THAILANDE. L’obligation de rendre des comptes doit prévaloir durant la crise politique

Déclaration publique

ÉFAI- 19 avril 2010

Toutes les parties prenantes au conflit politique qui s’étend en Thaïlande doivent immédiatement s’engager à mettre un terme aux atteintes aux droits humains, a déclaré Amnesty International ce lundi 19 avril. Amnesty International salue l’engagement du gouvernement thaïlandais à enquêter dans les plus brefs délais,de manière efficace et impartiale sur les récents actes de violence et lui demande instamment d’établir les responsabilités pour les violations commises par les forces de sécurité et les atteintes aux droits humains perpétrées par des manifestants violents.

Dans la soirée du samedi 10 avril, l’armée thaïlandaise a tenté de disperser les manifestants du Front uni pour la démocratie et contre la dictature (UDD) rassemblés dans la vieille ville de Bangkok, provoquant la mort d’au moins 25 personnes (18 manifestants, un journaliste étranger et six membres des forces de sécurité). Au moins 840 personnes ont été blessées. L’armée a eu recours à la force meurtrière au cours de ses opérations, certains parmi les manifestants se sont également servis de pistolets et de grenades, ainsi que d’autres armes improvisées. Cent trente-quatre personnes sont toujours hospitalisées, dont six en soins intensifs après ces violences.

Amnesty International reconnaît que le gouvernement thaïlandais a pour obligation de protéger la vie et le bien-être de sa population et qu’il doit notamment faire preuve de toute la diligence requise en prenant des mesures visant à prévenir les atteintes portées aux droits fondamentaux par des agents non gouvernementaux.

Amnesty International souligne également que le droit à la liberté de réunion ne protège que les réunions pacifiques et que tous ceux qui se rendent coupables d’atteintes aux droits humains peuvent être amenés à répondre de leurs actes. Les dirigeants politiques de l’opposition – y compris l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, allié de l’UDD – doivent s’engager publiquement à mettre un terme aux atteintes aux droits humains et demander à leurs partisans de s’abstenir de tout nouvel acte de violence contre leurs opposants politiques.

Les forces thaïlandaises de sécurité doivent respecter les principes internationaux relatifs à la dispersion des foules et au recours à la force. Selon le Principe 14 des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois : « Les responsables de l’application des lois ne peuvent utiliser des armes à feu pour disperser les rassemblements violents que s’il n’est pas possible d’avoir recours à des moyens moins dangereux, et seulement dans les limites du minimum nécessaire. Les responsables de l’application des lois ne doivent pas utiliser d’armes à feu en pareils cas, sauf dans les conditions stipulées dans le principe 9. »

Le Principe 9 précise par ailleurs « Les responsables de l’application des lois ne doivent pas faire usage d’armes à feu contre des personnes, sauf en cas de légitime défense ou pour défendre des tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave, ou pour prévenir une infraction particulièrement grave mettant sérieusement en danger des vies humaines, ou pour procéder à l’arrestation d’une personne présentant un tel risque et résistant à leur autorité, ou l’empêcher de s’échapper, et seulement lorsque des mesures moins extrêmes sont insuffisantes pour atteindre ces objectifs. Quoi qu’il en soit, ils ne recourront intentionnellement à l’usage meurtrier d’armes à feu que si cela est absolument inévitable pour protéger des vies humaines. »

Complément d’information

La plupart des membres et des factions de l’UDD, communément désignés comme les « Chemises rouges » en raison de la couleur de leur vêtement, sont des partisans de l’ancien Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra, renversé par un coup d’État en 2006. Thaksin Shinawatra, actuellement en exil volontaire, doit répondre de nombreuses allégations d’atteintes graves aux droits humains.

L’UDD manifeste à Bangkok depuis le 12 mars pour réclamer la dissolution du parlement, de nouvelles élections et, depuis le 10 avril, la démission et le départ en exil du Premier ministre Abhisit Vejjajiva.

Le 18 avril, l’Alliance du peuple pour la démocratie (PAD), qui s’oppose à l’UDD, a lancé un ultimatum de sept jours au gouvernement pour qu’il fasse « appliquer la loi » - ce qui peut être interprété comme un appel à disperser les Chemises rouges – avant de commencer aussi à manifester. En cas de manifestation, la PAD devra éviter toute atteinte aux droits humains. La PAD, ou mouvement des « Chemises jaunes », a été fondée en 2006 en opposition à Thaksin Shinawatra. Les Chemises jaunes ont été impliquées dans des manifestations de masse en 2008, notamment l’occupation des deux aéroports de Bangkok, contre deux gouvernements successifs pro-Thaksin.

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