Cambodge, les accusations d’espionnage doivent être abandonnées

Le second anniversaire de l’arrestation des anciens journalistes cambodgiens de Radio Free Asia (RFA) Uon Chhin et Yeang Sothearin approche.

« Deux années se sont écoulées depuis l’arrestation de ces deux courageux journalistes, et il est scandaleux de constater qu’ils font toujours l’objet d’une enquête malgré l’absence totale de preuves crédibles à leur encontre. Ces deux journalistes sont victimes d’une flagrante injustice, l’objectif visé est manifestement d’étouffer la liberté d’expression, et il s’agit de toute évidence d’un avertissement visant tous les journalistes indépendants qui travaillent encore au Cambodge, a déclaré Nicholas Bequelin, directeur régional pour l’Asie de l’Est et du Sud-Est à Amnesty International.

« Les autorités cambodgiennes affirment souvent que le grand nombre de médias présents au Cambodge est une preuve de la liberté d’expression, mais cette enquête démontre que cela est faux. Au Cambodge, les journalistes qui soutiennent le gouvernement sont récompensés, mais les médias indépendants sont décimés depuis quelques années. Les autorités semblent vouloir maintenir cet état de fait, alors qu’elles devraient remédier aux dégâts qui ont été causés.

« Les autorités cambodgiennes doivent immédiatement abandonner les accusations forgées de toutes pièces retenues contre Uon Chhin et Yeang Sothearin, et prendre d’autres mesures correctives pour rétablir les libertés des médias au Cambodge. Il faut mettre fin au climat de peur et d’autocensure créé par les autorités.  »

Complément d’information

Yeang Sothearin et Uon Chhin ont été arrêtés le 14 novembre 2017 et incarcérés dans la prison de Prey Sar. Ils ont été inculpés de façon provisoire quatre jours plus tard de « fourniture à un État étranger d’informations portant préjudice à la défense nationale », au titre de l’article 445 du Code pénal cambodgien. En mars 2018, ils ont aussi été inculpés de « production de matériel pornographique » au titre de l’article 39 de la Loi sur la suppression de la traite des êtres humains et de l’exploitation sexuelle.

Compte tenu des différentes charges pesant sur eux, ils risquent chacun d’être condamnés à une peine pouvant aller jusqu’à 16 ans d’emprisonnement.

Alors que le verdict devait être annoncé le 3 octobre 2019, le juge a décidé de renvoyer l’affaire devant un juge d’instruction pour une nouvelle enquête.
Le 21 août 2018, les deux hommes, qui étaient incarcérés dans la prison de Prey Sar, ont été libérés sous caution après plus de neuf mois de détention provisoire ; ils restent toutefois placés sous contrôle judiciaire.

Depuis 2017, les autorités cambodgiennes exercent une dure répression contre les médias qui sont indépendants et qui les critiquent. Les activités de médias de langue khmère les critiquant ouvertement ont été fortement restreintes, notamment avec la fermeture de 32 stations de radio relayant des émissions de RFA, de Voice of America (VOA) et de Voice of Democracy (VOD).

RFA a fermé son bureau au Cambodge en septembre 2017, expliquant que cette décision a été motivée par un climat de répression et un harcèlement persistant de ses journalistes.

La vente, en mai 2018, du Phnom Penh Post – qui était au Cambodge le dernier journal indépendant paraissant en anglais et en khmer – à des intérêts économiques liés au Premier ministre Hun Sen a porté un dur coup à la liberté de la presse dans le pays. Elle est intervenue à la suite de la fermeture forcée du Cambodia Daily, ouvertement critique à l’égard des autorités, en septembre 2017.

Le ministère cambodgien de l’Information a engagé plusieurs centaines de conseillers supplémentaires en 2019, y compris de nombreux journalistes et responsables de publication travaillant pour des médias cambodgiens de premier plan.

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