L’identité n’est pas une notion simple, elle recouvre des domaines très vastes que l’on ne peut pas catégoriser facilement.
Dans son livre « Les identités meurtrières »1, Amin Maalouf émet l’idée que chacun est constitué d’une foule d’éléments visibles et cachés. Même si nous les vivons comme un tout, chaque élément a une importance différente selon la situation dans laquelle se trouve la personne à un moment donné de sa vie. Par exemple un Belge se dira Wallon, Bruxellois ou Flamand sur le territoire belge, mais se considèrera souvent comme Belge ou Européen à l’étranger.
Une façon d’appréhender la notion d’identité est de s’imaginer comme un oignon, chaque couche de celui-ci correspondant à un aspect différent de son identité. Nous pouvons nous définir en fonction du rôle que nous jouons dans la société (étudiant, boulanger), de nos choix (choix de musiques, d’opinions politiques), de l’endroit où l’on vit ou de celui où on a vécu (campagne, ville), du fait d’appartenir ou non à une minorité ou à un groupe opprimé (femme, homosexuel, immigré), de notre identité sexuelle, de nos croyances, etc.
L’identité n’est pas une chose donnée à la naissance pour toute la vie, mais quelque chose qui se construit et se transforme petit à petit. Même certains traits de l’identité reçus à la naissance, comme la couleur de la peau ou le sexe, n’ont pas le même sens selon l’endroit où l’on naît. Naître Noir en Afrique du Sud au moment de l’apartheid (nous expliquons ce terme dans le chapitre I. 5) ou dans un pays européen n’aura pas le même impact sur l’identité, de même que naître femme en Afghanistan ou à Hollywood par exemple.
Mais l’identité n’a pas qu’une dimension individuelle, l’identité s’inscrit également dans une dimension collective, chacun ayant besoin d’appartenir à un groupe ou de faire référence à un groupe. Cette dimension est importante car elle va conditionner nombre de comportements humains. L’inscription dans un collectif, avec l’adoption de ses normes, coutumes, ses valeurs, outre le fait d’assurer la continuité du groupe, conduit de plus à donner du sens à la vie de chacun, selon ses aspirations.
Ces logiques identitaires sont des logiques habituelles chez l’individu. Cependant toute logique peut induire des dérives. Ainsi, par exemple, un groupe peut se fermer sur lui-même. Cette fermeture peut trouver son origine dans la volonté des membres du groupe de refuser le rapport aux autres ou au contraire, dans l’impossibilité pour ses membres de trouver une place dans la société. Les raisons invoquées peuvent être nombreuses : affirmation excessive de son origine culturelle ou absence de reconnaissance suffisante de la part de la population ou des institutions du pays.
Selon Amin Maalouf, il faut éviter de tomber dans une attitude fataliste ou de se complaire dans son rôle de victime. Le sentiment d’injustice peut en effet tendre vers de la rancœur, de la frustration ou aller jusqu’au désir de vengeance. L’individu ne doit pas se contenter de prendre conscience de ce qu’il est, de son identité, il devient ce qu’il est, il l’acquiert pas à pas.
Quelques exemples pour illustrer cette idée
– À ceux qui lui posent la question de son identité, Amin Maalouf explique : « Je suis né au Liban, j’y ai vécu jusqu’à l’âge de vingt-sept ans, l’arabe est ma langue maternelle. (...) Comment pourrais-je l’oublier ? Comment pourrais-je jamais m’en détacher ? Mais d’un autre côté, je vis depuis vingt-deux ans en France, je bois son eau et son vin, mes mains caressent chaque jour ses vieilles pierres, j’écris mes livres dans sa langue, jamais plus elle ne sera pour moi une terre étrangère ».
– Pie Tshibanda raconte son arrivée en Belgique et les confrontations de ses valeurs et de son style de vie dans son spectacle « Un fou noir au pays des Blancs » et dans son nouveau spectacle »Je ne suis pas sorcier », actuellement en tournée partout en Belgique.
