Montréal, le 25 mars 2020 – Amnistie internationale appelle le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que les municipalités à créer des comités de surveillance chargés de suivre les impacts sur les droits humains des décisions, des politiques et des lois adoptées pour répondre à la pandémie de COVID-19.
« La gravité de la situation et l’urgence d’agir ne justifient pas que les droits humains soient bafoués indûment, ni que les gouvernements s’arrogent des pouvoirs illégitimes ni ne s’acquittent de leur devoir de protéger les droits humains, mais c’est malheureusement ce qui arrive souvent en période de crise », rappelle France-Isabelle Langlois, directrice générale d’Amnistie internationale Canada francophone.
« En prenant les devants maintenant pour mettre en place une surveillance efficace, les gouvernements ont une occasion unique de s’assurer que les questions de droits humains soient anticipées, identifiées et atténuées dès le départ ».
Amnistie internationale recommande la mise en place de Comités de surveillance des droits humains, composés d’experts de différents secteurs et reflétant les différentes communautés les plus vulnérables aux violations des droits humains. Ils pourraient inclure des représentantes et représentants des commissions des droits humains des paliers de gouvernement fédéral, provinciaux et territoriaux, des organisations des peuples autochtones, de la société civile et du milieu universitaire. Ces comités auraient le mandat de fournir des avis rapides et immédiats aux divers gouvernements du pays quant à l’impact sur les droits humains des décisions qui doivent être prises, ainsi que des recommandations sur certains enjeux de droits humains liés à la COVID-19 sur lesquels il faudrait intervenir. Ces Comités produiraient des rapports publics sur une base régulière.
Cette recommandation fait partie des 10 principes directeurs en matière de droits humains qu’Amnistie internationale demande à tous les paliers de gouvernement du pays - fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux – d’intégrer à leurs réponses à l’épidémie de COVID-19.
Ce cadre de référence appelle les gouvernements à traiter et à répondre à la COVID-19 comme une obligation de droits humains, et à limiter strictement toutes mesures qui pourraient restreindre d’autres droits humains. Les gouvernements devraient aussi reconnaître que le virus lui-même, ainsi que les restrictions adoptées pour en contenir la transmission, peuvent causer des torts particuliers aux communautés qui subissent déjà, et de manière disproportionnée, des violations de leurs droits humains. Pensons aux communautés autochtones, aux personnes qui sont victimes de violence d’un partenaire ou au sein de la famille, aux femmes obligées de quitter leur travail pour prendre soin de leur famille, aux personnes vivant dans des logements inadéquats, aux travailleuses et travailleurs à statut précaire, aux personnes en situation de handicap, aux demandeurs d’asile et aux personnes en prison ou dans des centres de détention de l’immigration. Il est essentiel par ailleurs que toutes les facettes de la réponse à la COVID-19 fassent l’objet d’une analyse de genre intersectionnelle.
Consultez le document complet de ce cadre de référence pour les droits humains.
« Dans tout le pays, les gouvernements répondent à cette crise sanitaire sans précédent par de vastes campagnes de santé publique, mais aussi par des restrictions de nos droits, dont la liberté de mouvement et d’interaction sociale, et plusieurs de ces mesures sont dans l’ensemble respectueuses des normes de droits humains. Cependant, elles ne sont explicitement fondées sur une approche de droits humains, et risquent donc d’amener les gouvernements à enfreindre leurs obligations en matière de droits humains, si nous ne demeurons pas vigilants », ajoute France-Isabelle Langlois, directrice d’Amnistie internationale Canada, section francophone
« La conclusion est très simple : les droits humains se doivent d’être au cœur de la réponse du Canada à la COVID-19 ».