Le procès de Natalia Charina s’est ouvert le 2 novembre et, si elle est déclarée coupable, elle encourt jusqu’à 10 ans de prison. Natalia Charina est une prisonnière d’opinion et doit donc être libérée immédiatement et sans condition.
Le procès de Natalia Charina s’est ouvert après que le bureau du procureur de Moscou a transféré son dossier au tribunal de Meschanski à Moscou, le 7 octobre. Lors de la première audience le 2 novembre, Natalia Charina a déclaré qu’elle comprenait le chef d’accusation de « détournement d’une très grande ampleur », et qu’elle plaidait non coupable. Pour les accusations d’« incitation à l’hostilité ou à la haine par abus de pouvoir », elle a déclaré ignorer lequel de ses actes avait enfreint la loi.
Son avocat a en outre remis en cause l’acte d’inculpation en faisant valoir qu’aucun élément dans le dossier ne prouve que Natalia Charina avait « des intentions extrémistes et des sentiments anti-Russes ». Il a poursuivi en déclarant que les charges de détournement étaient infondées, car tous les contrats en question avaient été approuvés par ses supérieurs. La fille de Natalia Charina a déclaré à Amnesty International que nombre des anciens collègues de sa mère, ainsi que des usagers de la bibliothèque, sont venus la soutenir au procès. La prochaine audience aura lieu le 23 novembre.
L’équipe de la défense espérait que le tribunal renverrait l’affaire de Natalia Charina devant le bureau du procureur. Toutefois, le 21 octobre 2016, le tribunal a rejeté leur demande et ordonné la poursuite du procès. Le même jour, il a également prolongé son placement en résidence surveillée jusqu’au 28 avril 2017, tout en autorisant Natalia Charina à bénéficier de promenades quotidiennes, en extérieur, pendant deux heures. C’est une mesure positive, car sa fille a déclaré que sa peine avait contribué à la dégradation de la santé de sa mère et qu’elle n’était pas autorisée à avoir accès aux soins médicaux dont elle a besoin. En effet, Natalia Charina se trouve en résidence surveillée depuis un an, sans être autorisée à quitter son appartement ni communiquer avec le monde extérieur, sauf avec son avocat et les parents proches avec lesquels elle vit.
Écrire Le procès d’une bibliothécaire s’est ouvert a Moscou
Natalia Charina travaille comme bibliothécaire depuis 1981, après avoir obtenu un diplôme à la faculté de philologie de l’université fédérale d’Extrême-Orient de Vladivostok. En 1986, elle a déménagé à Moscou avec sa famille, et a continué à travailler dans diverses bibliothèques. En 2006, elle a été nommée directrice de la Bibliothèque de littérature ukrainienne, un organisme public situé à Moscou. Elle est inculpée d’« incitation à l’hostilité et à la haine par abus de pouvoir » (article 282, partie 2(b) du Code pénal russe – qui emporte une peine allant jusqu’à cinq ans de prison) et de « détournement d’une très grande ampleur », (article 160, partie 4 – peine allant jusqu’à 10 ans de prison).
L’affaire pénale visant Natalia Charina a été ouverte en octobre 2015 après le dépôt d’une plainte par un ancien employé de la bibliothèque qui avait été licencié en 2010. Natalia Charina avait initialement été inculpée en vertu de la législation relative à la lutte contre l’extrémisme, pour avoir distribué des documents imprimés diffusant une « propagande anti-russe et anti-Russie » : les enquêteurs auraient trouvé des œuvres du nationaliste ukrainien Dimitri Kortchinski dans une pile de livres qui n’avaient pas encore été indexés ni mis à la disposition des personnes inscrites à la bibliothèque. Natalia Charina a nié que ces livres appartenaient à la bibliothèque et affirme qu’ils avaient été placés là en secret par des responsables de l’application des lois. Elle a été placée en résidence surveillée le 30 octobre 2015.
Le 5 avril 2016, quelques semaines avant que son placement en résidence surveillée n’arrive à son terme, Natalia Charina a été inculpée de détournement et son avocat affirme que cette inculpation est dénuée de tout fondement, d’une part parce qu’elle a réglé ses dépenses judiciaires avec son propre argent, et d’autre part parce que les avocats de la bibliothèque n’étaient pas même habilités à la représenter au tribunal.
Selon la fille de Natalia Charina, le 27 juillet, lors d’une audience visant à prolonger sa détention, le juge lui a demandé pourquoi elle était si mécontente de son placement en résidence surveillée, ajoutant : « J’ai vu ici [d’autres] prisonnières qui ont sauté de joie lorsqu’elles ont été placées en résidence surveillée. » Le juge a ensuite déclaré que « ce temps sera de toute façon compté » dans la peine future de Natalia Charina. Cette remarque indiquait à la famille et aux soutiens de Natalia Charina que le juge était partial et bien décidé à la condamner.
Le 15 août, le parquet général de Moscou a refusé de signer l’acte d’inculpation de Natalia Charina et l’affaire a été renvoyée pour complément d’enquête. Tout laissait alors espérer que ce serait l’occasion de clore le dossier. Mais ce ne fut pas le cas, et le dossier a été transmis à la cour pour une audience préliminaire le 21 octobre.
La santé de Natalia Charina et la possibilité pour elle de recevoir des soins médicaux adaptés suscitent de fortes inquiétudes. Elle souffre d’hypertension et le fait de ne pas pouvoir sortir marcher en plein air a nui à son état de santé. Sa fille a déclaré à Amnesty International que Natalia Charina a besoin d’une opération chirurgicale à la colonne vertébrale. Pour que celle-ci puisse avoir lieu, elle a besoin des résultats de son IRM, qui se trouvent au tribunal de l’arrondissement de Taganski à Moscou depuis le 30 octobre 2015, quand Natalia Charina a demandé pour la première fois la permission de sortir marcher. En juin 2016, Natalia Charina a déposé une demande auprès du tribunal afin d’obtenir les résultats de cet examen. La personne assurant le secrétariat a cependant refusé de les lui remettre, au prétexte que « tout le personnel est en congés ». La famille n’avait toujours pas obtenu ces scanners.
Nom : Natalia Charina, Femme
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