Alors que la Belgique est présente à la COP30, la crise climatique se rappelle constamment à elle. Dernier événement en date, le « super-typhon » qui vient de déferler sur les Philippines. Amplifié par le dérèglement climatique, il a dévasté l’île, tuant 200 personnes. Derrière les chiffres, des vies. Cette COP de la vérité est aussi une COP de la réalité, elle ne peut se permettre un échec.
L’inaction des gouvernements et notre dépendance aux énergies fossiles est responsable de cette catastrophe. C’est pourquoi la Belgique doit tout faire pour en sortir et pousser les autres Etats à faire de même. Pourtant, à Belém, seulement 113 pays ont soumis un plan pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2035. Au regard des chiffres, le fossé se creuse entre les mesures promises (-12 %) versus les mesures indispensables (-60 %), nous éloignant de l’objectif que nous nous étions collectivement fixé il y a 10 ans à Paris.
Une obligation de réussite pour tous
Les jeux ne sont pas faits et les cartes peuvent être rebattues à condition que lors de la seconde semaine de la COP30, les ministres travaillent de concert à préserver la possibilité d’un monde meilleur. Réellement sortir des énergies fossiles, promouvoir une transition juste pour tous et enfin débloquer les financements pour l’adaptation dans les pays du Sud. C’est une liste non exhaustive des leviers que les ministres wallon et fédéral du climat pourront actionner pour transformer ce sommet en succès.
En arrivant cette semaine à la COP30, nos ministres pourront démontrer, ou non, que la Belgique est prête à faire beaucoup mieux que ces dernières semaines. Lors des ultimes négociations sur l’objectif climatique européen pour 2040, les ministres belges du Climat ont choisi de se ranger du même côté que la Pologne et la Hongrie au lieu de soutenir des mesures qui luttent contre l’emballement du dérèglement climatique.
Certes, mettre autant de pays d’accord n’a jamais été simple, mais aujourd’hui le multilatéralisme a une obligation de réussite. Cet été, la Cour Internationale de Justice, la plus haute juridiction au monde, a rendu un avis qui change la donne. A l’issue d’un processus initié par des jeunes de Tuvalu, elle a rappelé aux Etats qu’ils ont l’obligation d’agir pour prévenir les conséquences du dérèglement climatique mais aussi de coopérer.
Les sujets où la Belgique est attendue ne manquent pas à Belem
Les sujets où la Belgique est attendue à Belém ne manquent pas et l’avis de la Cour fait office de boussole. Son avis appuie non seulement les questions d’ambition mais aussi celles de financements en soulignant que les pays développés se sont engagés à venir en aide aux pays en développement, beaucoup plus vulnérables, notamment pour s’adapter.
D’année en année, les communautés locales et indigènes, que ce soit au Pérou, en RDC ou aux Philippines, sont lésées par les engagements manqués des pays riches. Les besoins en adaptation dépasseront les 300 milliards d’ici 2035 mais en 2023, seulement 26 milliards ont été octroyés. La Belgique, elle, fait le choix de couper dans la coopération au développement, une insulte pour tous ces gens qui ne sont pas responsables des sécheresses et des typhons qu’ils subissent. La COP30 offre l’occasion de faire briller la solidarité en décidant d’un nouvel engagement sur l’adaptation. Est-ce que la Belgique la saisira ou restera-t-elle en marge de la solution ?
Il est également attendu que la Belgique soutienne ardemment la sortie des énergies fossiles et fasse le choix de se joindre aux initiatives qui vont dans ce sens. Atténuer l’intensité et la fréquence des événements climatiques extrêmes et pernicieux ne peut se faire qu’à la condition de laisser les énergies fossiles sous terre. La transition hors des énergies fossiles – actée à la COP28 – doit se traduire dans un plan concret et progressif : abandonner le charbon, le pétrole et le gaz définitivement. Une proposition colombienne est sur la table et une autre de la présidence devrait arriver sous peu : la Belgique les soutiendra-t-elle ?
Finalement, cette transition ne se réalisera qu’à condition d’être juste. Partout dans le monde, les sondages le montrent, le climat fait partie des préoccupations majeures des populations. Mais les mesures climatiques ne sont pas acceptées quand elles sont perçues comme injustes. C’est pourquoi, il faut travailler à embarquer tout le monde depuis les aciéries jusqu’aux plantations de palmiers, du Sud au Nord. Depuis une semaine, cette question fait battre le cœur des négociations. Les prochains jours seront déterminants pour faire balancer l’ensemble des pays vers une décarbonation de leur économie couplée à la réduction des inégalités. Si Belém décide de créer un nouveau mécanisme pour guider cette nouvelle trajectoire, c’est la justice et l’équité qui en sortiront gagnantes.
Sortie des énergies fossiles, transition juste, financement de l’adaptation, la Belgique et nos ministres vont devoir montrer que dans l’ère Trump nous choisissons notre camp. Elle doit, avec ses partenaires européens, montrer que défendre l’accord de Paris, c’est s’engager à allier justice sociale et climatique. Sans cela, c’est la COP qui échoue, faisant le jeu de ceux qui comme Trump, soufflent le climato-scepticisme dans le monde et jettent la science aux orties.
Cette carte blanche a initialement été publiée sur le site du Soir [1].
