Rapport annuel 2018

Jamaïque

Jamaïque
Cheffe de l’État : Elizabeth II, représentée par Patrick Linton Allen
Chef du gouvernement : Andrew Michael Holness

Cette année encore, des homicides illégaux – dont certains pourraient constituer des exécutions extrajudiciaires – ont été commis par la police en toute impunité. Une révision de la législation relative aux infractions à caractère sexuel, à la violence domestique, ainsi qu’à la prise en charge et la protection des enfants était en cours. Des ONG ont exprimé leur inquiétude concernant le droit au respect de la vie privée à la suite de propositions visant à instaurer une carte nationale d’identité. Les lesbiennes, les gays et les personnes bisexuelles et transgenres étaient toujours en butte à la discrimination dans la législation et dans la pratique. Les détenus gays et bisexuels continuaient de courir un plus grand risque de contamination par le VIH.

CONTEXTE

Bien que l’État se soit engagé à créer une institution nationale spécialisée dans les droits humains, il ne l’avait pas encore fait à la fin de l’année.
La Jamaïque conservait l’un des taux d’homicides les plus élevés des Amériques. Le nombre d’homicides enregistrés entre janvier et juin a augmenté de 19 % par rapport à celui relevé au cours de la même période en 2016, selon les statistiques de la police.

POLICE ET FORCES DE SÉCURITÉ

Entre janvier et mars, la Commission d’enquête indépendante (INDECOM), mécanisme de surveillance de la police, a reçu 73 nouvelles plaintes pour des agressions et recensé 42 homicides commis par des responsables de l’application des lois. Pendant l’année, 168 personnes ont été tuées par les forces de l’ordre, contre 111 en 2016.
Des femmes dont un proche aurait été tué par la police ont continué de se battre contre la lenteur d’un système judiciaire qui pâtissait d’un budget insuffisant, réclamant justice, vérité et réparation [1].
Plus d’un an après la publication des conclusions d’une commission d’enquête sur les événements ayant fait au moins 69 morts à Kingston-Ouest pendant l’état d’urgence de 2010, le gouvernement n’avait toujours pas annoncé officiellement comment il comptait mettre en oeuvre les recommandations de cette commission, ni présenté des excuses publiques. En juin, la police jamaïcaine a terminé une enquête administrative interne sur les agissements des agents dont les noms étaient cités dans le rapport de la commission ; elle a conclu à l’absence de faute ou de responsabilité pour les violations des droits humains commises pendant l’état d’urgence.
Dans le cadre d’un plan de prévention de la criminalité, une loi créant des « zones d’opérations spéciales » a été adoptée en juin.
L’INDECOM a organisé une Conférence sur le recours à la force dans les Caraïbes, afin de mettre en place au niveau régional une politique sur le recours à la force conforme aux bonnes pratiques en matière de droits humains. Ce forum a réuni des responsables de l’application des lois de toute la région, ainsi que des spécialistes du maintien de l’ordre et des droits humains.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

En mars, des mouvements de défense des femmes et des victimes de violences sexuelles ou liées au genre ont manifesté à Kingston, la capitale, pour protester contre l’impunité des auteurs de tels actes.
Des ONG jamaïcaines ont présenté une série de recommandations à la commission parlementaire conjointe chargée de réviser la législation relative aux infractions à caractère sexuel, à la violence domestique et à la prise en charge et la protection des enfants. Elles ont notamment recommandé la suppression des exceptions concernant le viol conjugal dans la Loi relative aux infractions à caractère sexuel, afin que les femmes soient protégées contre le viol quelle que soit leur situation maritale.

DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE

L’ONG Jamaicans for Justice (JFJ) a exprimé son inquiétude quant au fait que la loi portant création d’une autorité d’identification et d’enregistrement nationaux risquait de porter atteinte au droit au respect de la vie privée, et que son article 41 en particulier risquait de limiter l’accès aux biens et services publics. DROITS DES ENFANTS JFJ a soumis à la commission parlementaire conjointe une série de recommandations destinées à renforcer la Loi sur la prise en charge et la protection des enfants. Elle a recommandé, entre autres, d’élargir la liste des autorités auprès desquelles les particuliers peuvent signaler officiellement un cas de maltraitance infantile, afin de faciliter ce signalement.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES OU TRANSGENRES

La loi ne protégeait toujours pas contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, réelles ou supposées. En conséquence, les LGBT continuaient d’être victimes de harcèlement et de violences.
Les relations sexuelles consenties entre hommes étaient toujours punies par la loi, et les personnes victimes de violences de la part de leur partenaire dans le cadre d’une relation homosexuelle étaient peu protégées. Des ONG ont recommandé de modifier la législation afin que les dispositions concernant le viol soient neutres du point de vue du genre.
Les personnes transgenres ne pouvaient toujours pas changer de nom ni de genre à l’état civil, et les organisations de défense des LGBTI craignaient que le système d’identification nationale proposé ne porte atteinte à leur droit à la vie privée et ne les expose aux préjugés et à la discrimination, notamment de la part d’employeurs potentiels.
La troisième Marche des fiertés annuelle a eu lieu en août. Elle a permis de continuer d’accroître la visibilité de la communauté LGBTI en Jamaïque et de lui offrir des possibilités de dialogue avec le reste de la société.

DROIT À LA SANTÉ

En juin, l’ONG Stand up for Jamaica a publié un rapport intitulé Barriers Behind Bars, qui analysait le risque élevé de violences sexuelles, de violations des droits humains et, par conséquent, de contamination par le VIH, chez les hommes gays et bisexuels au pénitencier général de Kingston, où ces hommes étaient séparés des autres détenus. Ce rapport avait pour objectif d’ouvrir le débat sur les bonnes pratiques à mettre en oeuvre en vue de réduire la prévalence du VIH en prison.

JUSTICE INTERNATIONALE

À la fin de l’année, la Jamaïque n’avait toujours pas ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, signé en septembre 2000, ni adhéré à la Convention contre la torture [ONU] et à la Convention internationale contre les disparitions forcées [ONU].

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