« Depuis juillet 2017, le gouvernement saoudien multiplie les exécutions, avec une moyenne de cinq mises à mort par semaine. L’Arabie saoudite continue donc de compter parmi les pays du globe qui exécutent le plus grand nombre de condamnés », a déclaré Lynn Maalouf, directrice du travail de recherche pour Amnesty International au Moyen-Orient.
« Si les autorités saoudiennes ont réellement l’intention de procéder à des réformes, elles doivent immédiatement mettre en place un moratoire officiel sur les exécutions à titre de première étape en vue de l’abolition totale de la peine de mort. »
40 % des personnes exécutées depuis le début de l’année ont été condamnées à mort pour des infractions liées aux stupéfiants, qui n’entrent pas dans la catégorie des « crimes les plus graves ». Le recours à la peine capitale pour de telles infractions constitue une violation du droit international relatif aux droits humains.
Des procès inéquitables
En Arabie saoudite, un grand nombre des personnes condamnées à mort et exécutées ont été déclarées coupables à l’issue d’une procédure entachée de graves irrégularités, qui est loin de respecter les normes internationales en matière d’équité des procès. Elles sont souvent déclarées coupables uniquement sur la base d’« aveux » obtenus au moyen de la torture et d’autres mauvais traitements, privées d’un avocat et jugées lors d’un procès secret, et ne sont pas tenues informées de l’état d’avancement de la procédure judiciaire dans leur affaire.
Par exemple, le 13 septembre, Said al Saiari a été exécuté dans la ville de Najran, dans le sud-ouest de l’Arabie saoudite. Il a été déclaré coupable du meurtre d’un autre Saoudien par le tribunal qui avait pourtant conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir sa culpabilité dans cette affaire.
« Said al Saiari a été mis à mort malgré un manque de preuves à son encontre. Cela montre à quel point il est simple pour les autorités saoudiennes de recourir à ce châtiment inhumain et irréversible », a déclaré Lynn Maalouf.
La peine de mort instrumentalisée
« Les autorités saoudiennes utilisent la peine de mort pour étouffer la dissidence et mater les minorités, ce qui témoigne de leur indifférence à l’égard de la vie humaine.
Elles devraient immédiatement annuler ces peines et veiller à ce que tous les procès respectent les normes relatives à l’équité des procès et à ce que la peine de mort ne soit pas utilisée », a déclaré Lynn Maalouf.
Au moins 33 membres de la communauté chiite d’Arabie saoudite sont actuellement sous le coup d’une sentence capitale. Toutes ces personnes ont été accusées d’activités considérées comme dangereuses pour la sécurité nationale. Parmi elles se trouvent Ali al Nimr, Abdullah al Zaher et Dawood al Marhoon, qui ont été arrêtés pour des infractions qu’ils auraient commises alors qu’ils avaient moins de 18 ans, et qui ont affirmé qu’on les avait torturés dans le but de leur extorquer des « aveux ». Le mois dernier, la famille d’un autre jeune homme, Abdulkareem al Hawaj, a été informée par des représentants de l’appareil judiciaire que la Cour suprême avait confirmé la peine de mort prononcée contre lui pour des infractions liées à sa participation à des manifestations contre le gouvernement. Abdulkareem al Hawaj n’était âgé que de 16 ans quand il a participé à ces manifestations ; il a épuisé toutes les voies de recours dont il disposait et sera exécuté dès que le roi aura ratifié sa condamnation à mort. Les condamnés risquent tous d’être exécutés de façon imminente.
Le 11 juillet, Yussuf Ali al Mushaikhass a été exécuté en même temps que trois autres hommes chiites à Qatif, dans la province de l’Est, pour des infractions à la législation antiterroriste liées à leur participation à des manifestations contre le gouvernement entre 2011 et 2012. Ali al Mushaikass a été condamné à l’issue d’un procès manifestement inique, reposant en grande partie sur des « aveux » arrachés sous la torture.
Les proches des 14 hommes chiites accusés d’infractions liés à des manifestations et dont la peine de mort a été confirmée par la Cour suprême le 24 juillet vivent dans la crainte de recevoir à tout moment la nouvelle de leur exécution.
Complément d’information
L’Arabie saoudite a recours à la peine capitale pour un large éventail d’infractions qui ne font pas partie des « crimes les plus graves » définis par le droit international relatif aux droits humains, qui se limitent aux homicides avec préméditation.
L’Arabie saoudite est l’un des pays du monde qui recourent le plus aux exécutions ; plus de 2 000 personnes y ont été exécutées entre 1985 et 2016.
Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution.