Écrire Il faut libérer un défenseur des droits humains gravement malade

Mansour Minguelov, condamné à 22 ans de réclusion lors d’un procès inique en représailles de plaintes contre la torture en garde à vue, souffre de tuberculose, qu’il a contractée en prison. Il doit être libéré immédiatement et sans condition.

Le 22 juin, la santé de Mansour Minguelov s’est brusquement détériorée et il a souffert d’une forte fièvre et de douleurs au cœur. Les membres du personnel médical de la prison ont refusé de le soigner sans être payés et ont affirmé qu’ils ne pouvaient rien faire car ils ne possédaient ni médicaments ni équipements médicaux. Le 26 juin, Mansour Minguelov a été transféré dans un hôpital pénitentiaire de la ville de Mary (sud-est du Turkménistan), où on lui a diagnostiqué une tuberculose. Sa famille a fourni les médicaments nécessaires, mais il ne les a reçus que le 4 juillet, quand ses proches lui ont rendu visite à l’hôpital pénitentiaire et ont insisté auprès des médecins de la prison pour qu’il reçoive son traitement.

Mansour Minguelov appartient à l’ethnie baloutche. Il a été arrêté pour la première fois par la police le 6 juin 2012 et interrogé sur son frère, arrêté la veille pour trafic de drogue. Mansour Minguelov a été obligé d’assister aux séances de torture de son frère en détention. Lorsqu’il a été libéré, le 22 juin 2012, il a porté plainte et fourni des preuves des actes de torture que son frère a subis au parquet général et à des organisations internationales. Il a également réuni des preuves d’autres cas de torture en garde à vue et les a soumises aux autorités et aux diplomates turkmènes. Des policiers l’ont menacé de poursuites pour des accusations liées au trafic de stupéfiants s’il ne révoquait pas ses allégations de torture. Le 2 août 2012, il a de nouveau été arrêté. Un mois plus tard, il a été condamné à l’issue d’un procès inique à 22 ans de réclusion pour production et distribution de pornographie, contrebande, et fabrication ou distribution de stupéfiants, en vertu des articles 156, 164, 254 et 292 du Code pénal turkmène. Il est toujours détenu dans la prison LBK/11 de Seidi (province de Lebap, dans l’est du Turkménistan).

À la suite de sa condamnation, le juge présidant le tribunal a informé Mansour Minguelov qu’il avait été condamné pour des raisons politiques.

Amnesty International pense que Mansour Minguelov a été arrêté en représailles de son travail de documentation sur la torture en garde à vue.

Du 22 juin au 2 août 2012, Mansour Minguelov a documenté 11 cas de torture et d’autres mauvais traitements touchant des membres de l’ethnie baloutche dans la province de Mary, dont il a copié les détails sur des CD qu’il a envoyés à l’ambassade des États-Unis à Achgabat, la capitale du Turkménistan, à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et au parquet général. Selon lui, ces informations font état des pratiques auxquelles des agents de la force publique ont recours. Ils utilisent notamment des burins pour fracturer les os des détenus et des tenailles pour tirer la chair du scrotum, administrent des décharges électriques, et frappent les détenus avec des pieds de chaise ou des bouteilles en plastique. Mansour Minguelov a expliqué avoir vu une caisse d’outils destinés expressément à la torture dans les locaux du Service d’État pour la protection d’une société turkmène prospère, à Achgabat. Deux policiers ont été licenciés à la suite de ses plaintes.

Lors de son procès, Mansour Minguelov a affirmé avoir vu son avocat commis d’office à seulement deux reprises, lors de leur rencontre puis pendant le procès. Il n’a pas pu consulter l’avocat de son choix et des éléments déterminants prouvant qu’il ne se trouvait pas au Turkménistan lors de certains faits qui lui sont reprochés ont été ignorés durant le procès. Certains des témoins ont été forcés de signer des déclarations en turkmène qu’ils ne comprenaient pas et leurs témoignages oraux contredisaient les déclarations écrites présentées au tribunal.

Selon certains défenseurs des droits humains et journalistes turkmènes en exil, la torture et les autres formes de mauvais traitements sont monnaie courante au Turkménistan. Cependant, il règne un tel climat de peur que seules quelques rares personnes osent signaler ces pratiques commises en détention ou les évoquent après leur libération. Ce faisant, elles s’exposent, ainsi que les membres de leurs familles au sens large, à des représailles des autorités.

Amnesty International a recueilli des informations faisant état du harcèlement et des persécutions dont sont victimes les personnes qui osent dénoncer publiquement les violations des droits humains au Turkménistan. Pour en savoir plus, consultez le rapport d’Amnesty International Turkmenistan : An “Era of Happiness” or more of the same repression ? (EUR 61/005/2013) à l’adresse www.amnesty.org/en/documents/eur61/005/2013/en/.

Dans ses Observations finales de juin 2011 sur le Turkménistan, le Comité des Nations unies contre la torture a indiqué : « L’absence de données complètes ou ventilées sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans des affaires de torture et de mauvais traitements où sont impliqués des agents des forces de l’ordre [...] constitue un obstacle majeur qui empêche de déterminer l’existence éventuelle d’un ensemble de violations devant retenir l’attention. » Il a également recommandé que les autorités turkmènes rassemblent et fournissent des statistiques en la matière.

La tuberculose est courante dans les prisons turkmène en raisons du surpeuplement et de la mauvaise alimentation. Alternative Turkmenistan News a dévoilé en mai 2016 que les autorités cachaient le nombre réel de cas de tuberculose dans les prisons turkmènes et transféraient fréquemment les prisonniers atteints dans des casernes générales pour cacher la véritable ampleur du problème (pour plus d’informations, voir https://habartm.org/archives/5097).

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