Présidente d’une organisation appelée Ligue pour la défense des droits humains et contre le pillage des ressources naturelles, Sultana Khaya est connue pour militer haut et fort, de façon pacifique, afin d’obtenir que le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination soit respecté.
Lors d’un entretien téléphonique avec Amnesty International le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, Sultana Khaya a déploré le fait de devoir passer cette journée à « souffrir » en étant « assiégée » chez elle. Depuis le 19 novembre 2020, les mouvements de Sultana Khaya et de sa famille sont limités à l’enceinte de leur domicile. Des vidéos, examinées par Amnesty International et filmées par Sultana Khaya et sa sœur Waraa Khaya différents jours depuis le 19 novembre 2020, montrent des membres des forces de sécurité en uniforme et en civil devant la maison, et parfois des véhicules de police garés à l’extérieur. Sultana Khaya n’a pas pu dépasser à pied le coin de sa maison avant d’être ramenée chez elle de force par des policiers qui la portaient en la tenant par les mains et par les jambes. Sur une vidéo filmée le 17 février, on voit des policiers en civil traîner Waraa Khaya et la forcer à entrer dans la maison, claquant la porte d’entrée et donnant des coups dans la porte à plusieurs reprises.
En vertu du droit international relatif aux droits humains, l’assignation à résidence constitue une forme de détention et certaines garanties doivent être observées pour qu’elle soit considérée comme légale. Selon l’Observation générale n° 35 du Comité des droits de l’homme des Nations unies sur l’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la privation de liberté, y compris l’assignation à résidence, doit être non arbitraire, se dérouler dans le respect du droit et permettre un contrôle juridictionnel significatif et rapide de la détention. La privation de liberté, y compris sous la forme d’une assignation à résidence, est arbitraire lorsqu’elle résulte de l’exercice de droits humains, y compris les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique.
Le Sahara occidental fait l’objet d’un litige territorial entre le Maroc, qui a annexé ce territoire en 1975 et revendique sa souveraineté sur celui-ci, et le Front populaire pour la libération de la Saguia el Hamra et du Rio de Oro (Front Polisario), qui appelle à la création d’un État indépendant et a établi un gouvernement autoproclamé, en exil dans les camps de réfugiés de Tindouf (sud-ouest de l’Algérie). Un accord conclu aux Nations unies en 1991, qui a mis fin aux affrontements entre le Maroc et le Front Polisario, requérait l’organisation d’un référendum afin que le peuple du Sahara occidental puisse exercer son droit à l’autodétermination, en choisissant l’indépendance ou l’intégration au Maroc. Le référendum n’a toujours pas eu lieu, du fait de désaccords persistants sur le processus visant à déterminer qui est habilité à voter dans le cadre de cette consultation.
Ces dernières années, l’accès au Sahara occidental est devenu de plus en plus difficile pour les observateurs extérieurs alors que la situation des droits humains continuait à se détériorer. En 2020, les autorités marocaines ont empêché au moins neuf avocats, militants et responsables politiques de se rendre au Sahara occidental. Les journalistes se voient également refuser l’accès à ce territoire, ce qui fait que le combat des militantes et militants des droits humains est très peu couvert. Le Conseil de sécurité des Nations unies n’a pas donné suite aux appels d’Amnesty International et d’autres l’incitant à adjoindre une composante droits humains à la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), ce qui permettrait de surveiller les violations des droits humains et d’en rendre compte, comme le font la grande majorité des missions comparables des Nations unies dans le monde