– Dans « Nuit d’encre pour Farah », l’écrivaine Malika Madi, née en Belgique de parents algériens, montre combien la confrontation de deux cultures est souvent source de souffrance et de ruptures. Deux conceptions de la famille, de la femme, de la réussite sociale s’affrontent et peuvent expliquer d’une part le repli identitaire des individus qui sont issus d’une seule culture et d’autre part le désarroi de ceux qui doivent grandir et se construire à partir de deux cultures.
Selon elle, « on assiste aujourd’hui à un repli identitaire, ce qui n’était pas le cas avant. Aujourd’hui, le choix de s’ouvrir au monde est difficile, car le monde renvoie au jeune musulman l’image d’un terroriste. L’adolescent va donc choisir de se refermer sur lui-même, sur un clan, et le racisme envers le Belge naît, car on a besoin de se sentir en position de force. Il y a un côté communautaire qu’il ne faut pas nier. L’adulte, lui, relativise les choses : on se positionne mieux quand on construit sa vie. Mes voisins sont Belges. On s’invite régulièrement. Maintenant, ils savent qu’on ne boit pas d’alcool, qu’on ne mange pas de porc, etc. Et ça ne pose pas de problème. Quand on apprend à se connaître, les barrières tombent, mais il faut le temps de l’apprentissage »2.
Débat
Proposez à vos élèves de définir leur identité. Demandez-leur ensuite pourquoi ils choisissent de mettre en avant tel ou tel aspect de leur identité... Observez s’il y a plus de points communs que de différences entre les identités de deux personnes, même lorsqu’elles sont d’origine culturelle différente.
Pour en savoir plus
M. MADI, Nuits d’encre pour Farah, Editions du Cerisier, 2000
A. MAALOUF, Les identités meurtrières, Edition Grasset & Fasquelle, 1998
La dimension identitaire a une importance symbolique : nombreux sont ceux qui y font référence pour justifier les conduites d’un groupe par rapport à un autre. D’autant qu’il est difficile d’échapper à la dimension émotionnelle qui accompagne toute affirmation. Dans cette perspective et dans certaines circonstances, des portes peuvent s’ouvrir pour laisser place à des pratiques discriminatoires. Ces dernières années ont été « semées » d’ attentats, de menaces « terroristes », de conflits ethniques, d’actes racistes et même de génocides...
Tous ces événements sont le produit d’une dérive identitaire, dont l’origine peut être politique, religieuse, culturelle, économique, ethnique ou nationaliste. Leur point commun : la défense du groupe contre un autre groupe, perçu comme potentiellement dangereux ou ennemi...
Mais qu’est-ce qu’un ennemi ?
« La notion d’ennemi, qu’il soit défini en termes politique, national, moral, ethnique, ou religieux, est souvent présentée comme inhérente aux relations internationales. Qu’il s’agisse de « Boche », de « Rouge » ou d’« intégriste », l’ennemi est diabolisé, intrinsèquement coupable et dépeint comme l’origine univoque des maux qui pèsent sur la société. (...) Plus que la notion d’ennemi, c’est le concept d’altérité qui est inhérent aux relations internationales. Nul n’échappe à la relation à l’autre. Mais le mode de gestion de cette relation ne peut pour autant être réduit à l’opposition. Il peut également revêtir les formes de la négociation et de la coopération. »
Extrait de l’article de Tanguy de Wilde d’Estmael, Claude Roosens et Valérie Rosoux, Eviter les crispations, assumer la mondialisation, La Libre Belgique, 15 et 16/09/01.
Pour en savoir plus sur la définition de l’ennemi, voir le travail de Carl Schmitt, http://www.stratisc.org/strat72_Cumin2-_tdm.html
Questions - Débat
Quels sont nos ennemis aujourd’hui ? Avons-nous vraiment des ennemis ? Comment les reconnaître ?
Réflexion : nos ennemis d’hier sont devenus nos « amis » ou du moins nos partenaires. Des pays comme l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie se sont faits la guerre et sont rassemblés aujourd’hui au sein de l’Union européenne. Cela prouve qu’on n’est pas nécessairement ennemis pour la vie. Juifs, musulmans et chrétiens ont vécu ensemble sans conflit majeur pendant plus d’un siècle en Andalousie, au Xème et XIème siècle. Il n’y a donc pas de fatalité à la haine entre peuples.
