Écrire L’exécution d’un homme présentant des troubles mentaux a été programmée

L’exécution de Johnny Johnson, un homme de 45 ans diagnostiqué comme présentant de graves troubles mentaux, notamment des troubles schizophréniques et schizoaffectifs, a été programmée : les autorités ont prévu de l’exécuter dans le Missouri le 1er août 2023 pour le meurtre, en 2002, d’une petite fille de six ans.

Ses avocats ont présenté les conclusions d’un neuropsychiatre indiquant qu’il ne comprend pas de façon rationnelle pourquoi il est soumis à ce châtiment, car il est convaincu que Satan utilise l’État pour le faire exécuter afin d’amener la fin du monde.

Le droit international interdit l’exécution des personnes souffrant de graves troubles mentaux, notamment lorsqu’elles ont une moindre aptitude à comprendre les raisons de leur condamnation.

Pendant toute son enfance, Johnny Johnson a présenté des troubles du développement et il a pour la première fois été interné dans un hôpital psychiatrique à l’âge de 14 ans. Les évaluations qui ont été faites ont montré qu’il pensait au suicide depuis six mois. À 18 ans, il avait déjà été admis en soins psychiatriques à quatre reprises en raison d’idées suicidaires ou de tentatives de suicide. Les diagnostics réalisés à l’époque faisaient notamment état d’une grave dépression. En 1996, à 18 ans, il s’est volontairement fait admettre dans un établissement médical. Là, il a dit avoir eu une perte de conscience, entendu des voix et vu ses amis défunts l’inciter à se faire du mal. On lui a diagnostiqué une grave dépression et des troubles psychotiques.

Pendant les six années qui se sont écoulées entre l’anniversaire de ses 18 ans et le crime pour lequel il a été condamné à mort, ses admissions en soins psychiatriques se sont poursuivies, avec des diagnostics faisant notamment état de schizophrénie paranoïde et de troubles schizophréniques et aussi schizoaffectifs (symptômes évoquant la schizophrénie, avec des hallucinations et des états délirants, qui s’ajoutent à des troubles de l’humeur tels que l’état maniaque et la dépression), de troubles dépressifs majeurs, d’un fonctionnement intellectuel limité et d’une polytoxicomanie.

Début 2002, il a été diagnostiqué comme souffrant de schizophrénie paranoïde et intégré dans un programme de traitement de cet état ; en juin 2002, il ne s’est pas rendu à plusieurs rendez-vous avec le psychiatre. Il avait également des rendez-vous avec une assistante sociale, mais après le 28 juin 2002, il ne s’est plus rendu non plus à ces rendez-vous. Moins d’un mois plus tard, dans la matinée du 26 juillet 2002, une petite fille de six ans a disparu ; Johnny Johnson avait été aperçu en sa compagnie ce matin-là. Le jeune homme, alors âgé de 24 ans, a été arrêté, il a admis avoir tué la fillette et a dit à la police où elle trouverait le corps.

Pendant son incarcération à la suite de ce crime, Johnny Johnson a continué de présenter les mêmes symptômes que précédemment, notamment des hallucinations auditives et des épisodes paranoïaques, et il a été placé sous traitement médicamenteux et sous surveillance pour risque suicidaire. Un examen ordonné par un tribunal en novembre 2003 a conclu qu’il était apte à être jugé. On lui a diagnostiqué des troubles dépressifs majeurs, récurrents et graves, avec des caractéristiques psychotiques, en rémission partielle, une polytoxicomanie, un trouble de la personnalité antisociale et un fonctionnement intellectuel limité (avec un QI de 70). Un rapport de la prison datant de février 2004 indique : « Symptômes de psychose et de dépression. Est fréquemment en proie à des changements d’humeur, des sensations d’irréalité, des hallucinations auditives/visuelles et des sensations de paranoïa. »

Lors de son procès début 2005, l’accusation et les experts engagés par la défense ont estimé que Johnny Johnson souffrait de troubles schizoaffectifs. La défense a soutenu que sa capacité de se défendre était réduite, expliquant qu’en raison de son handicap mental il ne disposait pas des capacités de réflexion suffisantes pour faire face à une accusation d’homicide volontaire. L’accusation a affirmé qu’il avait la capacité de réfléchir, et son expert a dit que toutes les hallucinations qu’il pouvait avoir eues à l’époque étaient dues à une intoxication à la méthamphétamine, et non à un état psychotique. Johnny Johnson a été condamné à mort pour homicide volontaire et à la réclusion à perpétuité pour enlèvement et tentative de viol sur la fillette.

