Elle peut prolonger la souffrance de la famille de la victime et l’étendre aux proches du condamné. Elle accapare des ressources qui pourraient être utilisées plus efficacement pour lutter contre les crimes violents et aider les personnes qui sont touchées par ces crimes.

Près des trois quarts des 42 prisonniers exécutés dans 11 États américains dont le Nevada depuis 1976 avaient abandonné leurs voies de recours – tous dans le Connecticut, au Nouveau-Mexique, dans l’Oregon et en Pennsylvanie, et 24 des 35 prisonniers exécutés dans les États de Washington, du Dakota du Sud, de l’Utah, du Montana, de l’Idaho, du Kentucky et du Nevada. Au total, un dixième des prisonniers exécutés aux États-Unis depuis 1976 avaient abandonné leurs voies de recours. En dehors des huit États qui exécutent le plus de condamnés à mort – le Texas, la Virginie, l’Oklahoma, la Floride, le Missouri, la Géorgie, l’Alabama et l’Ohio (responsables de 78 % des exécutions réalisées depuis 1976) – le ratio s’élève à une exécution sur cinq pour les 27 autres États qui en ont effectué depuis 1976.

Le Nevada et 14 autres États américains, ainsi que les autorités fédérales, ont repris les exécutions après 1976 en ôtant la vie d’un prisonnier qui avait abandonné ses voies de recours. Deux des États qui n’ont exécuté que des « volontaires » – le Connecticut et le Nouveau-Mexique – ont aboli la peine de mort au cours de la dernière décennie. En Oregon, en Pennsylvanie et dans l’État de Washington – qui totalisent ensemble neuf exécutions, dont huit prisonniers « volontaires » – un moratoire sur les exécutions est actuellement en vigueur en raison de préoccupations relatives au système d’application de la peine capitale. Pour plus d’informations sur la peine de mort dans le Nevada et le phénomène des « volontaires », voir le document intitulé USA : Intent to kill, intent to die, novembre 2017, disponible sur https://www.amnesty.org/en/documents/amr51/7392/2017/en/.

Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances. Depuis que la Cour suprême fédérale a approuvé les nouvelles lois relatives à la peine capitale en 1976, 1 463 personnes ont été exécutées aux États-Unis, dont 21 jusqu’à présent cette année.

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