Écrire Un migrant détenu illégalement, en danger

Jean Marie Justilien, ressortissant haïtien, a reçu une balle dans la nuque lors d’une descente des services d’immigration en juin 2015. Il a ensuite été placé en détention et accusé d’être entré illégalement sur le territoire bahamien. Cet homme a été relaxé le 2 décembre mais il a pourtant été conduit au centre de détention de Carmichael Road, qui dépend des services d’immigration, où il se trouve encore. Il risque d’être victime d’autres mauvais traitements et a besoin de soins médicaux de toute urgence.

Jean Marie Justilien, ressortissant haïtien, a été arrêté en juin 2015 lors d’une descente des services d’immigration sur l’île d’Eleuthera, aux Bahamas. À cette occasion, il a reçu une balle dans la nuque, apparemment tirée par un agent des services d’immigration. Le rapport médical officiel indique la balle est entrée dans la nuque et ressortie par la joue gauche, et que cet homme a reçu plusieurs autres blessures aux jambes et au coude. Selon les médias, les autorités ont affirmé que Jean Marie Justilien avait tenté de désarmer un agent, ce dont il n’a pourtant pas été accusé. L’Association bahamienne des droits humains a publiquement réclamé une enquête indépendante sur ces événements, en vain jusqu’ici, mais les avocats de la défense ont intenté une action en justice pour voies de fait et violences.

Jean Marie Justilien a été accusé d’être entré illégalement sur le territoire bahamien, ce qui constitue une violation de l’article 19, alinéas 1 et 2 de la Loi sur l’immigration. Il s’est vu refuser la libération sous caution et a été maintenu en détention à la prison de Fox Hill pendant plus de cinq mois. Ses avocats ont expliqué qu’il se trouvait dans une cellule surpeuplée dans le quartier de sécurité maximale de la prison. Cet homme a comparu devant le tribunal le 27 novembre et le 1er décembre. Le juge a finalement décidé de le relaxer et ordonné sa libération. Malgré cela, les services d’immigration ont indiqué qu’ils ne pouvaient pas se conformer à cette décision, n’ayant pas connaissance du statut de Jean Marie Justilien au regard de la législation sur l’immigration. Les avocats de la défense ont déposé une requête en habeas corpus pour réclamer la libération immédiate de leur client, mais celle-ci ne sera pas examinée avant le 10 décembre prochain.

Les avocats de Jean Marie Justilien craignent qu’il soit victime de mauvais traitements au centre de détention de Carmichael Road et qu’il fasse l’objet de représailles de la part des agents impliqués dans la fusillade. Ils ont demandé à plusieurs reprises qu’un médecin indépendant soit autorisé à l’examiner en prison. Toujours d’après ses avocats, cet homme ne reçoit pas de soins médicaux adaptés, a perdu du poids et souffre encore des blessures qui lui ont été infligées en juin dernier.

Plusieurs organes et agents des Nations unies, notamment le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et le rapporteur spécial sur les droits humains des migrants, s’opposent au fait de considérer l’entrée ou le séjour illégal(e) dans un pays comme une infraction pénale, préférant qualifier ces faits d’infraction administrative.

En septembre 2014, le ministre bahamien des Affaires étrangères et de l’Immigration a annoncé des réformes à venir en matière d’immigration. La Loi (révisée) sur l’Immigration a été promulguée en mai 2015.

Dans une déclaration publique datée du 17 novembre 2014, Amnesty International a fait remarquer que la nouvelle politique annoncée deux mois plus tôt devait encore être rendue publique alors qu’elle était déjà appliquée en partie depuis le 1er novembre 2014.

Plusieurs organisations bahamiennes de défense des droits humains ont signalé que la mise en œuvre de cette politique avait exacerbé un climat de xénophobie dans le pays et entraîné des arrestations, des placements en détention et des expulsions de personnes considérées comme des migrants en situation irrégulière, principalement des Bahamiens d’origine haïtienne et des Haïtiens.

En février 2015, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a accordé des mesures conservatoires pour les détenus du centre de Carmichael Road, qui semblent vivre dans des conditions inhumaines, enfermés dans des cellules surpeuplées et ne recevant pas de soins médicaux appropriés.

En mars 2015, Amnesty International a envoyé une lettre aux autorités bahamiennes pour demander des informations détaillées concernant les réformes en cours en matière d’immigration, craignant que celles-ci n’entraînent des violations des droits humains et n’exacerbe la discrimination dans le pays. À ce jour, l’organisation n’a reçu aucune réponse.

En octobre 2015, un camp abritant plus de 200 personnes, principalement des Bahamiens d’origine haïtienne et des migrants haïtiens, a été rasé par les agents du département de l’Environnement et des Services de santé et du département de l’Immigration, ce qui suggère une expulsion forcée. Les médias ont rapporté que des femmes et des enfants avaient été laissés devant leurs maisons démolies, leurs affaires étalées le long de la route. Amnesty International a écrit aux autorités pour connaître les raisons de cette expulsion, mais elle n’a reçu aucune réponse.

La Cour suprême des Bahamas a récemment ordonné que le gouvernement rende publics ses dossiers sur la nouvelle politique controversée relative à l’immigration et appliquée depuis le 1er novembre 2015, décision que plusieurs organisations de défense des droits humains considèrent comme une victoire pour la transparence et la reddition de comptes. Le gouvernement doit encore publier ces dossiers.

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