Écrire Les personnes qui défendent la forêt font l’objet de menaces

La forêt humide de Prey Lang au Cambodge - un des écosystèmes les plus importants d’Asie du Sud-Est - est menacée.

Au cours des dernières semaines, les personnes qui défendent cette forêt ont été menacées, arrêtées et agressées. Les manœuvres de harcèlement dont font l’objet les défenseurs de Prey Lang mettent en péril non seulement cette forêt humide et les populations autochtones qui vivent là, mais aussi la lutte mondiale contre le changement climatique.

Prey Lang est la plus grande forêt de plaine à feuillage persistant en Asie du Sud-Est continentale ; elle couvre environ 500 000 hectares et s’étend sur quatre provinces du Cambodge. Cette forêt est un haut lieu de biodiversité qui abrite nombre d’espèces animales et végétales menacées, ce qui en fait une région d’une importance environnementale majeure pour la planète.
Plus de 250 000 personnes, dont la majorité se considèrent comme des autochtones Kuy, vivent à l’intérieur et autour de la forêt de Prey Lang.

Prey Lang signifie « notre forêt » en langue kuy et les populations autochtones s’appuient sur elle depuis des générations dans leur vie quotidienne. La forêt de Prey Lang joue un rôle important dans la culture et la vie spirituelle des Kuy, et elle est un élément essentiel de leurs modes de subsistance. La forêt de Prey Lang a reçu le label de Sanctuaire de la vie sauvage en 2016 et les exportations de bois en provenance de cette forêt ont été interdites.

Pourtant, la forêt de Prey Lang est toujours menacée par les coupes forestières illégales. Le Réseau communautaire de Prey Lang a fait état de la perte de 41 758 hectares de forêt entre 2001 et 2018, ce qui correspond à presque 10% de la surface du Sanctuaire de la vie sauvage de Prey Lang. Fin 2019, une des plus grandes entreprises actives dans la région, Think Biotech, a fait l’objet d’une double enquête du ministère de l’Environnement et du Ministère de l’Agriculture, de la Sylviculture et des Pêches en lien avec des allégations d’abattage illégal d’arbres sur des terres ancestrales appartenant aux autochtones et situées en-dehors des limites de la concession de l’entreprise dans la forêt de Prey Lang.

La préservation de ce qu’il reste de forêt humide primaire sur la planète est essentiel dans la prévention contre les dommages catastrophiques du changement climatique. L’Organisation des Nations unies a déclaré que l’élimination des émissions dues à la déforestation ... pourrait réduire jusqu’à 30% les émissions nettes mondiales (traduction non officielle).

Le PLCN - réseau local constitué principalement de défenseurs autochtones de la forêt - a été créé en 2001 par des membres de la population locale vivement préoccupés par l’étendue dévastatrice des coupes forestières illégales dont ils étaient les témoins dans la forêt de Prey Lang. Ses membres sont des bénévoles à temps partiel qui prennent des risques considérables en faisant des rondes dans la forêt pour surveiller et empêcher les coupes illégales et le braconnage. Le PLCN a gagné plusieurs prix internationaux dont le Prix Initiative PNUD Équateur lors de la COP21 à Paris en 2015, et le Prix annuel de la Fondation Alexander Soros en 2013.

Des responsables du ministère de l’Environnement ont déclaré récemment que le PLCN agissait illégalement du fait qu’il ne s’était pas dûment enregistré en application de la loi relative aux associations et aux organisations non gouvernementales (LANGO). Ces personnes ont ensuite accusé le réseau de fournir des informations inexactes sur la déforestation et d’autres infractions dans la forêt de Prey Lang. Mener des activités sans s’être enregistré aux termes de la loi LANGO est passible d’une interdiction d’activité, d’amendes et même de poursuites au pénal.

Les menaces dont fait l’objet le PLCN sont le dernier exemple de l’instrumentalisation de la loi LANGO pour réprimer les organisations de la société civile indépendantes et le militantisme local. La loi LANGO a été introduite en août 2015 en dépit de très nombreuses critiques de la part d’organisations cambodgiennes et internationales de défense des droits humains.

Avant que la loi ne soit adoptée, Amnesty International avait demandé le rejet du projet de loi en invoquant le fait qu’il ne respectait pas le droit à la liberté d’association, ainsi que l’impact que ce texte risquait d’avoir sur le militantisme local.

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