« Depuis plusieurs jours, des militants et avocats défendant les droits des femmes à travers le monde protestent contre le fait que le président de la Cour suprême indienne a été “blanchi” alors que les règles élémentaires visant à garantir la justice n’ont pas été suivies. Une commission d’enquête indépendante et impartiale est un prérequis pour parvenir à une décision équitable. La Cour suprême a créé un dangereux précédent en contournant les garanties légales élémentaires, vraisemblablement dans le but de se protéger elle-même », a déclaré Asmita Basu, directrice des programmes à Amnesty International Inde.
Le 19 avril 2019, une femme ayant travaillé comme assistante au sein de la Cour suprême indienne a adressé un courrier à 22 juges de cette instance pour leur signaler qu’elle avait été victime de harcèlement sexuel aux mains du président de la Cour, Ranjan Gogoi. D’après sa lettre, les faits se seraient produits dans le bureau du magistrat les 10 et 11 octobre 2018.
Au lieu de traiter ces allégations, le président de la Cour suprême a désigné une commission spéciale pour examiner les préoccupations relatives à l’« indépendance de la justice ». Selon des informations publiées dans les médias, il aurait affirmé que la victime faisait l’objet d’une « enquête judiciaire en cours » et que ses allégations faisaient partie d’un complot plus vaste visant à attaquer l’indépendance de la justice.
« La loi sur le harcèlement sexuel dispose clairement que les employeurs doivent faire tout leur possible pour aider les personnes qui se disent harcelées. En rejetant ses demandes, la Cour suprême a manqué à ce devoir essentiel. »
Par la suite, la plainte a été transmise à une commission interne constituée de trois juges de la Cour suprême : Sharad Arvind Bobde, Indira Banjeree et Indu Malhotra. La commission ne comptait aucun membre extérieur, contrairement aux dispositions de la loi de 2013 sur le harcèlement sexuel au travail. Les demandes de la victime en vue d’obtenir la présence de son avocat et le suivi des informations sur la procédure ont été rejetées, ce qui l’a conduite à se retirer de la procédure. Cependant, la procédure a continué sans elle et le président de la Cour suprême indienne a été blanchi quelques jours après. La commission a en outre refusé de lui remettre un exemplaire de son rapport.
« La loi sur le harcèlement sexuel dispose clairement que les employeurs doivent faire tout leur possible pour aider les personnes qui se disent harcelées. En rejetant ses demandes, la Cour suprême a manqué à ce devoir essentiel, a déclaré Asmita Basu. Ce précédent créé par la plus haute juridiction du pays aura certainement des conséquences négatives sur toutes les affaires de harcèlement sexuel. Il constitue un important recul par rapport aux avancées gagnées de haute lutte par le mouvement féministe pour renforcer les lois contre la violence à l’égard des femmes. »