Écrire Détention au secret d’un militant renvoyé de force

Les autorités ont annulé sans fournir aucun motif l’audience prévue en avril 2017 dans l’affaire concernant Dong Guangping. Inculpé de « subversion du pouvoir de l’État » et « franchissement illégal de la frontière », il est détenu au secret depuis qu’il a été renvoyé de force de Thaïlande en 2015. Il risque d’être victime d’actes de torture et d’être jugé dans le cadre d’un procès inique.

En violation du droit chinois et du droit international, Dong Guanping continue d’être privé du droit de consulter l’avocat de son choix. L’avocat nommé par le gouvernement, qui a remplacé en août 2016 celui que la famille de Dong Guangping avait engagé, a renoncé à cette affaire le 14 juillet 2017 en raison des difficultés à traiter le dossier. Il avait au départ transmis des informations à la famille concernant l’acte d’inculpation de Dong Guangping et la date fixée pour le procès, mais n’a fourni aucune autre mise à jour après que le gouvernement a annulé l’audience prévue en avril 2017.

L’avocat de Dong Guangping initialement engagé par sa famille s’est rendu une nouvelle fois au centre de détention de Chongqing le 24 juillet 2017. Le centre de détention, qui a rejeté plusieurs requêtes de l’avocat visant à rencontrer Dong Guangping, a déclaré que celui-ci assurerait sa propre défense lors du procès et se passerait des services d’un avocat. L’avocat a demandé à confirmer cela en personne avec Dong Guangping, mais sa requête ayant été refusée, cette affirmation n’a pas pu être vérifiée de manière indépendante. Comme les autorités ne reconnaissent pas la légitimité de l’avocat engagé par la famille, celui-ci n’a pas pu examiner l’acte d’inculpation ni aucun document présenté par le gouvernement contre Dong Guangping.

Alors qu’il avait obtenu le feu vert pour une réinstallation rapide, Dong Guangping a été renvoyé de force vers la Chine le 13 novembre 2015, cinq jours avant de quitter la Thaïlande pour un pays tiers. Dong Guangping est aujourd’hui détenu depuis plus de 20 mois et sa famille n’a toujours pas été directement informée de son lieu de détention, de son arrestation, de son inculpation ni des charges pesant sur lui. Sans pouvoir communiquer avec sa famille ni consulter l’avocat de son choix, Dong Guangping risque d’être torturé et risque un procès inique.

Dong Guangping était policier en Chine. Il a été mis fin à son contrat en 1999, après qu’il a cosigné une lettre publique et distribué des articles dans différentes villes à l’occasion du 10e anniversaire des manifestations de la place Tiananmen, durement réprimées en 1989. Dong Guangping a déjà été détenu plusieurs fois en Chine en raison de ses activités militantes, pourtant pacifiques. Emprisonné pendant trois ans en 2001 pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’État », il a été maintenu en détention entre mai 2014 et février 2015 pour avoir participé à un événement en hommage aux victimes de la répression des manifestations organisées en 1989 sur la place Tiananmen. Il est arrivé en Thaïlande en septembre 2015 avec sa femme et sa fille pour échapper au harcèlement.

Lorsque le gouvernement thaïlandais a renvoyé de force en Chine Dong Guangping et Jiang Yefei, un autre militant, le 13 novembre 2015, ils avaient déjà été acceptés pour une réinstallation rapide dans un pays tiers et devaient partir le 18 novembre. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) ont exprimé de vives inquiétudes quant au renvoi forcé de Jiang Yefei et Dong Guangping et quant au fait qu’ils risquent d’être victimes d’actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Les deux hommes ont été vus le 26 novembre 2015 dans un enregistrement de l’agence de presse d’État, CCTV, « avouant » avoir commis des infractions liées à la traite d’êtres humains et « reconnaissant » que Jiang Yefei avait aidé Dong Guangping à franchir « illégalement » la frontière thaïlandaise.

Après avoir vu la vidéo, leurs proches ont déclaré que les deux hommes avaient peut-être été victimes d’actes de torture et d’autres mauvais traitements. Ils estiment que leur expression faciale et le ton de leur voix n’étaient pas comme d’habitude et qu’ils présentaient des signes de douleur et de stress.
Les pays d’Asie du Sud-Est bafouent de plus en plus souvent le principe de « non-refoulement » en cédant aux pressions diplomatiques de la Chine.

Ce principe interdit le transfert d’une personne dans un pays ou une juridiction où elle risquerait de subir de graves violations ou atteintes aux droits humains. Il est protégé par de nombreux traités internationaux et fait désormais partie du droit international coutumier qui lie tous les États, que ceux-ci aient ou non ratifié les traités concernés, parmi lesquels figurent la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Le système pénal en Chine peut être divisé en trois phases distinctes : la phase d’enquête menée par la police ; la phase de poursuites, au cours de laquelle le parquet approuve les éléments de preuve initiaux nécessaires pour arrêter un suspect et lance une enquête plus approfondie visant à inculper ou non le suspect ; et enfin la phase finale de procès menée par les tribunaux.

En Chine, les personnes inculpées sont presque toujours déclarées coupables lorsque les affaires sont portées devant les tribunaux. En 2015, le taux de condamnation était de 99,92 %, d’après les statistiques officielles communiquées par Zhou Qiang, le président de la Cour populaire suprême.

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