Écrire UN JOURNALISTE DE 81 ANS DÉTENU SANS INCULPATION

Shafik Rehman, journaliste bangladais âgé de 81 ans, a été arrêté le 16 avril et est toujours détenu sans inculpation à la prison centrale de Dacca, plus de quatre mois après son arrestation. Il peut désormais communiquer avec sa famille et ses avocats, mais des préoccupations demeurent quant au fait qu’il ne reçoit pas les soins médicaux dont il a besoin. Son procès en appel doit avoir lieu le 30 août.
Shafik Rehman, journaliste respecté, est actuellement rédacteur en chef du magazine mensuel Mouchake Dhil. Cet homme est un sympathisant notoire du principal parti d’opposition, le Parti nationaliste du Bangladesh, et a déjà été pris pour cible à plusieurs reprises par les autorités en raison de son travail de journaliste.

Shafik Rehman a été arrêté le 16 avril car il était soupçonné d’être impliqué dans un complot visant à enlever et assassiner Sajib Wazed Joy, le fils de la Première ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina. Après une période de détention provisoire, il a été envoyé le 27 avril à la prison centrale de Kashimpur, où il a été détenu à l’isolement et privé de soins médicaux adaptés alors qu’il souffre de diabète et d’une pathologie cardiaque. Il a été transféré à la prison centrale de Dacca le 22 mai et n’est plus détenu à l’isolement depuis lors.

Alors qu’il a passé plus de quatre mois en détention depuis son arrestation, Shafik Rehman n’a été inculpé d’aucun crime. Au titre du droit international, les autorités sont tenues de l’informer des charges retenues contre lui, et de l’inculper rapidement ou de le libérer. Sa demande de libération sous caution a été rejetée à trois reprises, la dernière fois par la Haute Cour le 7 juin. Shafik Rehman s’est vu accorder l’autorisation par quatre juges de la Division d’appel (Appellate Division) de faire appel de cette décision devant la Cour suprême. L’audience concernant sa demande de mise en liberté sous caution devant la Cour suprême aura lieu le 30 août.

Shafik Rehman reçoit des soins médicaux à l’hôpital de la prison. Le 17 juillet, les juges de la Division d’appel ont ordonné aux autorités carcérales de lui dispenser des soins médicaux adaptés et, le cas échéant, de le transférer à l’Université médicale de Bangabandhu Sheikh Mujib. Cependant, la famille de Shafik Rehman reste très préoccupée par son état de santé qui se dégrade et affirme que le niveau de soins qui lui est prodigué actuellement n’est pas satisfaisant.

La police a déclaré que Shafik Rehman avait été arrêté dans le cadre d’une affaire pénale ouverte en août 2015 pour « conspiration en vue d’enlever et d’assassiner » Sajib Wazed Joy, le fils de la Première ministre du Bangladesh, qui vit aux États-Unis et travaille comme conseiller en technologies de l’information. Ce complot présumé aurait été organisé aux États-Unis et serait lié à une affaire judiciaire américaine datant de mars 2015, dans le cadre de laquelle trois hommes avaient été condamnés pour des accusations de corruption. Cependant, des informations crédibles relayées par les médias ont depuis gravement mis en doute les déclarations des autorités du Bangladesh selon lesquelles des documents judiciaires américains impliquaient Shafik Rehman dans un complot visant à « enlever et assassiner » Sajib Wazed. L’existence même d’un tel complot a été remise en question.

Après son arrestation, le 16 avril, Shafik Rehman a d’abord été placé en détention provisoire, puis transféré à la prison centrale de Kashimpur le 27 avril dans l’attente de son procès, pour lequel aucune date n’a été fixée. Selon ses avocats, ses demandes de libération sous caution ont été rejetées à deux reprises par des tribunaux différents siégeant à Dacca, sans aucune explication. La Haute Cour lui a opposé son dernier refus, au mois de juin. Shafik Rehman s’est vu accorder l’autorisation de faire appel de cette décision devant la Cour suprême, qui examinera sa requête le 30 août 2016.

Les conditions de détention de Shafik Rehman ne respectent pas les obligations du Bangladesh qui, au titre du droit international, est tenu de veiller à ce que toutes les personnes privées de leur liberté soient traitées avec humanité et ne subissent pas de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les responsables de l’application des lois et les autorités pénitentiaires sont tenus de protéger la santé des personnes qu’ils placent en détention et de leur dispenser des soins gratuits en adéquation avec ceux qu’ils pourraient recevoir hors de la prison. En outre, au titre du droit international, le Bangladesh est tenu d’informer Shafik Rehman des charges retenues contre lui, et de l’inculper rapidement ou de le libérer. L’article 9(2) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Bangladesh est partie, dispose que tout individu appréhendé « sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui ».

L’arrestation de Shafik Rehman survient dans un contexte de vastes restrictions de la liberté d’expression au Bangladesh. Depuis 2014, le gouvernement de la Ligue Awami a renforcé les restrictions imposées aux médias indépendants. Rien qu’en 2016, au moins trois autres rédacteurs en chef de premier plan ont été inculpés pour sédition ou diffamation : Mahfuz Anam (The Daily Star), Mahmudur Rahman (Amar Desh) et Matiur Rahman (Prothom Alo).

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