Écrire Des prisonniers d’opinion risquent l’emprisonnement à vie

Quatre militants politiques papous sont en détention à Manado (province du Sulawesi-Nord) depuis le 19 décembre 2016 pour « rébellion » (makar). Ils sont détenus uniquement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, et sont donc considérés comme des prisonniers d’opinion.

Hiskia Meage, Emanuel Ukago, Panus Hesegem et William Wim sont des membres d’une organisation favorable à l’indépendance des Papous, le Comité national de Papouasie occidentale (KNPB), à Manado (province du Sulawesi-Nord). Ils font partie des 70 personnes au moins qui ont été arrêtées par la police de Manado le 19 décembre 2016. Ces militants papous manifestaient pour soutenir l’adhésion, en tant que membre à part entière, du Mouvement de libération uni pour la Papouasie occidentale (ULMWP), un organisme papou pacifique regroupant plusieurs mouvements indépendantistes, au Groupe mélanésien Fer de lance (GMFL), une organisation intergouvernementale sous-régionale du Pacifique. Cette manifestation coïncidait avec l’anniversaire de la première opération militaire indonésienne (Operasi Trikora) en Papouasie en 1961, quand celle-ci était encore une colonie néerlandaise.

Cette manifestation faisait partie de plusieurs manifestations organisées simultanément par le KNPB dans plusieurs villes à travers tout le pays, dont Jayapura, Merauke, Wamena, Nabire (province de Papouasie occidentale), Manado (province du Sulawesi-Nord), Gorontalo et Yogyakarta. Au moins 528 personnes, dont des mineurs, ont été arrêtés dans tout le pays le 19 décembre 2016. La plupart d’entre elles ont été remises en liberté le lendemain sans avoir été inculpées.

Actuellement détenus dans les locaux de la police de Manado (province du Sulawesi-Nord), Hiskia Meage, Emanuel Ukago, Panus Hesegem et William Wim ont été inculpés de « rébellion » (makar) au titre de l’article 106 du Code pénal indonésien et risquent l’emprisonnement à vie.

La Constitution et la législation indonésiennes garantissent le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Les lois sont cependant régulièrement utilisées pour sanctionner des activités politiques non violentes et emprisonner des personnes ayant simplement exercé de manière pacifique leurs droits fondamentaux. Des dizaines de militants politiques pacifiques sont actuellement incarcérés dans la région de Papouasie (provinces de Papouasie et de Papouasie occidentale). Certains ont été condamnés à des peines de 20 ans d’emprisonnement pour avoir organisé des activités ou des manifestations politiques non violentes, pour y avoir assisté ou participé, ou pour possession ou déploiement du drapeau de « l’Étoile du matin », emblème interdit de l’indépendance papoue.

Un grand nombre des personnes arrêtées sont accusées de « rébellion » (makar) en vertu des articles 106 et 110 (atteintes à la sûreté de l’État) du Code pénal indonésien. Amnesty International a recueilli des informations sur un recours excessif à la force, aux armes à feu, ainsi qu’à la torture et autres mauvais traitements à l’encontre de militants politiques, entre autres, accusés d’avoir des liens avec des groupes pro-indépendance. Il est rare que les auteurs de ces actes soient amenés à rendre des comptes, et les membres des forces de sécurité concernés reçoivent tout au plus des sanctions disciplinaires, et non pénales. Pour plus d’informations sur cette question, voir les documents d’Amnesty International disponibles aux adresses https://www.amnesty.org/fr/documents/asa21/5480/2017/fr/, https://www.amnesty.org/fr/documents/asa21/5409/2016/fr/, https://www.amnesty.org/fr/documents/asa21/3010/2015/fr/, https://www.amnesty.org/fr/documents/asa21/1932/2015/fr/ et https://www.amnesty.org/fr/documents/asa21/3797/2016/fr/.
Le Mouvement de libération uni pour la Papouasie occidentale (ULMWP), créé en décembre 2014, regroupe différents mouvements indépendantistes papous.
Le Groupe mélanésien Fer de lance est une organisation intergouvernementale à caractère politique fondée en 1983 et composée de quatre États mélanésiens (Fidji, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Salomon et Vanuatu) et du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) de Nouvelle-Calédonie. L’Indonésie en est un membre associé et l’ULMWP, un membre observateur.

Amnesty International ne prend aucunement position sur le statut politique des provinces d’Indonésie, ni sur les appels à l’indépendance. Cependant, l’organisation estime que le droit à la liberté d’expression comprend le droit de prôner pacifiquement le recours aux référendums, l’indépendance ou d’autres solutions politiques.

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