– Ne devient-on pas « ennemi » par manque de connaissance de l’autre ? Dès lors que les gens apprennent à se connaître, les différences peuvent souvent être surmontées.
– Lorsqu’on désigne un ennemi, on risque aussi de s’en prendre aux supposés traîtres, ceux qui appartiennent à notre groupe mais qu’on soupçonne de soutenir l’ennemi.
– Certains « traîtres » sont considérés aujourd’hui comme des héros : ainsi, le militaire allemand Ludwig Beck, un des conspirateurs ayant tenté d’assassiner Hitler en juillet 1944, était un traître aux yeux du régime nazi... Posez la question à vos élèves : est-il parfois préférable de trahir un groupe, plutôt que de suivre aveuglément son chef ?
Comparez ces exemples plus récents et posez la question à vos élèves : peut-on qualifier quelqu’un de traître, sans pour autant porter atteinte à sa liberté de pensée, à son libre choix ? Est-il toujours possible de résister à la pression du groupe sans se voir traiter de traître ? Trouvez d’autres exemples, aussi dans votre vie quotidienne, dans l’école, avec les copains...
– Les policiers ou militaires chargés d’évacuer les colons juifs de Gaza cet été ont souvent été pris à partie par ces derniers. Même les transporteurs chargés de déménager leurs effets personnels ou les ambulanciers se sont fait agresser à coups de barre de fer par des jeunes du mouvement d’extrême droite « Les Jeunes des Collines ». Un policier a eu le visage brûlé par de l’ammoniaque enflammée. « Tu finiras en enfer comme tous les traîtres qui veulent amputer la terre sacrée d’Israël », hurlait l’auteur de ce « fait d’armes », un adolescent qui s’est enfui avec ses complices.3
– « En ce moment, j’espère surtout que mes copines et mes voisins ne nous verront pas lorsque nous nous mettrons en route. Que vont-ils penser de nous ? Sans doute que nous sommes des traîtres et que nous abandonnons le combat afin de bénéficier de l’entièreté des indemnités allouées par le SELA. Mais ce n’est pas le cas, puisque nous avons attendu le dernier moment pour franchir le pas. J’espère que mes amis le comprendront et que le déshonneur ne viendra pas s’ajouter à la tristesse et à la nostalgie. »4
– L’Autorité palestinienne a récemment condamné à mort une trentaine de personnes. Certaines sont accusées de traîtrise et d’avoir collaboré avec les services israéliens de renseignements dans le but d’assassiner d’autres Palestiniens.5
Comment résister à la pression du groupe ?
Comment savoir si, dans telle situation, on aurait été du côté des bourreaux ou des résistants ? C’est un peu ce que Jean-Jacques Goldman nous pose comme question dans cette chanson :
Chanson : « Né en 17 à Leidenstadt » (sur le disque « Fredericks - Goldman - Jones », 1991)
Et si j’étais né en 17 à Leidenstadt / Sur les ruines d’un champ de bataille / Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens / Si j’avais été Allemand ? / Bercé d’humiliation, de haine et d’ignorance / Nourri de rêves de revanche / Aurais-je été de ces improbables consciences / Larmes au milieu d’un torrent ? / Si j’avais grandi dans les docklands de Belfast / Soldat d’une foi, d’une caste / Aurais-je eu la force envers et contre les miens / De trahir, tendre une main ? / Si j’étais née blanche et riche à Johannesburg / Entre le pouvoir et la peur / Aurais-je entendu ces cris portés par le vent / Rien ne sera comme avant ? / On saura jamais c’qu’on a vraiment dans nos ventres / Caché derrière nos apparences / L’âme d’un brave ou d’un complice ou d’un bourreau ? / Ou le pire ou le plus beau ? / Serions-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d’un troupeau / S’il fallait plus que des mots ? / Et si j’étais né en 17 à Leidenstadt / Sur les ruines d’un champ de bataille / Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens / Si j’avais été Allemand ? / Et qu’on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps / D’avoir à choisir un camp.
Activité pédagogique
Écoutez la chanson, choisissez une des situations décrites et répondez à la question : Et moi, dans telle situation, comment aurais-je réagi ?
