Le 17 janvier 2018, des agents de la police des frontières des États-Unis ont arrêté Scott Warren, défenseur des droits humains et travailleur humanitaire bénévole. Le ministère de la Justice des États-Unis l’a poursuivi pour trois chefs d’accusation de crimes graves, deux d’« hébergement » et un de « complot », en raison de ses activités humanitaires dans des zones frontalières entre les États-Unis et le Mexique. En juin 2019, son procès s’est soldé par une annulation. Le 2 juillet 2019, le parquet fédéral américain a décidé de rejuger Scott Warren pour les deux chefs d’« hébergement ». Son nouveau procès s’ouvrira le 12 novembre 2019. S’il est déclaré coupable de ces deux chefs d’accusation, il encourra 10 ans d’emprisonnement. Les autorités doivent abandonner immédiatement toutes les charges retenues contre Scott Warren en raison de ses activités humanitaires, qui ont un caractère vital.
Écrire Les poursuites visant un défenseur des droits humains doivent être abandonnées
Le cas de Scott Warren fait partie de ceux qu’Amnesty International a évoqués en juillet 2019 dans un rapport intitulé ‘Saving lives is not a crime’ : Politically motivated legal harassment of migrant human rights defenders by the USA.
Scott Warren est professeur de géographie et travailleur humanitaire bénévole à Ajo, en Arizona (États-Unis). Titulaire d’un doctorat en géographie, il vit à Ajo depuis 2013. L’opération au cours de laquelle il a été arrêté s’est produite à « La Grange » (The Barn), un lieu dédié à l’aide humanitaire à Ajo, ville située à 56 kilomètres au nord de la frontière entre les États-Unis et le Mexique, dans un couloir de migration de 112 kilomètres traversant le désert de Sonora, dans le sud de l’Arizona. Propriété d’un médecin de la ville, « La Grange » est utilisée par de nombreux groupes humanitaires qui s’emploient à empêcher que des personnes migrantes ne meurent dans le désert de Sonora. Celles-ci s’y voient notamment proposer de la nourriture, de l’eau, des soins médicaux et un endroit où se reposer.
L’arrestation de Scott Warren a eu lieu quelques heures après la publication d’un rapport de l’organisation pour laquelle il travaille à titre bénévole, No More Deaths, rendant compte de la destruction volontaire par des agents de la police des frontières des États-Unis de matériel destiné à l’aide humanitaire dans les zones frontalières entre les États-Unis et le Mexique. Une vidéo largement relayée avait montré la destruction de plusieurs bidons d’eau dans le désert par des agents de la police des frontières.
Les recherches d’Amnesty International montrent que les poursuites contre Scott Warren ne sont pas un cas isolé, mais s’inscrivent dans une campagne à caractère politique de harcèlement et d’intimidation judiciaires menée par les autorités américaines, qui constitue une violation flagrante du droit des États-Unis comme du droit international. À cause des conditions extrêmes du désert, de nombreuses personnes migrantes meurent chaque année dans cet environnement hostile près de la frontière. Des défenseures et défenseurs des droits humains faisant partie d’organisations humanitaires, de communautés religieuses, d’organisations militantes et de communautés vivant dans les villes bordant la frontière portent assistance à ces migrants depuis de nombreuses années. Non seulement les autorités des États-Unis ne respectent pas leur obligation d’empêcher que des personnes migrantes ne meurent sur leur territoire, mais elles dissuadent en outre activement les militantes et militants des droits humains de mener leurs activités en les harcelant, en les intimidant et en les poursuivant systématiquement. Celles et ceux qui s’opposent aux politiques d’immigration extrêmes, draconiennes et dangereuses du gouvernement de Donald Trump en venant en aide aux personnes migrantes et demandeuses d’asile pendant leur voyage périlleux vers le nord sont prises pour cible et sanctionnées pour leurs activités pourtant indispensables et salvatrices.
Toutes les personnes qui passent la frontière clandestinement, par le désert ou autrement, ne cherchent pas à obtenir l’asile. Cependant, toutes les personnes migrantes et en quête d’asile ont le même droit fondamental à la vie, que les autorités américaines ne peuvent pas bafouer arbitrairement en les privant directement ou indirectement d’une aide humanitaire vitale.
La répression à l’encontre de celles et ceux qui défendent les droits fondamentaux des personnes migrantes à la frontière entre les États-Unis et le Mexique s’inscrit dans le contexte des attaques du gouvernement Trump contre le système d’asile et de sa politique migratoire en général. Plus d’informations à ce sujet figurent dans le rapport d’Amnesty International intitulé États-Unis. « Vous n’avez aucun droit ici. », publié en 2018. Amnesty International a recueilli des informations montrant que les personnes qui cherchent la sécurité et une protection aux États-Unis sont systématiquement privées de leur droit de solliciter l’asile à la frontière. Il apparaît clairement, lorsqu’on considère dans leur ensemble ces politiques et pratiques des autorités américaines, qu’elles sont mises en œuvre délibérément pour dissuader les personnes en quête d’asile de solliciter une protection et pour sanctioner celles qui déposent des demandes.
Cette stratégie dissuasive comprend différentes tactiques destinées à décourager les personnes en quête d’asile de tenter d’entrer aux États-Unis par les points d’entrée officiels, ce qui les place dans une situation où il est parfois préférable d’emprunter des itinéraires « clandestins » extrêmement dangereux pour franchir la frontière. Parmi ces tactiques figure le « comptage » des demandeurs et demandeuses d’asile, qui consiste à les forcer à s’inscrire sur des listes d’attente illégales comportant des milliers de noms, dont seuls quelques-uns sont appelés chaque jour, quand ce n’est pas aucun. Abandonnées du côté mexicain de la frontière, les personnes migrantes et en quête d’asile (en particulier les plus vulnérables, tels que les personnes LGBTI, les personnes âgées, les mineurs isolés, les femmes enceintes, etc.) sont souvent attaquées et risquent d’autant plus d’être victimes d’enlèvements, de chantage et de violence aux mains de réseaux de crime organisé. Face à ces risques de subir un préjudice irréparable, beaucoup prennent la décision difficile de franchir la frontière entre les points d’entrée officiels, notamment au moyen d’itinéraires dangereux passant par le désert. Ces personnes sont souvent contraintes de recourir à des passeurs pour les guider.
LIEN VERS L’AU PRÉCÉDENTE : https://www.amnesty.org/download/Documents/AMR5103632019FRENCH.pdf
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