Maria Kolesnikova, musicienne professionnelle et ancienne directrice artistique d’un centre culturel, a rejoint en mai l’équipe de campagne du candidat à l’élection présidentielle Viktar Babaryka. Elle est devenue l’une des principales figures de l’opposition quand Viktar Babaryka et un autre candidat à l’élection présidentielle, Siarhei Tsikhanousky, ont été arrêtés le 9 août en amont de l’élection présidentielle. Avec Svetlana Tsikanovskaïa et Veranika Tsapkala, Maria Kolesnikova a formé une troïka féminine qui a mené une campagne électorale contre le président sortant Alexandre Loukachenko, et qui a galvanisé un vote massif de protestation contre lui.
Veranika Tsapkala a quitté le Bélarus le 9 août par crainte de persécutions. À la suite de l’exil forcé de Svetlana Tsikanovskaïa le 10 août, Maria Kolesnikova est devenue la première figure de l’opposition au Bélarus. Elle est apparue en première ligne de nombreuses manifestations pacifiques dans la rue, s’est retrouvée confrontée à maintes reprises à des policiers violents, a donné de nombreuses interviews dans les médias et a continué de soutenir des personnes ayant fait l’objet d’une arrestation arbitraire et été soumises à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements en détention. Maria Kolesnikova fait partie des sept membres du présidium du Conseil de coordination de l’opposition qui a été formé à la suite de l’élection présidentielle.
Maria Kolesnikova a disparu dans la matinée du 7 septembre, en même temps que deux autres membres éminents du Conseil de coordination, Ivan Krautsou et Anton Radniankou. Des témoins ont vu des hommes masqués habillés en civil l’entraîner de force dans une camionnette portant l’inscription « Communications ». Toute la journée, les autorités ont nié savoir ce qu’il était advenu d’elle et où elle se trouvait. Dans la matinée du 8 septembre, les autorités ukrainiennes ont officiellement confirmé qu’Ivan Krautsou et Anton Radniankou étaient entrés dans le pays.
Les médias ont par la suite indiqué que les deux hommes avaient été contraints de quitter le Bélarus contre leur volonté. Il est également apparu que Maria Kolesnikova se trouvait avec eux, mais qu’elle a résisté et réussi à éviter l’expulsion vers l’Ukraine en déchirant son passeport.
Malgré les dénégations des autorités du Bélarus, on estimait qu’elle avait été placée en détention. Les autorités du Bélarus n’ont révélé le lieu où elle se trouvait que le 9 septembre, plus de 48 heures après sa disparition. Elle a d’abord été détenue par les gardes-frontières à Mazyr, et a ensuite été transférée dans un centre de détention à Minsk, la capitale, puis dans un autre centre de détention, à Zhodzina, loin de la capitale où une foule se rassemblait régulièrement devant la porte pour demander sa libération. Elle est maintenue en détention et fait l’objet de poursuites pénales au titre de l’article 361 du Code pénal (« Incitation à agir en vue de porter atteinte à la sécurité nationale »). Si elle est déclarée coupable, elle encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.
Maria Kolesnikova n’est pas la seule personne qui est poursuivie en justice en raison des élections. En amont de l’élection déjà, plusieurs dizaines d’opposant·e·s à Alexandre Loukachenko avaient été arrêtés pour des accusations forgées de toutes pièces, notamment Siarheï Tsikhanouski, Viktar Babarika, Paval Sieviariniec et Vitali Chkliarau. Quand les manifestations pacifiques contre la proclamation de la victoire officielle d’Alexandre Loukachenko ont débuté, le 9 août, les autorités ont réprimé les manifestant·e·s. La police antiémeute a tiré avec des balles en caoutchouc, lancé de grenades incapacitantes et utilisé des canons à eau et des substances chimiques irritantes pour disperser les foules pacifiques.
Quelque 7 000 protestataires ont été arrêtés, et un grand nombre d’entre eux ont été battus, humiliés, torturés et soumis à d’autres mauvais traitements dans des centres de détention surpeuplés, durant les premières semaines des manifestations.
Depuis, plusieurs milliers de manifestant·e·s pacifiques ont subi le même sort. Les dirigeant·e·s des mouvements de protestation ont été arrêtés ou contraints à l’exil.