Autre outil pédagogique : le roman « Le Pont » de Manfred Gregor (éd. Livre de Poche) raconte l’expérience de lycéens-soldats de la Wehrmacht, acceptant la mission suicidaire de défendre coûte que coûte le pont qui est à côté de chez eux. Un roman intéressant sur le thème de l’obéissance, de la fascination pour les leaders, sur l’horreur de la guerre et la peur de la mort.
Action positive :
Une des façons de lutter contre des attitudes de rejet ou d’exclusion dans un groupe est de faire comprendre à ce groupe, par une action symbolique, à quel point son attitude est négative. Ainsi, en Italie, le racisme dans les stades de football a pris des allures inquiétantes : de plus en plus de supporters insultent les joueurs noirs, leur balançant des peaux de banane ou imitant le bruit du singe à leur passage. Des footballeurs du club de Trévise, près de Venise, ont réagi à cette situation. Ils ont provoqué une immense surprise en apparaissant sur le stade peints en noir, en solidarité avec leur coéquipier noir victime d’injures racistes.
Question - Débat
Vous est-il déjà arrivé de vous trouver mal à l’aise dans un groupe qui prône une certaine forme d’exclusion ? Trouvez d’autres exemples de gestes de solidarité avec les victimes d’exclusion que vous pourriez organiser dans votre groupe.
Amin Maalouf essaye de montrer que chacun est différent mais que par facilité nous englobons des gens même différents sous un mot et nous leur attribuons des étiquettes (criminels, voleurs, paresseux). Nous faisons des amalgames, c’est-à-dire que nous mettons tout le monde dans le même sac en ne reconnaissant que le sac et pas ce qu’il y a dedans. On fait ainsi abstraction des particularités de l’individu.
Ces étiquettes sont des stéréotypes ou des préjugés.
Qu’est-ce qu’un stéréotype et un préjugé ?
Les stéréotypes désignent des groupes plus ou moins larges : la « race » (par exemple les Noirs), la nation (par exemple les Belges), la profession (par exemple les médecins), les classes sociales (par exemple les riches, les pauvres, le prolétariat), le groupe (par exemple les homosexuel(le)s, les catholiques). Ainsi, le stéréotype peut s’appliquer à diverses situations et peut toucher tout le monde.
Au départ, le terme est utilisé en imprimerie. Il vient du grec « stéréos » qui signifie solide et « typos » qui signifie empreinte.
Ce terme apparaît en sciences sociales pour rendre compte du caractère condensé et simplifié de certaines opinions qui ont cours dans nos têtes.
L’objectif des stéréotypes consiste à simplifier la réalité. Les stéréotypes sont généralement basés sur certaines images acquises à l’école ou par le biais des médias, des bandes dessinées, du cinéma, de la publicité, des rumeurs, des anecdotes ainsi qu’à la maison, qui se sont par la suite généralisées pour englober toutes les personnes qui pouvaient y être associées.
Les stéréotypes sont des croyances rigides.6 Ils nous aident à comprendre le monde, mais il faut faire attention aux dérives, que sont les préjugés.
Les préjugés sont des jugements que nous formons d’emblée à propos d’une autre personne ou d’un autre groupe (ethnique, religieux) que nous ne connaissons pas réellement. Ils peuvent être négatifs ou positifs. Ils nous sont souvent inculqués lors de l’éducation et sont par conséquent très difficiles à modifier ou à supprimer. C’est pour cela qu’il est important que nous en prenions conscience.
