Depuis le début du conflit armé interne au Soudan du Sud en décembre 2013, des centaines de personnes, pour la plupart des hommes, sont détenues sous l’autorité du Service de la sécurité nationale (NSS) et de la Direction du renseignement militaire dans divers centres de détention à travers la capitale, Djouba. Nombre d’entre elles sont détenues pour des « motifs politiques » sur la base d’allégations selon lesquelles elles auraient communiqué avec l’opposition ou l’auraient soutenue. D’autres, à l’instar de Michael Wetnhialic, ont été arrêtées à de multiples reprises pour avoir critiqué le directeur du NSS sur Facebook.
Amnesty International a recueilli des informations sur de nombreux cas de détention arbitraire par le NSS dans divers centres, où les détenus sont souvent soumis à des actes de torture et d’autres mauvais traitements – certains sont détenus au secret sans pouvoir consulter un avocat ni communiquer avec leurs proches. D’autres ont été victimes de disparition forcée. Détention prolongée et arbitraire, disparitions forcées, torture et autres mauvais traitements sont fréquemment employés par les autorités au Soudan du Sud depuis que le conflit a éclaté en décembre 2013.
Le militant et universitaire sud-soudanais Peter Biar Ajak, notamment, a été arrêté par le NSS à l’aéroport international de Djouba le 28 juillet 2018. Il a été détenu au siège du NSS à Djouba. Le 11 juin 2019, un tribunal sud-soudanais l’a condamné à une peine d’emprisonnement pour incitation à la violence publique et troubles à l’ordre public à l’issue d’un procès qu’Amnesty International a qualifié de simulacre, puis il a été transféré à la prison centrale de Djouba. Le président Salva Kiir l’a gracié en janvier 2020 et il a été libéré.
Dong Samuel Luak, avocat et défenseur des droits humains sud-soudanais réputé, et Aggrey Idrey Idri, détracteur du gouvernement et membre du Mouvement populaire de libération du Soudan-Opposition (MPLS-Opposition), ont disparu dans la nuit du 23 au 24 janvier 2017 à Nairobi, au Kenya. Amnesty International a reçu des informations crédibles selon lesquelles ces deux hommes ont été vus ensuite au siège du NSS à Djouba.
Ils ont été emmenés ailleurs le 27 janvier 2017 au soir. En avril 2019, le Groupe d’experts des Nations unies sur le Soudan du Sud a publié un rapport dans lequel il a conclu qu’il était « hautement probable » qu’ils aient été victimes d’une exécution extrajudiciaire aux mains d’agents du NSS dans un centre de détention se trouvant sur le domaine d’une ferme appartenant au président à Luri, non loin de Djouba, le 30 janvier 2017.
Dans la prison située au siège du NSS (Blue House), dans le quartier de Djebel, les détenus sont roués de coups, en particulier lors des interrogatoires ou à titre punitif. En raison des mauvaises conditions de vie dans les prisons, ainsi que d’un accès insatisfaisant aux soins médicaux, il arrive fréquemment que la santé des personnes détenues se dégrade dans ces établissements.
Au Soudan du Sud, l’environnement politique demeure intolérant envers la critique des actions et des politiques du gouvernement, ce qui se traduit par l’intimidation, le harcèlement et la détention de militant·e·s de la société civile, de défenseur·e·s des droits humains et de journalistes indépendants. Cela a engendré un climat d’autocensure parmi les médias et les défenseur·e·s des droits humains ; du fait d’une surveillance d’État omniprésente, les gens ne se sentent plus assez en sécurité pour parler librement et ouvertement du conflit et de la situation des droits humains.