Écrire Une mère demande que l’on retrouve son fils disparu

Dmytro Korolio a été arrêté, déclaré coupable et condamné à cinq ans d’emprisonnement avec sursis en 2015 pour avoir rejoint les forces séparatistes dans l’est de l’Ukraine. Sa mère affirme qu’il a été enlevé par les Services de sécurité ukrainiens lorsqu’il a été « libéré » le 3 août 2015 et qu’il est en détention secrète depuis. Elle craint pour sa sécurité.

Dmytro Koroliov, un ancien policier anti-émeute ukrainien de Zaporijia (est de l’Ukraine) avait rejoint les forces séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine en juin 2014. Un mois plus tard, il est parti et est rentré chez lui. Il a été arrêté le 5 janvier 2015 et a été déclaré coupable le 2 juillet 2015 d’avoir créé un groupe armé illégal et évité la conscription. Il a été condamné à cinq ans d’emprisonnement avec sursis. Le 3 août 2015, le jour où la décision du tribunal est entrée en vigueur et où il devait être libéré, des membres de la famille de Dmytro Koroliov sont venus l’accueillir devant le centre de détention. Ils ont expliqué qu’ils ont attendu devant l’entrée aussi longtemps qu’ils pouvaient supporter la chaleur de l’été, mais qu’à 14 heures, ils se sont abrités du soleil à l’ombre et ne pouvaient plus voir l’entrée. À ce moment-là, ils ont entendu Dmytro Koroliov appeler au secours. Ils se sont précipités vers l’entrée du centre de détention, mais Dmytro Koroliov n’y était pas.

Selon des témoins, un homme dont la description correspond à celle de Dmytro Koroliov a été appréhendé par un groupe d’hommes inconnus alors qu’il quittait le centre de détention. Il a été contraint à monter dans une voiture et emmené. D’après les informations de la plaque d’immatriculation de la voiture, elle appartenait probablement aux services de sécurité ukrainiens (SBU). On ignore où il se trouve depuis.

Contre toute attente, Dmytro Koroliov a appelé sa mère en octobre 2015 et lui a dit de demander aux autorités de facto des séparatistes de Donetsk de l’inscrire sur la liste d’échange de prisonniers. Il l’a de nouveau appelée en avril, mai et juin 2016 confirmant qu’il était en détention secrète aux mains des SBU, en vue d’un échange de prisonniers.

La mère de Dmytro Koroliov a signalé son enlèvement aux autorités et une enquête officielle sur sa disparition a été ouverte le 8 août 2015. Elle a reçu une réponse officielle des SBU, entre autres organismes, dans laquelle ils niaient savoir où se trouve Dmytro Koroliov depuis sa libération officielle du centre de détention le 3 août 2015.

Le 21 juillet, Amnesty International et Human Rights Watch ont publié le rapport conjoint (en anglais) intitulé “You Don’t Exist” : Arbitrary Detentions, Enforced Disappearances, and Torture in Eastern Ukraine (https://www.amnesty.org/fr/documents/eur50/4455/2016/fr/). Le rapport met en lumière des cas de disparitions forcées, entre autres atteintes, sur le territoire contrôlé par les autorités gouvernementales. Il fournit des éléments qui laissent penser que des détentions illégales non reconnues ont eu lieu dans des locaux des SBU à Kharkov, Kramatorsk, Izioum et Marioupol. Il présente les témoignages détaillés et accablants de trois personnes qui affirment avoir été maintenues en détention illégale non reconnue par des membres des SBU pendant des périodes de six semaines à 15 mois.

Trois autres cas de disparitions forcées aux mains de représentants des SBU ont été signalés à Amnesty International après la finalisation du texte du rapport, notamment celui de Dmytro Koroliov et Alexandre Dydovytch (https://www.amnesty.org/fr/documents/eur50/4455/2016/fr/). Un rapport de l’ONU de juin 2016 (disponible en anglais à l’adresse : http://www.ohchr.org/Documents/Countries/UA/Ukraine_14th_HRMMU_Report.pdf) a également fait état d’un centre des SBU à Kharkov soupçonné d’être un lieu de détention non officiel.

Lors de rencontres officielles avec des représentants ukrainiens en juillet 2016, des délégués d’Amnesty International et de Human Rights Watch ont été informés que les SBU ne disposaient pas de centres de détention, mis à part celui de la capitale, Kiev, et qu’ils ne pratiquaient pas de détention secrète. Le procureur militaire en chef de l’Ukraine a également assuré pendant ces rencontres que toutes les allégations présentées dans le rapport conjoint feraient l’objet d’une enquête.

Les enquêtes officielles menées précédemment sur des atteintes présumées aux droits humains par des membres des forces ukrainiennes et des « bataillons de volontaires » engagés dans le combat contre les forces séparatistes n’ont pas été efficaces.

Kostiantine Beskorovaynyi, qui avait été victime d’une disparition forcée (https://www.amnesty.org/fr/documents/eur50/3275/2016/fr/), puis libéré de sa détention secrète en février 2016, vit actuellement sur le territoire contrôlé par les forces gouvernementales en Ukraine et a expliqué à Amnesty International que depuis sa libération, il fait l’objet de menaces et de manœuvres de harcèlement visant à le forcer à revenir sur son témoignage et à trouver une autre explication pour son absence de chez lui et du travail pendant 15 mois.

Les échanges de prisonniers auxquels procèdent les deux parties au conflit à Donbass ont commencé au printemps 2014 et ont été marqués par des violations des droits des personnes destinées à être échangées des deux côtés. Les éléments présentés par Amnesty International et Human Rights Watch dans le rapport conjoint cité ci-dessus indiquent que certains détenus sont devenus une « monnaie » d’échange.

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