Écrire Sixième exécution de l’année programmée en Floride

Les autorités de la Floride ont prévu d’exécuter Michael Zack le 3 octobre 2023 pour un meurtre commis en 1996.

Âgé de 27 ans au moment du crime, il en a aujourd’hui 54. Lors de son procès, quatre experts médicaux appelés à témoigner pour la défense ont affirmé que, selon eux, il souffrait d’un syndrome de stress post-traumatique, d’un syndrome d’alcoolisation fœtale et d’une grave dépression.

Son diagnostic de syndrome d’alcoolisation fœtale et ses antécédents de « graves déficiences cognitives et adaptatives » ont conduit un spécialiste de cette pathologie à conclure qu’il s’était « toujours comporté comme une personne atteinte de déficience intellectuelle ».

La Constitution des États-Unis interdit l’exécution de personnes présentant une déficience intellectuelle.

Michael Zack a été inculpé pour agression sexuelle, vol et meurtre avec circonstances aggravantes commis à l’encontre d’une femme au domicile de celle-ci à Pensacola, en Floride, le 13 juin 1996. Son procès s’est ouvert en septembre 1997. Dans les affaires où l’accusé encourt la peine capitale, lors de la sélection du jury, la défense et l’accusation peuvent récuser un certain nombre de jurés potentiels, en exposant leurs motifs (récusation pour cause) ou non (récusation péremptoire). En 2015, afin d’expliquer pourquoi il considérait que la peine capitale était probablement désormais contraire à la Constitution, un juge de la Cour suprême des États-Unis a souligné qu’« aucune personne ne peut participer à un jury dans une affaire où l’accusé encourt la peine capitale si elle n’est pas prête à prononcer la peine de mort », et que des recherches menées au fil des décennies ont montré que les critères de sélection des jurés « orientent les jurys vers un verdict de culpabilité et une condamnation à mort ». Dans le cas de Michael Zack, le procureur a récusé sans explication deux femmes noires.

Accusé par la défense d’avoir un motif racial, le procureur a alors fourni des raisons pour ces récusations, à savoir que ces deux femmes étaient employées dans une institution de Pensacola qui « propos[ait] un soutien psychologique, des thérapies et des psychothérapies pour répondre à un large éventail de besoins en matière de santé psychologique au sein de la population ». Il a souligné que l’une de ces deux femmes avait « des connaissances concernant le syndrome de stress post-traumatique ». Étant donné que « de nombreux éléments de nature psychologique [allaient] être présentés pendant la phase du procès relative à la peine qui devrait être prononcée, et peut-être aussi pendant la phase devant permettre de déterminer la culpabilité ou l’innocence » de Michael Zack, le procureur n’était « pas à l’aise avec » l’idée que ces femmes fassent partie du jury. Le juge a accepté ces récusations.

Au cours de la phase du procès visant à déterminer la culpabilité ou l’innocence de Michael Zach, la défense a présenté des témoignages d’experts indiquant que ses troubles mentaux l’avaient rendu impulsif, dans un état permanent de détresse émotionnelle et incapable de développer l’intention nécessaire pour qualifier les faits de meurtre avec circonstances aggravantes. Le jury l’a néanmoins déclaré coupable de tous les chefs d’accusation. Lors de la phase consacrée à la détermination de la peine, quatre experts témoignant pour la défense ont affirmé qu’il souffrait d’un syndrome de stress post-traumatique, d’un syndrome d’alcoolisation fœtale, de dépression chronique et peut-être de lésions au cerveau, et qu’il avait l’âge mental et émotionnel d’un enfant de 10 ou 11 ans. Un expert appelé à témoigner pour l’accusation a convenu avec l’un d’eux que Michael Zack présentait un profil similaire à celui d’une personne atteinte de déficience intellectuelle.

