Écrire Un ancien prisonnier d’opinion détenu à nouveau

Gao Zhisheng, militant et avocat spécialiste des droits humains, serait actuellement en garde à vue à Pékin. On est sans nouvelles de lui depuis le 13 août 2017, on ignore où il se trouve et son état de santé. Étant donné qu’il avait été victime de mauvais traitements et privé d’avocat pendant sa détention précédente, il risque fort de subir des actes de torture et d’autres mauvais traitements.

La disparition de Gao Zhisheng a été signalée par sa famille le 13 août 2017. La police du comté de Jia et de la ville de Yulin, situés tous deux dans la province septentrionale du Shaanxi (Chine), affirme qu’il n’est pas en garde à vue et a même organisé des recherches sur le terrain peu après qu’il a été porté disparu. Le 17 août, des dizaines de personnes, dont l’épouse de Gao Zhisheng, se sont rassemblées devant l’ambassade de Chine à San Francisco pour exhorter l’État chinois à révéler où il se trouve.

Sans nouvelles depuis plus de trois semaines, la famille de Gao Zhisheng a enfin appris le 5 septembre qu’il avait été emmené à Pékin. Le fonctionnaire qui a communiqué cette information au frère aîné de Gao Zhisheng a refusé d’indiquer précisément où cet homme se trouvait, son état de santé et les motifs de sa détention. Des amis de Gao Zhisheng ont déclaré sur les réseaux sociaux que sa détention était peut-être liée à une interview accordée en juin 2017 à un magazine hongkongais, dans laquelle il avait critiqué le Parti communiste et le président Xi Jinping.

Selon son ami Ai Wu, lui aussi militant, au moins trois sympathisants de Gao Zhisheng en Chine ont été placés en détention, sept ont été convoqués et deux ont reçu des avertissements verbaux de la part de la police depuis sa disparition, le 13 août. Le frère aîné de Gao Zhisheng, Gao Zhiyi, a aussi été placé en détention pendant quelques heures, le 26 août. Il semble que les autorités tentent ainsi de faire taire les critiques et de cacher toute information sur la situation de Gao Zhisheng. En tant qu’ancien prisonnier d’opinion, Gao Zhisheng a relaté les actes de torture répétés dont il a été victime en détention, ce qui laisse à craindre qu’il soit en danger.

Le 13 août 2017, l’épouse de Gao Zhisheng a indiqué sur Twitter qu’elle tentait de le joindre, en vain, depuis deux jours. Elle a ensuite contacté le frère aîné de son mari, Gao Zhiyi, qui lui a dit s’être rendu au domicile de Gao Zhisheng le matin et n’y avoir trouvé personne. Gao Zhiyi a signalé la disparition le jour même.

Gao Zhisheng est l’un des avocats spécialistes des droits humains les plus respectés de Chine, que le ministre de la Justice a classé parmi les 10 meilleurs avocats du pays en 2001 pour son travail bénévole dans des affaires d’intérêt public. Malgré cela, Gao Zhisheng a été victime de disparition forcée, de torture, d’assignation à résidence et de détention illégales en raison de ses activités, qui consistent notamment à défendre des militants des droits humains et à travailler sur d’autres affaires sensibles au plan politique. À la fin de 2005, le Bureau de la justice de Pékin a annulé son permis d’exercer et suspendu les activités de son cabinet, Shengzhi Law Office. Ces mesures ont un lien direct avec les lettres ouvertes dans lesquelles Gao Zhisheng appelait les autorités à cesser les persécutions religieuses, notamment celles visant les pratiquants du Fa Lun Gong.

En février 2006, Gao Zhisheng a entamé une grève de la faim pour attirer l’attention sur les persécutions dont étaient victimes les défenseurs des droits humains en Chine. Le 22 août, peu après la fin de sa campagne, il a été arrêté et détenu sans inculpation. Le 21 septembre, il a été inculpé pour un motif flou, l’« incitation à la subversion du pouvoir de l’État ». Le 22 décembre, il a été condamné à trois ans de prison avec un sursis de cinq ans.

En avril 2010, il a déclaré dans une interview accordée à Associated Press qu’il avait été torturé en détention. Peu après, il a été de nouveau porté disparu et on est resté sans nouvelles de lui pendant près de 20 mois. En décembre 2011, les médias publics ont annoncé que Gao Zhisheng n’avait pas respecté les conditions de son sursis et avait donc été incarcéré afin de purger sa peine.

Face au harcèlement constant des autorités, qui ont notamment gelé ses comptes bancaires et empêché ses enfants d’être scolarisés, la famille de Gao Zhisheng a fui la Chine en mars 2009 ; elle réside actuellement aux États-Unis. En octobre 2010, sa fille Grace Geng a adressé au président des États-Unis une lettre ouverte dans laquelle elle disait : « M. le Président Obama, vous qui êtes père de deux filles, demandez au président chinois Hu Jintao de dire à la fille que je suis où se trouve son père. »

Depuis sa libération en 2014, Gao Zhisheng vivait chez son frère aîné dans un village isolé de la province du Shaanxi, sous étroite surveillance. Selon sa famille, il a souffert de mauvais traitements et de malnutrition en prison, ce qui a gravement endommagé ses dents ; trois ans plus tard, il a encore du mal à consommer des aliments solides. Les autorités lui ont interdit de quitter le village pour recevoir des soins médicaux et dentaires. Même dans cette situation difficile, il a continué à défendre ouvertement les droits humains et à critiquer le Parti communiste chinois.

En 2016, Gao Zhisheng a publié des mémoires intitulés Année 2017, débout la Chine ! avec l’aide de sa fille Grace Geng. Dans ce livre, il décrit en détail le traitement qu’il a subi en détention de 2009 à 2014 et raconte sa vie après qu’il a été libéré et renvoyé dans le Shaanxi pour vivre sous une surveillance policière permanente chez son frère aîné, Gao Zhiyi. L’objectif était de continuer la résistance contre les violations des droits humains commises sous le régime communiste.

Les militants et défenseurs des droits humains demeurent systématiquement soumis à une surveillance, à des manœuvres de harcèlement et d’intimidation, à des arrestations et à des incarcérations. De plus en plus de défenseurs des droits humains sont maintenus par la police dans des lieux de détention non officiels, parfois sans pouvoir consulter un avocat pendant de longues périodes, ce qui les expose au risque de torture et d’autres forme mauvais traitements.

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