En prison, selon son dossier médical, les symptômes ont persisté, notamment ses hallucinations auditives, et il a souvent été placé sous surveillance pour risque suicidaire et sous traitement médicamenteux. En février 2023, un neuropsychiatre engagé par les avocats de Johnny Johnson a conclu qu’il n’était pas apte à être exécuté : « Monsieur Johnson a conscience qu’il se trouve dans le quartier des condamnés à mort et qu’il a été déclaré coupable de meurtre. Cependant, il ne comprend pas de façon rationnelle le lien entre le crime qu’il a commis et ce châtiment. [I]l est convaincu que Satan "utilise" l’État du Missouri pour le faire exécuter afin d’amener la fin du monde et que la voix de Satan lui a confirmé ce plan [...] Sa conviction qu’il peut modifier ce plan en allant dans la tête des juges et des avocats pour les inciter à ne pas l’exécuter est tout aussi irrationnelle et délirante, de même que sa conviction que les esprits de l’inframonde peuvent amener l’État à ne pas l’exécuter pour appliquer le plan de Satan. Il entretient des pensées délirantes au sujet de sa mort, et s’il admet qu’il "pense" qu’il mourrait des suites d’une injection létale, ses affirmations selon lesquelles il est un vampire et qu’il est capable de "réanimer" ses organes, et sa conviction qu’il peut pénétrer l’esprit d’un animal s’il peut apprendre le bon "code" afin de continuer à vivre après son exécution montrent qu’il ne comprend pas de façon rationnelle la finalité de son châtiment.

Monsieur Johnson présente toujours un état psychotique avancé malgré le traitement qu’il reçoit avec d’importantes doses appropriées de puissants médicaments antipsychotiques. Il souffre d’épisodes hallucinatoires et délirants invalidants […] Ce qu’il pense au sujet des raisons pour lesquelles il va être exécuté trouve son origine dans une pensée délirante, produit d’une grave maladie mentale psychotique et d’un cerveau atteint d’une déficience cognitive. »

L’État a produit une déclaration sous serment de la direction de la santé mentale du Centre pénitentiaire de Potosi, où se trouve le quartier des condamnés à mort, indiquant que Johnny Johnson « semble comprendre la nature de sa prochaine exécution ». Le 8 juin 2023, la Cour Suprême du Missouri a refusé de suspendre son exécution. Ses avocats s’efforcent d’obtenir une suspension et une audience devant une juridiction fédérale. L’État considère que l’exécution doit être autorisée, sans qu’ait lieu une nouvelle audience.

L’exécution d’une personne qui ne comprend pas de façon rationnelle la raison, ou la réalité, de son exécution viole la Constitution des États-Unis selon une décision rendue en 1986 par la Cour Suprême des États-Unis, qui a précisé en 2007 que « [L]e fait qu’un prisonnier ait conscience de la raison retenue par l’État pour l’exécuter n’est pas la même chose que le fait de comprendre cette raison de manière rationnelle ».

Le droit international relatif aux droits humains interdit le recours à la peine de mort contre les personnes atteintes de troubles mentaux (psychosociaux) ou de déficiences intellectuelles. Le Comité des droits de l’homme de l’ONU, qui est l’organe d’experts créé par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ratifié par les États-Unis en 1992) pour veiller à son application, a indiqué que les États parties doivent « s’abstenir d’exécuter des personnes qui ont une moindre aptitude à comprendre les raisons de leur condamnation ».

Treize exécutions ont eu lieu dans quatre États, aux États-Unis, depuis le début de l’année : cinq au Texas, quatre en Floride, trois dans le Missouri et une en Oklahoma. À eux quatre, ces États ont procédé à 57 % des exécutions enregistrées aux États-Unis depuis 1976.

Action terminée

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit