Mohammed al Khudari et Hani al Khudari, ressortissants palestiniens, ont été arrêtés arbitrairement le 4 avril 2019 et sont restés détenus sans inculpation jusqu’au 8 mars 2020. Tous deux ont été victimes de violations flagrantes des droits humains – disparition forcée, arrestation et détention arbitraires, détention au secret et détention à l’isolement, notamment. Ils ont en outre été interrogés à huis clos sans que leurs avocats ne soient présents ni ne participent. En novembre 2020, ils ont été transférés à la prison d’Abha, qui ne dispose pas de spécialistes médicaux ni du niveau de soins nécessaire.
Le 8 mars 2020, les deux hommes ont été inculpés devant le Tribunal pénal spécial d’« appartenance à une entité terroriste » - terme qui renverrait aux autorités de facto du Hamas - dans le cadre d’un procès collectif concernant 68 personnes. Mohammed al Khudari était également poursuivi pour avoir occupé plusieurs fonctions de direction au sein de cette entité. Leur procès a été entaché de nombreuses graves violations de leur droit à une procédure équitable, notamment de disparition forcée, arrestation et détention arbitraires, détention au secret et détention à l’isolement.
Le 8 août 2021, le Tribunal pénal spécial de Riyadh a condamné Mohammed al Khudari à une peine de 15 ans de prison, diminuée de moitié en raison de son âge ; il lui restait donc une peine de sept ans et demi à purger. Hani al Khudari a été condamné à une peine de trois de prison, qui couvre notamment la durée de sa détention provisoire, et qui sera suivie de son expulsion hors d’Arabie saoudite. Après leur audience d’appel, le 28 décembre 2021, la Cour d’appel de Riyadh a réduit la peine de Mohammed al Khudari à six ans de prison, diminuée de moitié compte tenu de son âge, et a confirmé la peine prononcée contre Hani al Khudari. Sur cette base, les deux hommes auraient dû être libérés le 28 février 2022.
Mohammed al Khudari est atteint d’un cancer de la prostate et a perdu de la mobilité dans son bras droit en raison des mauvaises conditions de couchage dans sa cellule. Ses capacités auditives ont également diminué de moitié. Par ailleurs, des problèmes dentaires sur le côté gauche de sa bouche ont entraîné la chute de plusieurs dents et des difficultés pour s’alimenter, à tel point qu’il a perdu beaucoup de poids. Récemment, sa famille a fait savoir à Amnesty International que l’état de santé de Mohamed al Khudari s’était encore dégradé et qu’il souffrait maintenant d’incontinence, d’une hernie discale, de douleurs dans les genoux, d’une fragilité osseuse et d’une faiblesse générale. Malgré cette situation qui met sa vie en danger, Mohammed al Khudari n’a pas été autorisé à consulter un oncologue ni un dentiste, bien qu’il ait été hospitalisé plusieurs fois. Quant à Hani al Khudari, il souffre d’anémie et de calculs rénaux mais s’est également vu refuser des soins médicaux adaptés. De plus, les deux hommes ont contracté le COVID-19 en prison.
La famille de Mohammed et Hani al Khudari est très inquiète, compte tenu des nombreuses morts en détention répertoriées dans les prisons d’Arabie saoudite. En avril 2020, Abdullah al Hamid, militant saoudien de renom en faveur des droits humains, a sombré dans le coma et est mort des suites d’un accident vasculaire cérébral en détention. Puis, en octobre 2021, Musa al Qarni, dignitaire religieux saoudien, a été roué de coups et tué en prison par un autre détenu. « Nous craignons vraiment pour leurs vies. Nous avons imploré les autorités de leur permettre d’obtenir les soins médicaux nécessaires, ou de placer Mohammed en résidence surveillée afin qu’il puisse recevoir des soins, ou encore d’accélérer le processus de libération, mais nous n’avons reçu aucune réponse. C’est comme une condamnation à mort », a déclaré un membre de la famille à Amnesty International.
Leur traitement et leurs conditions de détention génèrent un stress important et une forte pression psychologique pour eux, en particulier pour Mohammed al Khudari. Le traitement qui leur est infligé est contraire à l’interdiction de la torture et des autres formes de mauvais traitements. De plus, les deux hommes sont toujours privés de communications régulières avec leur famille, car les autorités pénitentiaires peuvent annuler sans explication leur appel hebdomadaire ou leur visite familiale mensuelle.
L’arrestation de ces deux ressortissants palestiniens s’inscrit dans le cadre d’une répression plus vaste exercée par les autorités saoudiennes contre les Palestiniens, les Jordaniens et les Saoudiens résidant en Arabie saoudite qui sont perçus comme ayant des liens avec les autorités de facto du Hamas.
Amnesty International a fait état dans un rapport de l’utilisation systématique par les autorités saoudiennes, depuis 2011, du Tribunal pénal spécial pour faire taire la dissidence. L’organisation a constaté que les juges de cette juridiction ont présidé des procès manifestement iniques et prononcé des peines de prison allant jusqu’à 30 ans ainsi que de nombreuses condamnations à mort en vertu de dispositions vagues de la législation visant à lutter contre le terrorisme et la cybercriminalité.