Les stéréotypes et les préjugés sont des filtres à travers lesquels nous interprétons la réalité ; lorsque la réalité ne correspond pas à nos idées préconçues, il est alors plus simple de modifier notre interprétation de la réalité plutôt que de changer nos idées. Nous utilisons en effet les préjugés pour le faire, mais est-ce le bon chemin ? Quelles sont les autres options pour compléter l’information manquante ?7
Nous assimilons des préjugés et des stéréotypes à propos d’autres groupes culturels, quelquefois de manière inconsciente, mais ces préjugés et stéréotypes ont une origine et répondent à plusieurs objectifs. Ils nous aident à évaluer notre propre culture, à évaluer d’autres cultures et modes de vie, à régir les modes que notre culture entretient avec les autres cultures et à justifier les traitements et la discrimination à l’égard des individus d’autres cultures.8
Témoignage
« Le petit vieux qui flippe pour son nain de jardin, tu crois qu’il est raciste ? Ou simplement qu’il a peur ? Il y a dans ce monde des sociétés, des cultures, des idéologies, des modes de vie différents. Certains nous correspondent, d’autres nous sont plus difficiles à digérer. Et alors ? Si je me trouve confronté à un Arabe dans le cadre d’une vente de bagnole, tout de suite il me gonfle. Il marchande, il me gonfle. Son système de commerce n’est pas le mien, je n’ai pas envie d’y adhérer. Ça ne m’empêche pas d’aimer chez lui un tas d’autres trucs. Sa culture. Sa musique. Son rapport à la religion pourquoi pas. On n’est pas fait d’un seul bloc. Alors bien sûr qu’on se prend parfois la tête avec des gens, mais pas parce qu’ils seraient jaunes rouges noirs blancs verts : parce que ce sont des cons. Tout simplement.... » Jean-François9
Débat
– Dans le témoignage qui précède, l’auteur utilise-t-il des préjugés ou des stéréotypes ? Lesquels ?
– Les stéréotypes ne sont-ils pas nécessaires pour vivre ? Dans quelle mesure sont-ils utiles ?
– Est-on plus proche de la réalité (plus objectif) lorsque l’on se base sur plusieurs points de vue avant de se faire une opinion ?
– Voici une liste d’idées reçues. Êtes-vous d’accord avec ces différentes affirmations ? Commentez-les et nuancez-les.
1) « L’Argentine est le pays du tango, tous les Argentins sont d’excellents danseurs ».
2) « Les Colombiens sont tous des dealers de coke ».
3) « Être saoul comme toute la Pologne ».
4) « Tous les Arabes sont musulmans ».
5) « Être fort comme un Turc ».
6) « Tous les musulmans sont islamistes ou terroristes ».
7) « Les Noirs ont le rythme dans la peau ».
8) « Tous les Belges mangent des frites ».
Où s’arrête la légitime affirmation de son identité et où commence l’empiètement sur les droits des autres ? C’est ce que à quoi nous essayerons de répondre par des analyses de situations particulières au cours de ce dossier.Voir notamment le chapitre III. 1.
Nous essayerons également de donner des pistes de solutions pour remettre en question nos comportements personnels et les systèmes politiques qui engendrent des inégalités. Pour rétablir un dialogue entre les différents groupes sociaux ou culturels, il faut accepter que chacun se situe au même niveau, quel que soit son appartenance à un groupe (sexe, culture, religion, classe sociale, parti politique, etc) et son apparence physique ou vestimentaire, afin de pouvoir échanger des points de vue, faire l’expérience de la culture et des idées des autres, accepter la critique mutuelle, parvenir à des accords ou des compromis et prendre des décisions communes.
Film
Cassette vidéo d’Amnesty International : Au nom des anonymes, reportage avec des témoignages de défenseurs des droits humains du monde entier.
Bibliographie
A. MAALOUF, Les identités meurtrières, Edition Poche, 2001.
M. ABDALLAH PRETECEILLE, Identité culturelle et stéréotype ou le stéréotype de l’identité culturelle, in Recherche, pédagogie et culture, 2ème trismestre, 1983.
L. CHAMBARD, Qui est l’étranger ? in Education et pédagogies, Editions Centre international d’études pédagogiques, Paris, mars 1993.
M. COHEN-EMERIQUE, Le choc culturel : méthodes de formation et outils de recherche, in Antipodes, juin 1999.
Activité pédagogique sur l’exclusion et les préjugés
Toi et moi
Activité basée sur l’étude de la diversité, de l’égalité et de la discrimination tout en développant un esprit de coopération et de participation.
Eurorail
Activité qui remet en question certains stéréotypes et préjugés à propos des autres et des minorités.
Vous pouvez trouver ces deux activités dans la valise pédagogique « La haine ? je dis non » du Mrax et de la Ligue des droits de l’Homme.
La montgolfière
Phase 1 : Rassembler les élèves par groupes de 9 maximum.
Phase 2 : Attribuer un rôle à chaque membre d’un groupe (une gitane, un handicapé, un bandit, un enfant malade, un clochard, un curé, un homosexuel, un banquier,... ).
