« La spirale de violence étatique n’est pas arrivée à sa fin au Nicaragua. Au lieu de prendre toutes les mesures pour faire en sorte que la violence cesse, les autorités continuent d’instaurer un climat de peur dans le cadre duquel toute tentative d’exercer son droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique est réprimée », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
« Une fois de plus, le gouvernement du président Daniel Ortega a répondu par un déploiement policier excessif destiné uniquement à intimider, effrayer et empêcher l’exercice des droits humains. »
Au cours de la semaine dernière, Amnesty International a reçu de nombreuses informations faisant état de détentions arbitraires, d’entraves à l’exercice de la liberté d’expression et de harcèlement de journalistes.
Dans ce contexte, Yader Parajón, un jeune militant dont le frère a été tué lors des manifestations, a été violemment arrêté le 16 avril. Yader Parajón a déclaré à Amnesty International que des policiers l’avaient arrêté alors qu’il marchait près de chez lui et l’avaient conduit à un commissariat. Selon ses déclarations, il a été maintenu en détention pendant six jours, au cours desquels il n’a pas eu accès à une assistance juridique, n’a pas pu informer sa famille de sa détention ou voir ses proches et n’a jamais été informé du motif de sa détention.
D’après les informations d’Amnesty International, le 17 avril, dans le cadre d’une marche pacifique citoyenne organisée la veille du premier anniversaire du début de la crise, la police a été largement déployée dans la ville de Managua et à d’autres points du trajet de la marche. De plus, des policiers ont encerclé le point de rencontre principal de la manifestation et les environs, empêchant le début du défilé et entravant temporairement la sortie des personnes qui s’y trouvaient.
Un militant a déclaré à Amnesty International qu’il avait vu la police utiliser des grenades incapacitantes et lacrymogènes pour disperser un groupe de personnes manifestant à proximité du point de rencontre de la marche.
Des dizaines de manifestant·e·s et un journaliste ont été arrêtés. De plus, des informations ont fait état d’intimidations de la part de groupes armés progouvernementaux circulant dans la zone de la manifestation à bord de motos et de camionnettes.
De son côté, la Police nationale a violemment interrompu des célébrations religieuses publiques le 19 avril. Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles la police a intimidé les personnes participant à la célébration religieuse du chemin de croix.
De nombreuses personnes ont notamment dû renoncer à participer à la célébration religieuse dans la ville de Tipitapa, face à la présence de nombreux policiers qui prenaient des photos et des vidéos de certains fidèles. Le même jour, d’après les informations disponibles, plusieurs centaines de personnes participant au chemin de croix à Managua se sont réfugiées dans la cathédrale lorsque la police a encerclé la zone.
« À l’occasion du premier anniversaire du début des manifestations, le gouvernement du président Daniel Ortega avait l’occasion de montrer à la population du Nicaragua et à la communauté internationale que ses engagements en matière de droits humains étaient plus qu’un discours répété autour d’une table de négociations et dans les forums internationaux », a déclaré Erika Guevara Rosas.
« Malheureusement, les autorités ont démontré que, loin d’assurer la justice, la vérité et les réparations, leur stratégie de sortie de crise passait par la répression de toute forme de protestation et de dissidence et par des tentatives de museler les médias indépendants. L’engagement supposé du gouvernement à trouver une solution à la crise des droits humains dans le pays doit se refléter dans les rues du Nicaragua. »
Pour en savoir plus :
Nicaragua : Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies prend une mesure importante pour remédier à la crise des droits humains (nouvelle, 21 mars 2019)
Sembrando el terror : De la letalidad a la persecución en Nicaragua (rapport, 18 octobre 2018)