Le 20 mai 2017, contre toute attente, Kamal Hassan Ramezan Soulo a été convoqué par les autorités pénitentiaires, qui lui ont annoncé qu’il se trouvait sous le coup d’une condamnation à mort. Cette annonce est intervenue à la suite d’un enchaînement d’événements qui montrent les profondes déficiences du système judiciaire iranien, qui permettent notamment aux services de renseignement et de sécurité de priver arbitrairement des personnes de leurs droits fondamentaux, y compris des droits à la vie, à la liberté et à la sécurité, en toute impunité.
En 2015, après plusieurs altercations armées entre les forces de sécurité iraniennes et le Parti pour une vie libre au Kurdistan (PJAK), les autorités iraniennes ont prononcé de nouvelles charges pénales contre deux hauts responsables du PJAK identifiés sous les noms de « Kamal Soor » et « Rahman Haji Ahmadi », et ont sollicité l’aide d’Interpol pour localiser et arrêter ces personnes. La troisième chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia avait jugé ces deux hommes par contumace le 12 novembre 2011. Elle les avait reconnus coupables d’« inimitié à l’égard de Dieu » (mohareb) pour l’attaque armée d’un poste de police d’Erbilan, près d’Ourmia, le 26 juillet 2011 – attaque attribuée au PJAK par les autorités iraniennes – et les avait condamnés à mort.
Après l’ajout de nouveaux chefs d’inculpation contre les deux hommes en 2015, le parquet a aussi demandé des informations aux pasdaran (gardiens de la révolution) et au ministère du Renseignement pour tenter de les localiser. Le ministère du Renseignement a répondu que la véritable identité de « Kamal Soor » était Kamal Hassan Ramezan Soulo, qui était déjà en prison. Sur cette base, le 28 juillet 2016, le parquet a ouvert une enquête pour « inimitié à l’égard de Dieu » contre Kamal Hassan Ramezan Soulo en lien avec l’attaque de juillet 2006.
Ce n’est que le 20 mai 2017, quand les autorités pénitentiaires lui ont remis une copie d’une lettre datée du 17 mai 2017 envoyée par le service d’application des peines au directeur de la prison centrale d’Ourmia, que Kamal Hassan Ramezan Soulo a appris que le ministère du Renseignement l’accusait à tort d’être « Kamal Soor » et cherchait à lui appliquer la déclaration de culpabilité et la condamnation à mort prononcées par contumace contre cet homme. Cette lettre indiquait : « Kamal Hassan Ramezan Soulo (Kamal Soor) a été condamné à mort par la troisième chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia le 12 novembre 2011 pour mohareb. » Elle précisait : « La condamnation est définitive et doit être signifiée au condamné. ».
L’avocat de Kamal Hassan Ramezan Soulo a par la suite porté plainte auprès du parquet, affirmant que ce qui s’était produit dans l’affaire concernant son client était illégal, et que celui-ci n’avait pas eu la possibilité d’être entendu par un tribunal ni de présenter des éléments prouvant qu’il n’était pas « Kamal Soor ». Le service d’application des peines, qui relève du parquet, a alors transmis l’affaire pour avis à la troisième chambre du tribunal révolutionnaire. Le 22 août 2017, le tribunal a jugé que la condamnation à mort avait été prononcée contre « Kamal Soor » et ne devait pas être appliquée à Kamal Hassan Ramezan Soulo tant qu’une nouvelle enquête n’avait pas été menée pour déterminer si ces deux noms faisaient référence à la même personne. Dans son jugement, le tribunal a relevé que, selon les gardiens de la révolution, il ne s’agissait pas de la même personne et « Kamal Soor » était toujours en liberté.
Le mois suivant, l’avocat de Kamal Hassan Ramezan Soulo a soumis des éléments de preuve au parquet et à la première chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia, qui était chargée des nouvelles poursuites engagées contre « Kamal Soor » en 2015. Il leur a notamment présenté des papiers d’identité prouvant que Kamal Hassan Ramezan Soulo était né à Ras al-Aïn, dans le gouvernorat d’Hassaké, en Syrie, alors qu’il avait été établi que « Kamal Soor » était né à Mardin, en Turquie. Ces documents établissaient en outre que Kamal Hassan Ramezan Soulo était né le 1er janvier 1990, ce qui signifie qu’il n’avait que 16 ans au moment de l’attaque de 2006, un âge incompatible avec les informations des services de renseignement indiquant que « Kamal Soor » était un haut responsable du PJAK.
Sur la base de ces preuves, confirmées par les gardiens de la révolution, la première chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia a conclu en septembre 2017 que Kamal Hassan Ramezan Soulo et « Kamal Soor » n’étaient pas la même personne et a dissocié Kamal Hassan Ramezan Soulo de la nouvelle affaire en cours contre « Kamal Soor ». Malgré tout, les agents du ministère du Renseignement continuent de refuser de reconnaître la véritable identité de Kamal Hassan Ramezan Soulo, et demandent toujours son exécution.
Le 2 mars 2020, son avocat a déposé une nouvelle plainte devant le parquet. Après plusieurs démarches supplémentaires, la plainte a été transmise à la première chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia. Début juin 2020, le tribunal a confirmé, une nouvelle fois, que Kamal Hassan Ramezan Soulo et « Kamal Soor » n’étaient pas la même personne et a ordonné au parquet de localiser « Kamal Soor ». Cependant, Kamal Hassan Ramezan Soulo se trouve toujours en détention arbitraire.