Écrire Un militant renvoyé de force est exposé à un risque accru de torture

Sans que sa famille en ait été officiellement informée, Dong Guangping a été transféré dans un nouveau centre de détention. Cet homme est détenu au secret sans jugement depuis son renvoi forcé depuis la Thaïlande en 2015, et son transfert renforce les craintes qu’il ne fasse l’objet d’un procès inique et qu’il ne soit torturé.
La famille de Dong Guangping a appris son transfert par un ami en octobre, mais elle n’a reçu aucune notification directe des autorités, contrairement à ce que prévoit la législation chinoise.

Le 19 octobre, un ami de Dong Guangping s’est présenté au centre de détention n° 2 de la zone municipale de Chongqing, où Dong Guangping avait été initialement été incarcéré, pour lui faire parvenir de l’argent. Cependant, le centre de détention a refusé d’accéder à sa demande, indiquant que Dong Guangping avait été transféré dans un autre centre de détention en septembre. Faute d’informations directes de la part des autorités, ce n’est qu’à la fin du mois d’octobre que la famille de Dong Guangping a réussi à savoir qu’il avait été transféré dans le centre de détention de Nananqu, dans la zone municipale de Chongqing.

En Chine, les détenus doivent acheter la plupart des produits de première nécessité, comme le dentifrice, le papier hygiénique et de la nourriture pour améliorer l’ordinaire, en utilisant de l’argent qui leur est transmis depuis l’extérieur. La plupart du temps, les amis de Dong Guangping n’étaient pas autorisés à lui faire parvenir de l’argent, à la différence d’autres détenus, car le centre de détention exigeait qu’ils présentent la notification de son arrestation officielle, que sa famille n’a jamais reçue.

Reconnu comme réfugié, Dong Guangping avait obtenu le feu vert pour une réinstallation rapide, mais il a fait l’objet d’un retour forcé en Chine le 13 novembre 2015, alors qu’il était prévu qu’il quitte la Thaïlande pour un pays tiers cinq jours plus tard et qu’il courait un risque réel et connu de subir de graves violations des droits humains en Chine. Bien qu’il soit détenu depuis près de deux ans, sa famille n’a toujours pas été directement informée par les autorités de son lieu de détention, de son arrestation, de son inculpation ni des charges pesant sur lui. Ce n’est que par l’intermédiaire de l’avocat désigné par les autorités pour remplacer celui qu’elle avait engagé que la famille de Dong Guangping a appris qu’il avait été inculpé de « subversion de l’État » et de « franchissement illégal de la frontière nationale ».

Dong Guangping était policier en Chine. Il a été mis fin à son contrat en 1999, après qu’il a cosigné une lettre publique et distribué des articles dans différentes villes à l’occasion du 10e anniversaire des manifestations de la place Tiananmen, durement réprimées en 1989. Dong Guangping a déjà été placé en détention plusieurs fois en Chine en raison de ses activités militantes, pourtant pacifiques. Emprisonné pendant trois ans en 2001 pour « incitation à la subversion de l’État », il a été détenu entre mai 2014 et février 2015 par les autorités chinoises pour avoir participé à un événement en hommage aux victimes de la répression des manifestations organisées en 1989 sur la place Tiananmen. Il est parti en Thaïlande en septembre 2015 avec sa femme et sa fille pour échapper au harcèlement.

Lorsque le gouvernement thaïlandais a renvoyé de force Dong Guangping et Jiang Yefei, un autre militant, en Chine le 13 novembre 2015, ils avaient déjà été reconnus réfugiés par le HCR et acceptés pour une réinstallation rapide dans un pays tiers, et devaient partir le 18 novembre. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) ont exprimé de vives inquiétudes quant au renvoi forcé de Jiang Yefei et Dong Guangping et quant au fait qu’ils risquent d’être victimes d’actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Les deux hommes ont été vus le 26 novembre 2015 dans un enregistrement de l’agence de presse d’État, CCTV, « avouant » avoir commis des infractions liées à la traite d’êtres humains et « reconnaissant » que Jiang Yefei avait aidé Dong Guangping à franchir « illégalement » la frontière thaïlandaise. Après avoir vu la vidéo, leurs proches ont déclaré que les deux hommes avaient peut-être été victimes d’actes de torture et d’autres mauvais traitements. Ils estiment que leur expression faciale et le ton de leur voix étaient différents de l’ordinaire et qu’ils présentaient des signes de douleur et de stress.

Les autorités ont annulé sans fournir aucun motif l’audience prévue en avril 2017 dans l’affaire concernant Dong Guangping. L’avocat désigné par les autorités, qui a remplacé en août 2016 celui que la famille de Dong Guangping avait engagé, s’est dessaisi du dossier le 14 juillet 2017 en raison des difficultés qu’il rencontrait pour traiter l’affaire. L’avocat initialement engagé par la famille de Dong Guangping s’est rendu une nouvelle fois au centre de détention de Chongqing le 24 juillet 2017. Sur place, il s’est vu refuser à plusieurs reprises de rencontrer son client, comme les autorités ne reconnaissaient pas sa légitimité, et il n’a pas pu examiner l’acte d’inculpation ni aucun document présenté par les autorités contre Dong Guangping.
La famille de Dong Guangping, qui est réinstallée dans un pays tiers, pense qu’elle serait harcelée, voire placée en détention, si elle retournait en Chine. Sa femme a même cessé de communiquer avec ses propres parents après que la police s’est rendue à leur domicile en septembre 2016, affirmant que leur fille était en contact avec des « forces hostiles étrangères ». Un inconnu, soupçonné d’avoir des liens avec les autorités, a appelé la femme de Dong Guangping en 2016 pour tenter de la persuader de rentrer en Chine depuis le pays où la famille a été réinstallée. Il l’a menacée, disant que Dong Guangping serait emprisonné pendant plus de 10 ans et qu’il ne reverrait peut-être plus sa femme si elle ne rentrait pas en Chine avec sa fille.

Les pays d’Asie du Sud-Est bafouent de plus en plus souvent le principe de « non-refoulement » en cédant aux pressions diplomatiques de la Chine. Ce principe interdit le transfert d’une personne dans un pays ou une juridiction où elle risquerait réellement de subir de graves violations des droits humains ou de graves atteintes à ces droits. Il est protégé par de nombreux traités internationaux et fait désormais partie du droit international coutumier, qui lie tous les États, que ceux-ci aient ou non ratifié les traités concernés, parmi lesquels figurent la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants.

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