Mojahed Kourkouri a été arrêté le 20 décembre 2022 près de Ghalehtol, dans la province du Khuzestan, par des agents du ministère du Renseignement, des gardiens de la révolution et des membres du Commandement des forces de l’ordre de la République islamique d’Iran (plus connu sous son acronyme perse FARAJA) au cours de ce que les médias d’État ont qualifié d’« affrontement armé ». Il a été blessé au genou par des balles réelles et au bras par des éclats de grenades au moment de son arrestation.
Après avril 2023, il a déclaré à sa famille lors de brefs appels téléphoniques, plutôt rares : « Elles [les autorités] vont me tuer ». Il a ajouté qu’il souffrait énormément, notamment de sa blessure au genou, et qu’il avait besoin de soins médicaux. Il a également dit qu’il pensait que les autorités lui administraient de force des substances chimiques. Fin avril 2023, l’avocat indépendant de Mojahed Kourkouri a appris que son client était incarcéré à la prison de Sheiban et a pu lui rendre une brève visite.
D’après les informations qu’a reçues Amnesty International, Mojahed Kourkouri n’était pas présent lors des manifestations qui se sont déroulées à Izeh le 16 novembre 2023. Des proches de Kian Pirfalak, le garçon de neuf ans abattu par des agents des forces de sécurité ce jour-là, ont répété publiquement que Mojahed Kourkouri n’avait rien à voir avec cet homicide et en ont attribué à plusieurs reprises la responsabilité aux forces de sécurité iraniennes.
Amnesty International a déjà recueilli des informations sur le fait que des membres des forces de sécurité en civil ont tiré mortellement à balles réelles sur Kian Pirfalak lors des manifestations qui ont eu lieu à Izeh le 16 novembre 2022. Les forces de sécurité ont ouvert le feu sur la voiture dans laquelle le garçon se trouvait avec sa famille. Lors des funérailles de Kian Pirfalak le 18 novembre 2022, sa mère, Mahmonir (Zeinab) Molaierad, a raconté publiquement les circonstances de sa mort en ces termes : « Je tiens à vous raconter ce qui s’est passé ce jour-là afin que [les autorités] ne puissent pas dire qu’il s’agissait de " terroristes ", parce qu’elles mentent. »
Mahmonir Molaierad a expliqué qu’ils se rendaient à leur domicile, à Izeh, lorsqu’ils sont arrivés à un carrefour où étaient postés de nombreux policiers antiémeutes et agents en civil. Un agent leur a ordonné de s’arrêter et de faire demi-tour alors qu’ils avaient déjà passé les forces de sécurité. Le père de Kian Pirfalak, qui conduisait, a obéi. Soudain, plusieurs agents en civils ont ouvert le feu sur la voiture. Kian Pirfalak a été mortellement touché et son père grièvement blessé. Mahmonir Molaierad a indiqué que pendant les tirs, elle a ouvert la porte avant côté passager, alertant les agents en criant que ses enfants étaient à bord et leur demandant d’arrêter de tirer. Trois des agents en civil qui tiraient se sont alors approchés de la famille, ont sorti le corps blessé de Kian Pirfalak du véhicule et l’ont emmené dans un immeuble proche.
Mahmonir Molaierad a déclaré : « Je ne sais pas pourquoi [ils nous ont tiré dessus] […] Ils ont arrosé la voiture de balles […] J’ai dit aux enfants de se cacher sous les sièges. Mon plus jeune s’est blotti sous le tableau de bord, mais Kian était dodu et ne passait pas sous le siège. »
La mort de Kian Pirfalak a suscité un élan de colère et de solidarité, en Iran mais aussi dans le monde entier, particulièrement après la diffusion d’une vidéo où on le voit démarrer une présentation scolaire par les mots « Au nom d’un Dieu arc-en-ciel », puis de tester un bateau fabriqué en bâtonnets de glace. Le soir où Kian Pirfalak a été tué, des représentants de l’État, dont Valiollah Hayati, adjoint au gouverneur de la province du Khuzestan chargé de l’application des lois et de la sécurité, a affirmé que des « agents terroristes » étaient responsables de cet incident. Lorsque les médias iraniens officiels ont cité Mojahed Kourkouri comme le suspect arrêté en lien avec l’homicide de Kian Pirfalak fin décembre 2022, la famille du garçon a démenti publiquement son implication.
Amnesty International a dénoncé la pratique des autorités iraniennes consistant à couvrir et dissimuler systématiquement leurs crimes et à nier leur responsabilité dans les homicides illégaux d’enfants perpétrés par les forces de sécurité.
Les autorités iraniennes se livrent depuis quelques temps à une nouvelle frénésie d’exécutions : elles ont ôté la vie à pas moins de 115 personnes au cours du seul mois de novembre 2023, soit près du double du nombre d’exécutions ayant eu lieu en novembre 2022. Cette forte augmentation a pour toile de fond l’intensification du recours des autorités iraniennes à la peine de mort comme instrument de répression politique, dans le but de tourmenter et de terroriser la population iranienne afin d’imposer le silence et la soumission par la force.
Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine capitale, en toutes circonstances.
La peine de mort est une violation du droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Amnesty International ne cesse d’appeler tous les pays où elle est encore en vigueur, y compris l’Iran, à instaurer un moratoire officiel sur les exécutions, en vue de l’abolition totale de la peine de mort.