Écrire Un avocat défenseur des droits humains incarcéré en Crimée

Emil Kourbedinov, éminent avocat spécialisé dans la défense des droits humains, a été condamné le 26 janvier à 10 jours de détention administrative, à cause de son travail en faveur des droits humains. Il doit être libéré immédiatement.

Le 26 janvier, l’éminent avocat spécialisé dans la défense des droits humains, Emil Kourbedinov, a été condamné à 10 jours de « détention administrative » par le tribunal du quartier de Jéleznodorojny, à Simferopol, la capitale de la Crimée. Il est actuellement incarcéré dans un centre de détention provisoire de cette ville. Depuis l’occupation et l’annexion de la péninsule par la Russie en février/mars 2014, les Tatars de Crimée sont la communauté la plus durement touchée par la forte répression des voix dissidentes qui s’en est suivie. Emil Kourbedinov attire l’attention de la communauté internationale sur les violations des droits humains commises en Crimée, et défend en justice les Tatars pris pour cible par les autorités russes et de facto.

Le 26 janvier, Emil Kourbedinov et un collègue se rendaient chez un militant tatar, dont le domicile faisait l’objet d’une perquisition par les forces de l’ordre. Leur véhicule a été intercepté par la police de la circulation et, peu de temps après, plusieurs hommes en civil, portant un masque et affirmant être policiers, sont arrivés sur les lieux et ont arrêté l’avocat. Le même jour, des agents armés et masqués du ministère russe de l’Intérieur ont fouillé son domicile et son bureau, confisquant du matériel contenant des informations protégées par la confidentialité des échanges entre l’avocat et son client. La mère et les jeunes enfants d’Emil Kourbedinov étaient à la maison à ce moment-là.

Dans l’après-midi du 26 janvier, Emil Kourbedinov a été présenté devant un tribunal et déclaré coupable au titre de l’article 20.3 du Code russe des infractions administratives (propagande et manifestation publique de symboles nazis et extrémistes). Le chef d’inculpation retenu contre lui est lié à une publication sur les réseaux sociaux où l’avocat a partagé une vidéo d’une réunion avec l’organisation musulmane Hizb ut-Tahrir en Crimée. En Russie, Hizb ut-Tahrir figure sur la liste officielle des « organisations terroristes ». Cependant, la vidéo a été partagée le 5 juin 2013, avant l’occupation et l’annexion de la Crimée. L’organisation Hizb ut-Tahrir n’est pas interdite au regard du droit ukrainien, et la réunion de ses membres qui a été filmée était pacifique. Depuis l’annexion de la Crimée et au mépris du droit international humanitaire, la Fédération de Russie a pleinement incorporé la péninsule et y a importé l’intégralité de sa législation, y compris ses dispositions les plus répressives.

Dans le rapport qu’elle a rendu public récemment, Ukraine : Crimea in the dark : the silencing of dissent (https://www.amnesty.org/fr/documents/EUR50/5330/2016/en/), Amnesty International met en évidence la répression implacable dont sont victimes les voix dissidentes en Crimée depuis l’occupation et l’annexion de la péninsule par la Russie en février/mars 2014. Les dirigeants et militants de la communauté tatare de Crimée sont le groupe d’opposition le mieux organisé et, de fait, sont devenus la principale cible des autorités russes.

Les avocats de plusieurs de ces personnes dont le cas est évoqué dans le rapport d’Amnesty International sont eux-mêmes visés par des manœuvres de harcèlement. Certains ont été menacés d’être poursuivis au pénal ou de se voir retirer leur licence professionnelle. Emil Kourbedinov est l’un d’entre eux.

Cet avocat a défendu les quatre accusés dans l’« affaire Hizb ut-Tahrir », relatée dans le rapport. C’est aussi souvent le premier avocat à arriver sur place, quand le Service fédéral de sécurité (FSB) de Russie effectue une descente et une perquisition au domicile de Tatars, mais aussi dans d’autres situations où des membres de la communauté tatare de Crimée ont besoin d’une assistance judiciaire face aux autorités russes ou criméennes de facto. Il a subi diverses menaces et d’autres formes de harcèlement de la part des autorités. Ce harcèlement dont il a été victime, son arrestation et sa détention visent à le contraindre à ne plus exercer comme avocat.

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