Ces exactions se retrouvent dans une synthèse publiée par Amnesty International publiée le 10 juillet 2018. Intitulé Breaking away from the past : A human rights manifesto for Zimbabwe’s political parties and candidates, ce document propose sept recommandations relatives aux droits humains destinées aux candidats et aux partis politiques engagés dans la bataille pour diriger le Zimbabwe lors de l’élection du 30 juillet.
« Ce sont les premières élections organisées au Zimbabwe sans que l’ancien président Robert Mugabe ne soit candidat et il est temps pour le pays de rompre avec des décennies de violations flagrantes des droits humains. Sous le régime de Robert Mugabe, les périodes électorales étaient marquées par des homicides, des disparitions et des arrestations, a déclaré Muleya Mwananyanda, directrice adjointe d’Amnesty International pour l’Afrique australe.
« Robert Mugabe s’étant retiré, le Zimbabwe a une vraie chance de prendre un nouveau départ et de rompre avec son passé, en veillant à ce que les droits humains soient pleinement respectés dans le cadre des élections et au-delà. »
L’ancien président Robert Mugabe a imposé un système répressif durant 37 ans, contraignant des millions de Zimbabwéens à fuir le pays en quête d’une vie meilleure.
Par le passé, les élections ont été marquées par des violations des droits humains, certaines ayant été recensées par Amnesty International et des observateurs électoraux. Plus de 200 personnes ont été tuées durant l’élection de 2008 dans le cadre des violences contre les opposants.
Lors des violences cautionnées par l’État qui ont débuté en 1984 – l’opération Gukurahundi – environ 20 000 personnes ont été tuées et beaucoup ont « disparu ».
Disparitions forcées, torture et assassinats politiques
Le régime de Robert Mugabe a été marqué par la répression brutale visant les défenseurs des droits humains. Le journaliste et militant pro-démocratie Itai Dzamara a été victime d’une disparition forcée le 9 mars 2015. Il avait réclamé la démission du président, pour non-respect des droits humains et mauvaise gestion de l’économie. Les autorités n’ont pas réellement cherché à enquêter sur le sort qui lui a été réservé ni à élucider cette affaire.
Le journaliste et militant pro-démocratie Itai Dzamara a été victime d’une disparition forcée le 9 mars 2015. Il avait réclamé la démission du président, pour non-respect des droits humains et mauvaise gestion de l’économie.
Parmi les autres militants enlevés, tués ou qui ont « disparu » pour des motifs politiques, figurent Paul Chizuze, Tonderai Ndira, Patrick Nabanyama, Cain Nkala, Talent Mabika, Richard Chiminya et Better Chokururama, Jestina Mukoko, Justin Mutendadzamera, Hilda Mutendadzamera, Remember Moyo et Gilbert Moyo.
D’autres, comme Felix Mazava et Gabriel Shumba, ont été enlevés ou torturés avant d’être libérés.
Impunité pour les violations des droits humains imputables aux forces de sécurité
Depuis 2000, Amnesty International recense les cas de recours excessif à la force par les forces de sécurité. Les hauts responsables de la police nationale du Zimbabwe ne dénoncent pas certains actes commis par des policiers qui constituent des violations des droits humains, en particulier les passages à tabac, la torture et les autres mauvais traitements infligés à des personnes en garde à vue dans les postes de police. En mettant à profit les récents changements de direction au sein de la police nationale, il faut rompre avec l’impunité du passé.
Droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique
Par le passé, la police a invoqué la Loi relative à l’ordre public et à la sécurité, formulée en termes vagues, pour empêcher les opposants politiques et les organisations de la société civile d’organiser des réunions afin de débattre de préoccupations relatives aux droits humains et à la gouvernance. La police a régulièrement utilisé la Loi relative à l’ordre public et à la sécurité, la Loi relative à l’accès à l’information et à la protection de la vie privée, et la Loi relative à la codification et à la réforme du droit pénal, pour priver les opposants présumés du gouvernement de leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, notamment en usant d’une force excessive pour disperser les rassemblements pacifiques.
Par le passé, la police a invoqué la Loi relative à l’ordre public et à la sécurité, formulée en termes vagues, pour empêcher les opposants politiques et les organisations de la société civile d’organiser des réunions afin de débattre de préoccupations relatives aux droits humains et à la gouvernance.
Dans sa synthèse, Amnesty International met en avant d’autres questions relatives aux droits humains, notamment les expulsions forcées restées sans solution, dont l’opération Murambatsvina (Rétablir l’ordre) de 2005 qui a causé le déplacement de plus de 700 000 personnes, et la nécessité pour les responsables politiques d’accorder la priorité aux droits à la santé des femmes et des filles.
« Le Zimbabwe ne pourra devenir un pays prospère que lorsque les droits humains et l’état de droit seront les principes directeurs clés de la société. Tant que ce ne sera pas le cas, le pays sera floué de son réel potentiel, a déclaré Muleya Mwananyanda.
« Les Zimbabwéens méritent mieux. Tous les responsables politiques doivent s’engager publiquement à lutter contre l’impunité pour les violations et à donner la priorité aux droits humains. »
Complément d’information
Le 30 juillet 2018, le Zimbabwe organisera ses élections nationales – élections présidentielle, législatives et locales.
Ce scrutin sera le premier dans lequel l’ancien président Robert Mugabe ne sera pas candidat depuis l’indépendance du pays vis-à-vis de la Grande-Bretagne en 1980. Il a en effet démissionné le 21 novembre 2017, après 37 ans au pouvoir.