Phase 3 : Lorsque chacun a un rôle différent, expliquer aux élèves qu’ils font un grand voyage en montgolfière... Cependant, la nacelle est trop lourde, alors quelqu’un doit se sacrifier et sauter de la montgolfière afin d’éviter une collision dans les montagnes. Qui doit sauter et pourquoi ?
À partir de quand devient-on raciste ?
Vous entendrez souvent des gens commencer une phrase par « Je ne suis pas raciste, mais quand même, je trouve que les Arabes / les musulmans / les juifs / les Flamands / les Américains... sont ainsi...
Pourquoi est-il dangereux d’utiliser des expressions comme « les Américains » ou « les musulmans » ?
Les Américains comme les musulmans forment une population très diversifiée. Tous les Américains ne partagent pas les idées de G.W. Bush (près de la moitié des citoyens ont voté contre lui aux dernières élections présidentielles). Enfin, il existe tant de façons de vivre l’islam qu’il est impossible d’englober les musulmans dans un groupe homogène. Les idées prônées par les Talibans en Afghanistan sont par exemple à l’extrême opposé de celles de l’imam de Marseille.
Action positive :
À la bibliothèque, n’empruntez pas un livre, mais une personne !
Afin de lutter contre les préjugés, une bibliothèque suédoise a proposé à ses lecteurs d’emprunter « un livre vivant« : imam, femme musulmane voilée, lesbienne, militant de la cause animale, journaliste, personne aveugle, femme Rom. Tous étaient « à louer » pour 45 minutes.
Résultat : beaucoup de gens ont pu changer leurs idées en discutant avec la personne qu’ils avaient rencontrée. Ce projet a permis à des personnes qui se côtoient sans jamais se parler de faire un premier pas vers l’autre, d’apprendre à le connaître.10
Débat
Pourriez-vous organiser ce type d’expérience dans votre école ? Comment feriez-vous pour contacter et choisir vos « livres vivants« ?
N’est-il pas non plus dangereux de penser mieux connaître un groupe (les homosexuels, les Roms, les musulmans...) sur base d’une petite conversation avec un seul membre de ce groupe ?
Le danger des messages simplistes et des appels à la haine
Dans les pays démocratiques, les autorités ne prônent en principe pas la violence à l’encontre d’un groupe déterminé. Il arrive pourtant que les langues dérapent. Voici quelques exemples de messages dangereux :
– Un ministre israélien d’extrême droite a qualifié les citoyens arabes d’Israël de serpents, et même pire, de vipères et propose de les anéantir, ces méchants, ces bandits, de leur tirer dessus avec des super-missiles.
– La télévision palestinienne diffuse des messages de haine à l’égard des citoyens juifs, glorifiant les kamikazes palestiniens morts lors d’attentats, martyrs et héros de la cause palestinienne. À l’inverse, ceux qui entretiennent des relations avec l’ennemi sont qualifiés de traîtres et méritent les pires châtiments.
– Yerouda, un ministre congolais, a appelé sur les ondes d’une radio ses compatriotes à lyncher les Tutsis, traités de cafards ou cancrelats.
n Berlusconi affirme que la civilisation occidentale est supérieure à celle de l’islam, qui serait restée 1500 ans en arrière.
– L’extrême droite belge, française ou danoise parle des immigrés comme des profiteurs, qui envahissent l’Europe et cherchent à « voler l’argent et le travail des Européens ».
– Certains imams intégristes prononcent régulièrement des « fatwas »11 contre des personnes accusées d’avoir manqué de respect à l’islam ou à la loi islamique.
– En juillet 2005, le Premier ministre de Lettonie a déclaré lors d’un entretien télévisé, qu’il ne pouvait « accepter que se déroule une manifestation de minorités sexuelles dans le cœur même de Riga, près de la cathédrale du Dôme. Ce serait inacceptable. La Lettonie est un État qui s’inspire de valeurs chrétiennes. Nous ne pouvons promouvoir de telles choses, inacceptables pour la majorité des personnes de notre société ».12
Question / Débat
Tous ces messages peuvent susciter des actes racistes, parfois allant jusqu’à l’assassinat. A qui profitent-ils ?
