Jiang Tianyong est intervenu dans plusieurs affaires très médiatisées et a soutenu d’autres défenseurs des droits humains, dont l’avocat spécialiste des droits fondamentaux Gao Zhisheng, qui a été emprisonné et constamment harcelé en raison de ses activités en faveur des droits humains, et le militant juridique aveugle Chen Guangcheng, qui a dénoncé des pratiques d’avortement forcé imposées par les autorités locales à des habitantes du village de Dongshigu (ville-préfecture de Linyi, province du Shandong). Avant son incarcération actuelle, Jiang Tianyong a été détenu pour la dernière fois en mars 2014, après être allé enquêter avec trois autres avocats dans une « prison noire » (c’est-à-dire un lieu de détention non officiel) à Jiansanjiang (province de Heilongjiang), où se trouvaient, semble-t-il, des adeptes du Fa Lun Gong. Battu en détention, il a eu huit côtes fracturées.
Jiang Tianyong a été déclaré coupable d’« incitation à la subversion de l’État » par le tribunal populaire intermédiaire de la ville de Changsha le 21 novembre 2017. Il a été condamné à deux ans d’emprisonnement et à trois ans de privation de ses droits politiques.
Jiang Tianyong a été détenu au secret pendant plus d’un an, et ni sa famille ni les avocats qu’elle a engagés n’ont été informés officiellement de la tenue de son procès, en août, ce qui est contraire au droit chinois. Ils en ont entendu parler par la presse, juste avant qu’il n’ait lieu. Jiang Tianyong a été représenté par deux avocats commis d’office. Selon Jin Bianling, le père de Jiang Tianyong a été arrêté par des agents des services de la sûreté nationale et emmené sous escorte à l’audience du mois d’août.
La première audience du procès de Jiang Tianyong a eu lieu devant le tribunal intermédiaire de la ville de Changsha le 22 août 2017. Lors de cette audience, il a reconnu l’accusation d’« incitation à la subversion de l’État ». Pendant le procès, il s’est également « excusé » d’avoir lancé des rumeurs attribuant des actes de torture à la police chinoise et d’avoir participé à des ateliers à l’étranger pour débattre d’un changement du système politique chinois. D’après la femme de Jiang Tianyong, Jin Bianling, une « personne anonyme du système de Changsha » a dit que Jiang Tianyong avait été torturé et qu’une de ses jambes était tellement enflée qu’il ne pouvait plus tenir debout. Il est possible que les « aveux » de Jiang Tianyong relatifs au chef d’accusation d’« incitation à la subversion de l’État » aient été obtenus au moyen de la torture ou d’autres mauvais traitements.
Dans le cadre d’une campagne menée pour discréditer les allégations de torture, des médias de Chine continentale ont diffusé un enregistrement vidéo d’une interview de Jiang Tianyong réalisée en février. Dans cette vidéo, Jiang Tianyong affirmait avoir inventé les allégations de torture de Xie Yang. Cependant, comme l’ont fait observer des commentateurs, Jiang Tianyong était détenu au secret au moment où ces allégations ont commencé à faire les gros titres de la presse internationale. De plus, les « aveux forcés » sur les chaînes de télévision d’État sont devenus monnaie courante en Chine ces dernières années.
En janvier 2017, l’avocat spécialiste des droits humains Xie Yang, qui avait été arrêté sur fond de mesures répressives contre les avocats en juillet 2015, s’est entretenu avec son conseil, qui a par la suite relaté de manière détaillée la façon dont Xie Yang avait été torturé en détention. Ces allégations de torture ont été largement relayées par les médias internationaux et, en février, onze pays ont adressé à la Chine une lettre non publique. Ils y exprimaient « des inquiétudes croissantes en raison des récentes allégations faisant état de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans des affaires concernant des avocats spécialistes des droits humains et d’autres défenseurs des droits fondamentaux placés en détention ». Ils appelaient également la Chine à mettre fin à la pratique de la « résidence surveillée dans un lieu désigné ».
Cette forme de détention secrète au secret permet à la police de détenir des personnes jusqu’à six mois en dehors du système officiel de détention, sans qu’elles puissent consulter l’avocat de leur choix ni voir leurs proches ou toute autre personne du monde extérieur, ce qui fait que le risque de torture et de mauvais traitements est réel. Le contenu de cette lettre a par la suite été divulgué par la presse internationale. Les médias d’État chinois ont diffusé un déluge de reportages assimilant les allégations de torture à des « fausses nouvelles ».
Près de 250 avocats et militants ont été pris pour cible dans le contexte de la répression sans précédent qui s’est abattue sur les défenseurs des droits humains dans le pays depuis juillet 2015. L’avocat Wang Quanzhang est détenu au secret depuis plus de deux ans ; il est le dernier des défenseurs ainsi visés à ne pas avoir été jugé.