Les efforts déployés par les travailleurs, les syndicalistes et les défenseurs des droits des travailleurs en Iran afin de dénoncer des problèmes tels que les salaires impayés, les conditions de travail précaires, l’inflation galopante et un faible niveau de vie se heurtent systématiquement à la répression de la part des autorités iraniennes. Bien que des restrictions indues soient venues limiter le droit à la liberté d’association et que les syndicats indépendants soient interdits en Iran, de nombreux travailleurs et leurs alliés continuent courageusement à former des syndicats et des organisations de défense des droits des travailleurs. Ces initiatives ont souvent donné lieu à des licenciements injustifiés ou des retraites anticipées forcées, des attaques et des violences de la part des forces de sécurité dans le cadre du maintien de l’ordre lors de manifestations de travailleurs, des représailles pour l’organisation d’actions de protestation pacifiques ou une participation à celles-ci, des arrestations et détentions arbitraires, des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements, et de lourdes peines de prison sur la base d’accusations fallacieuses en relation avec la sécurité nationale.
Au moins un militant en faveur des droits des travailleurs, Arash Johari, qui avait été arrêté lors de l’opération de répression d’octobre 2020, a depuis lors été condamné à 16 ans de prison en relation avec son militantisme, faisant craindre que d’autres, notamment Mehran Raoof, ne risquent eux aussi de lourdes peines de prison.
Amnesty International a recensé des violations au droit à un procès équitable s’inscrivant dans des pratiques bien établies en Iran, du moment de l’arrestation à celui de la comparution des accusés. Certaines personnes arrêtées, faisant l’objet d’enquêtes et poursuivies, en particulier celles qui ont la double nationalité ou qui sont appréhendées sur la base d’accusations à caractère politique, notamment des défenseur·e·s des droits humains, font l’objet de procédures dont l’iniquité est flagrante. La plupart d’entre elles sont arrêtées sans mandat et incarcérées dans des lieux tenus secrets sans pouvoir s’entretenir avec leur famille ni avec leur avocat.
Le parquet et les fonctionnaires des organes de sécurité et du renseignement chargés des interrogatoires, notamment les gardiens de la révolution, privent systématiquement les détenus de leur droit de consulter un avocat, et ce, dès leur arrestation, y compris lorsque leur avocat a été évalué et approuvé par le pouvoir judiciaire, et durant la phase d’enquête sur leur cas. La torture et les autres formes de mauvais traitements contre les personnes arrêtées dans le cadre d’affaires à caractère politique sont généralisées et systématiques, en particulier durant les interrogatoires.
Les autorités carcérales et le parquet refusent par ailleurs délibérément aux personnes incarcérées pour des motifs politiques tout accès à des soins de santé adéquats, notamment à des médicaments. Les agents du renseignement et des services de sécurité maintiennent les détenus en régime cellulaire dans des conditions inadéquates et insalubres - en particulier dans la section 2A de la prison d’Evin, qui est sous le contrôle des gardiens de la révolution - jusqu’à 24 heures par jour, pendant des semaines, voire des mois, et ne les autorisent à quitter leur cellule que pour des interrogatoires. Les détenu·e·s se trouvant à l’isolement n’ont aucun accès à la lumière naturelle ni à l’air frais, et se trouvent souvent dans des cellules crasseuses qui sont infestées d’insectes. Ces cellules sont souvent dépourvues de sanitaires adéquats et de produits d’hygiène personnelle, les détenu·e·s dorment à même le sol avec une seule couverture et les rations sont maigres et de mauvaise qualité.
D’anciens détenu·e·s ayant parlé à Amnesty International ont systématiquement déclaré que leur maintien prolongé en détention à l’isolement leur a causé d’immenses souffrances psychologiques et avait été utilisé afin de les forcer à faire des « aveux ». Dans ces circonstances, la détention à l’isolement pour des périodes prolongées s’apparente en soi à un acte de torture. Les « aveux » forcés arrachés sous la torture et d’autres formes de mauvais traitements, sans qu’un avocat ne soit présent, sont systématiquement utilisés à titre de preuve par les tribunaux pour prononcer des condamnations.
Le droit international relatif aux droits humains interdit les privations arbitraires de liberté. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a estimé que la détention peut être arbitraire même lorsqu’elle est autorisée par le droit national, si elle est contraire aux normes internationales ou enfreint d’autres droits fondamentaux tels que les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique. Les détenu·e·s ont le droit de communiquer avec le monde extérieur et de recevoir des visites. La détention à l’isolement pour des périodes prolongées, c’est-à-dire pour des périodes dépassant 15 jours, 22 heures par jour ou plus, viole l’interdiction absolue de la torture et des autres formes de mauvais traitements.
La torture est un crime international et son utilisation est interdite dans toutes les circonstances. Les déclarations obtenues au moyen de la torture, de mauvais traitements ou de toute autre forme de coercition ne peuvent être retenues à titre de preuve dans le cadre de procédures judiciaires, sauf dans le cadre de poursuites contre les auteurs présumés de tels sévices.
Le droit à un procès équitable est juridiquement contraignant pour tous les États en vertu du droit international coutumier. Les personnes poursuivies doivent avoir le droit de : bénéficier d’une assistance juridique de leur choix dès le moment de leur arrestation, tout au long de la phase préalable au procès et durant celui-ci ; ne pas être contraintes à témoigner contre elles-mêmes ou à s’« avouer » coupables ; ne pas être arrêtées sur la base de charges vagues ; bénéficier d’une audience publique respectant les normes d’équité, devant un tribunal compétent, indépendant et impartial ; et de faire l’objet d’un jugement public raisonné.