Depuis de nombreuses années, les personnes qui militent en faveur des droits des LGBTI en Ukraine sont confrontées à des agressions physiques de la part de groupes violents prônant la haine et la discrimination. Les auteurs de telles attaques sont rarement tenus pour responsables de leurs actes et bénéficient donc d’une impunité quasi totale.
Le droit à la liberté de réunion pacifique est inscrit dans des traités internationaux relatifs aux droits humains qui sont juridiquement contraignants et que l’Ukraine a ratifiés, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 21). Ce droit, tel qu’il est décrit dans le droit et les normes internationaux, impose des obligations à l’État, qui doit notamment prendre des mesures de sécurité adéquates, et il incombe aux autorités de veiller à ce que les rassemblements pacifiques puissent avoir lieu.
En 2018, à Kiev, des militant.es en faveur des droits des personnes transgenres ont informé leurs sympathisant.es via Facebook de leur intention d’organiser une marche pour défendre les droits de ces personnes le 18 novembre. Plusieurs groupes violents connus pour prôner la discrimination et s’en prendre aux personnes LGBTI ont alors promis publiquement de perturber l’événement et ont invité leurs sympathisants à se joindre à eux.
Leurs menaces publiques de violence ont contraint celles et ceux qui organisaient le rassemblement à modifier le lieu de l’évévement, qui devait avoir lieu sur la place Mykhaïlyvska, pour le déplacer au parc Taras Chevtchenko. Dans la matinée du 18 novembre, vers 10 h 30, des membres d’Amnesty International ont constaté que des dizaines d’individus, dont certains étaient masqués et beaucoup arboraient l’emblème des groupes violents à l’origine des menaces, se rassemblaient au parc Taras Chevtchenko. Ils portaient des pancartes transphobes et ont prié en public.
Vers 11 h 30, une demi-heure avant le rassemblement, la police a dit aux organisateurs qu’elle ne serait pas en mesure d’assurer la sécurité de l’événement et a insisté pour que le rassemblement soit transféré à la station de métro Universytet, non loin de là.
À midi, lorsqu’une trentaine de militant.es en faveur des droits des personnes transgenres se sont réunis devant la station Universytet, des policiers en tenue antiémeute les ont encerclés. Peu après, des contre-manifestants violents se sont mis à lancer des grenades fumigènes vers le groupe depuis l’autre côté de la rue. La police n’est pas intervenue pour les en empêcher et n’a arrêté aucun d’entre d’eux.
Quelques minutes plus tard, un groupe d’une dizaine de contre-manifestants s’est approché du rassemblement de manière agressive et s’est positionné autour des militant.s. La police a alors interrompu le rassemblement pacifique, a encerclé ses participant.es et les a forcés à entrer dans la station de métro, mettant ainsi un coup d’arrêt à l’événement. Les contre-manifestants ont ensuite pris place devant la station de métro, déployé leurs banderoles et leurs drapeaux et prononcé des discours transphobes. La police n’a visiblement fait aucun effort pour intervenir et a permis aux contre-manifestants de tenir leur rassemblement à l’endroit même que les militant.es en faveur des droits des personnes transgenres avaient été forcés à quitter.
Dans le courant de la journée, le service de presse de la police nationale de Kiev a annoncé que la police avait contrecarré une « provocation » des groupes d’extrême droite contre les militant.es en faveur des droits des personnes transgenres, mais il n’a fait état d’aucune arrestation liée à cet événement. Amnesty International a tenté à maintes reprises de contacter le service de presse du ministère de l’Intérieur pour obtenir de plus amples informations sur sa réaction à l’événement, mais sans succès.