Philippines : Le mandat d’arrêt contre Maria Ressa témoigne de la volonté des autorités d’accélérer l’affaire

En réaction au mandat d’arrêt décerné à l’encontre de Maria Ressa et à son arrestation dans les locaux de Rappler le 13 février 2019, pour « diffamation en ligne » :

« Quelques jours seulement après que le Bureau national d’investigation a annoncé qu’il allait inculper Maria Ressa de diffamation en ligne, un mandat d’arrêt a été décerné à son encontre et appliqué le 13 février. Amnesty International Philippines condamne son arrestation fondée sur cette accusation forgée de toutes pièces. Elle est clairement motivée par des considérations politiques et fait suite aux menaces et aux actes répétés visant Maria Ressa et son équipe. Les autorités doivent mettre fin à cette campagne de harcèlement, abandonner les accusations et abroger la loi répressive sur laquelle elles s’appuient, a déclaré Butch Olano, responsable d’Amnesty International Philippines.

« Dans un pays où il faut des années pour obtenir justice, force est de constater que Maria Ressa est inculpée en grande hâte et que la loi sert à intimider et harceler sans relâche les journalistes parce qu’ils font leur travail, à savoir révéler la vérité. »

Complément d’information

Le 29 mai 2012, Rappler a publié un article de l’ancien reporter Reynaldo Santos Jr., selon lequel un véhicule utilisé par le président de la Cour suprême de l’époque, Renato Corona, au cours de la procédure de destitution à son encontre, appartenait à un homme d’affaires, Wilfredo Keng, soupçonné de liens avec des réseaux de traite des êtres humains et de contrebande de drogue.

Le 10 janvier 2018, Wilfredo Keng a déposé une plainte pour « diffamation en ligne » contre Reynaldo Santos Jr., Maria Ressa et six membres du conseil d’administration de Rappler au titre de la Loi de 2012 relative à la prévention de la cybercriminalité. Le Bureau national d’investigation a par la suite rejeté la plainte au motif que l’article était antérieur à la promulgation de cette loi.

Dans une décision de janvier 2019 obtenue par Rappler cette semaine, le ministère de la Justice a renouvelé ses accusations contre Maria Ressa et Reynaldo Santos Jr., ainsi que contre Rappler Inc., au motif que l’article de presse avait été mis à jour en février 2014 et pouvait par conséquent faire l’objet de poursuites.

Maria Ressa et Rappler Inc. font déjà face à des poursuites pour fraude fiscale, dont Amnesty International a dénoncé les motivations politiques. L’organe de presse Rappler critique régulièrement le président Rodrigo Duterte et son gouvernement, et a publié des enquêtes détaillées sur certaines des milliers d’exécutions extrajudiciaires commises par la police et des personnes armées non identifiées dans le cadre des opérations liées à la lutte contre les stupéfiants.

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