Trouvez d’autres exemples de messages racistes ou discriminatoires.
Comment éviter de telles phrases ? Faut-il interdire ce genre de propos, au risque de limiter la liberté d’expression ?
De tous les peuples de l’UE, les Belges seraient les plus racistes...
En Belgique, Amnesty dénonce plusieurs cas de brutalité policière envers des non Européens ou des Belges d’origine étrangère. Cela nous rappelle aussi que les Belges ont le triste privilège d’avoir été classés en tête d’un sondage européen sur le racisme.13 Et même si le racisme est devenu un délit dans notre pays, rares sont ceux qui osent porter plainte, de peur des représailles ou par crainte que cela ne serve à rien.
Quand la police devient raciste
« Les nègres, il faut les cogner d’abord, leur demander leur nom ensuite. »
Conseil qu’aurait donné un haut gradé de la police autrichienne à ses subordonnés lors d’un stage de formation (1999).
C’est arrivé près de chez vous...
Charles Otu, citoyen belge d’origine ghanéenne, a appris qu’il peut être dangereux de se faire contrôler par des policiers dans la capitale de l’Europe. Le 14 octobre 2000, à Bruxelles, deux gendarmes s’approchent de sa voiture à un feu rouge. Il leur présente son permis de conduire et ses papiers d’identité, mais refuse de leur donner ses clés de voiture. Il aurait alors été tiré hors de sa voiture, jeté au sol, menotté et puis frappé à coups de pied et à coups de matraque. Les deux gendarmes, rejoints par un policier, l’auraient de nouveau agressé sur un parking d’hôpital. Charles Otu a déclaré que deux gendarmes l’avaient encore frappé, sous les yeux de leurs collègues, après l’avoir emmené à la gendarmerie, et qu’il avait reçu un coup de pied si violent à l’abdomen qu’il n’avait pu retenir ses selles. Les traces de coups ont été confirmées par un certificat médical réalisé quelques heures après sa libération. Pour les gendarmes, tout est de la faute de Charles Otu : ils l’ont interpellé parce qu’ils l’avaient vu commettre une infraction au code de la route. Ils ont également affirmé qu’ils avaient pensé que cet homme était ivre, et l’ont accusé de s’être rebellé et d’avoir blessé plusieurs membres de la force publique en résistant à son arrestation...
Victime du racisme de la police aux E-U
ex : Le cas d’Amadou Diallo
« Je ne souhaite à aucune mère de subir cette douleur, perdre son fils de cette façon, voir les policiers responsables de sa mort innocentés par la justice et à la fin rendre la victime responsable de sa propre mort. »
La maman d’Amadou Diallo
Amadou Diallo est ce jeune africain de 24 ans, qui s’est fait contrôler par des policiers américains, tous blancs, le 4 février 1999. Le jeune homme, qui n’était pas armé, a mis la main dans sa poche pour prendre son portefeuille. La suite de l’histoire fut proprement horrible puisque les trois policiers ont tiré 41 fois (oui quarante et une fois !) sur ce jeune homme.
La culpabilité des policiers n’a pas été réellement reconnue par le tribunal et pour toute « sanction » ils ont été cantonnés à des tâches administratives.
La nouvelle municipalité de New York a signé un accord avec la famille d’Amadou Diallo, qui verra la famille toucher 3 millions de dollars. La mère d’Amadou Diallo a écrit un livre pour défendre la mémoire de son fils : « My heart will cross this ocean ».
Dans un interview au site internet grioo.com, elle explique que l’argent qu’elle a reçu est un soulagement, mais pas une satisfaction. Le fait aussi de recevoir des excuses de la part de la police new-yorkaise, de la ville de New York et du maire fut réconfortant, comme le fait que la ville de New York ait donné le nom de Amadou à la rue où il habitait.
La fondation Amadou Diallo inc, a été créée dans le but de lutter contre le racisme et de travailler pour améliorer les relations entre la police et les minorités, ainsi que pour soutenir les jeunes Africains désirant poursuivre leurs études aux E-U.
Pour plus de renseignements veuillez consulter www.amadoudiallo.com / www.amadoudiallofoundationinc.com