C’est ce qu’a révélé Amnesty International le 4 février 2020 dans le nouveau rapport intitulé In search of safety : Peru turns its back on people fleeing Venezuela.
Les demandeurs et demandeuses d’asile vénézuéliens qui essaient d’accéder au territoire péruvien par la frontière du pays avec l’Équateur sont renvoyés, bien que ces personnes semblent remplir tous les critères concernant la protection internationale. Le Pérou refuse même l’entrée aux Vénézuéliens et Vénézuéliennes se trouvant très manifestement en situation de vulnérabilité, y compris les personnes âgées et les mineurs non accompagnés.
« Ces dernières années, le Pérou a été un exemple de solidarité et de refuge sûr. Au lieu d’adopter des politiques restrictives, le pays doit continuer de se positionner en chef de file et d’accueillir les ressortissants vénézuéliens, conformément aux obligations nationales et internationales qui lui incombent en matière de protection des personnes fuyant la famine et la violence au Venezuela », a déclaré Marina Navarro, directrice exécutive d’Amnesty International Pérou.
Depuis juin 2019, le Pérou a adopté une série de mesures visant délibérément à restreindre l’entrée sur le territoire. Le nouveau « visa humanitaire » a été rendu obsolète à peine quelques semaines après sa création, puisque sans tampon d’entrée et de sortie du territoire équatorien, les Vénézuéliens ne sont pas autorisés à entrer au Pérou, qu’ils aient obtenu le visa ou pas.
Amnesty International s’est entretenue avec de nombreuses personnes vénézuéliennes qui étaient bloquées à la frontière après le rejet de leur demande d’asile ou de leur visa humanitaire. Un homme a déclaré avoir quitté le Venezuela en octobre 2019 car il ne pouvait plus nourrir sa famille. Bien qu’il ait présenté un visa humanitaire péruvien valide, les autorités ne l’ont pas laissé entrer sur le territoire. Abandonné à l’incertitude à la frontière, il s’est mis à pleurer lorsqu’il a expliqué qu’il avait accumulé les dettes et laissé sa famille au Venezuela avec l’idée de la retrouver plus tard au Pérou.
Après plusieurs années d’une crise sans précédent au Venezuela, des millions de personnes luttent pour survivre et n’arrivent pas à subvenir à leurs besoins les plus élémentaires en matière d’alimentation, d’eau et de santé, tout en vivant sous la menace permanente de la politique de répression de Nicolas Maduro visant quiconque exprime son mécontentement. Près de 4,8 millions de personnes ont fui le pays ces dernières années. Le Pérou accueille le plus grand nombre de demandeurs et demandeuses d’asile originaires du Venezuela au monde (377 047 au total) et plus de 800 000 Vénézuéliens et Vénézuéliennes au total vivent dans le pays. La majorité des ressortissants vénézuéliens fuyant leur pays sont des réfugiés et ont droit à une protection internationale au titre soit de la Convention internationale relative au statut des réfugiés, soit de la Déclaration de Carthagène.
« Tant que les conditions de vie continuent de se détériorer et que les atteintes systématiques aux droits humains se poursuivent au Venezuela, les États doivent protéger les personnes fuyant la crise et cherchant un lieu sûr où elles pourront reconstruire leur vie », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques à Amnesty International.
Le rapport d’Amnesty International est basé sur des dizaines d’entretiens menés au Pérou et à la frontière entre l’Équateur et le Pérou. Bien que fuyant les persécutions et les atteintes massives aux droits humains, deux cirières pour la protection internationale reconnus par la loi péruvienne, la plupart des Vénézuéliens et Vénézuéliennes avec qui Amnesty International s’est entretenue ont vu leurs demandes rejetées ou se sont vu refuser l’entrée sur le territoire alors même qu’ils avaient un visa humanitaire.
« Le Pérou semble revenir sur son approche humaine adoptée précédemment vis-à-vis des Vénézuéliens en quête de protection. Les modifications des pratiques et des procédures en matière d’asile à la frontière avec l’Équateur semblent s’apparenter à une politique délibérée et illégale de renvoi des personnes arrivant du Venezuela », a déclaré Erika Guevara-Rosas.
Amnesty International appelle le gouvernement péruvien à continuer de se placer en chef de file et de protéger le droit de solliciter l’asile, conformément à ses obligations nationales, régionales et internationales en matière de droits humains. Dans le même temps, les autres pays, y compris ceux ne se situant pas dans cette zone géographique, doivent partager la responsabilité envers les réfugié·e·s originaires du Venezuela en augmentant leur assistance financière et technique au Pérou et aux autres pays d’accueil.