Le jury a été informé que la mère de Michael Zack avait consommé régulièrement de grandes quantités d’alcool durant sa grossesse. Son beau-père lui a par ailleurs fait subir de nombreux sévices. Par exemple, lorsque Michael Zack mouillait ses draps, ce qu’il a fait chaque nuit de huit ans à 12 ans, il le punissait en le frappant, en utilisant une couverture électrique pour l’électrocuter ou en appliquant une cuiller chauffée sur sa langue ou son pénis. De plus, il « le jetait contre les murs et lui donnait des coups de pied avec des bottes à éperons » et aurait essayé de « le noyer », de « le renverser avec une voiture » et de l’« empoisonner ». Lorsqu’il avait trois ans, Michael Zack a été hospitalisé après avoir bu environ 300 ml de vodka. Il a « fait une overdose avec des drogues que [son beau-père] lui avait données » et celui-ci aurait aussi « menacé de lui tirer dessus et de le poignarder ». Cet homme l’aurait en outre agressé sexuellement. Lorsque Michael Zack avait 11 ans, sa mère a été tuée à l’aide d’une hache. À l’époque, le jeune garçon séjournait dans un hôpital psychiatrique. Placé par la suite dans des familles d’accueil, il aurait été victime de nouvelles agressions sexuelles. Le jury s’est prononcé en faveur d’une condamnation à mort par 11 voix contre une, et le 14 novembre 1997, le juge a suivi cette recommandation.

En 2016, dans l’affaire Hurst c. Floride, la Cour suprême des États-Unis a jugé anticonstitutionnelle la législation de la Floride, en raison du rôle uniquement consultatif accordé au jury dans le prononcé de la peine capitale, incompatible avec l’arrêt qu’elle avait rendu en 2002 dans l’affaire Ring c. Arizona. Elle avait alors estimé qu’en vertu de la Constitution, il incombait au jury, et non au juge, de tirer les conclusions justifiant une éventuelle condamnation à mort.

En octobre 2016, faisant suite à l’arrêt Hurst, la cour suprême de Floride a statué que les condamnations à mort ne pouvaient être adoptées que par un jury unanime et que cet État « faisait clairement figure d’exception » en n’appliquant pas ce principe. Cependant, en décembre 2016, la même cour suprême a décidé que l’arrêt Hurst ne s’appliquait rétroactivement qu’à environ la moitié des plus de 300 personnes qui se trouvaient alors dans le couloir de la mort – celles dont la condamnation n’avait pas encore été « finalisée » (c’est-à-dire confirmée à l’issue de la procédure d’appel directe automatique) à la date de l’arrêt Ring.

Un juge de cette instance, rendant un avis divergent, a estimé que l’arrêt Hurst devrait être appliqué dans tous les cas afin d’éviter tout caractère arbitraire. Un autre a accusé la majorité de rendre la protection constitutionnelle comparable « à une sorte de loterie ». La condamnation à mort de Michael Zack a été confirmée en octobre 2000, et en 2017 la cour suprême de Floride a jugé qu’il ne pouvait pas bénéficier de l’arrêt Hurst. Quelque 150 personnes ont obtenu réparation au titre de cet arrêt.

Le Comité des droits de l’homme des Nations unies, organe créé en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et chargé de surveiller le respect de ce traité, a déclaré au sujet de l’interdiction absolue de la privation arbitraire de la vie que la notion d’arbitraire devait être interprétée « de manière à intégrer le caractère inapproprié, l’injustice, le manque de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires ». L’application de l’arrêt Hurst par la cour suprême de Floride ne remplit pas ces conditions.

À l’exception d’un seul, tous les recours formés devant la justice fédérale par Michael Zack ont été rejetés pour défaut de procédure car l’avocat qui l’assistait à l’époque ignorait et a dépassé le délai d’un an pour déposer des requêtes au niveau fédéral. Le recours formé au motif qu’il présentait une déficience intellectuelle – le seul déposé dans les temps – a été rejeté sur le fond. Dans un nouveau recours formé devant une juridiction de Floride à la fin du mois d’août 2023, ses avocats évoquent « un consensus médical récent qui reconnaît que les personnes présentant un syndrome d’alcoolisation fœtale remplissent les critères fonctionnels de déficience intellectuelle » et affirment que, à ce titre, l’exécution de Michael Zack serait anticonstitutionnelle. Ils soulignent également qu’elle serait contraire à la Constitution car un membre du jury a voté contre sa condamnation à mort lors du procès.

Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine de mort. Depuis que la Cour suprême fédérale a approuvé les nouvelles lois relatives à la peine capitale en 1976, 1 575 personnes ont été exécutées aux États-Unis. Sur les 17 personnes exécutées dans le pays depuis le début de l’année 2023, cinq l’ont été en Floride, où 104 exécutions ont eu lieu depuis 1976. En avril 2023, le gouverneur de cet État, Ron DeSantis, a promulgué une loi autorisant à nouveau l’adoption d’une condamnation par un jury sans unanimité (division pouvant aller jusqu’à huit voix à quatre). Fervent partisan de la peine de mort, il a déclaré que la nouvelle législation permettrait « de rendre la justice comme il se doit dans l’État de Floride ».

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